Violé par ma mère

Témoignage Publié le 08.07.2022

Ma première fois

Ça fait un moment qu’on se connaît

Un peu plus qu’on se côtoie

La confiance s’est installée insidieusement

Au point que j’en suis devenu aveugle

Impossible de penser par moi-même

Comme un petit enfant que je suis

On est fusionnel, forçant l’admiration

Des proches des badauds

Sans que personne n’y voit du mal

Juste du positif comblant l’absence

De papa qui ramène l’argent

Oui c’est beau d’avoir confiance

Mais que quand on peut réfléchir

Notre complicité naturelle

S’est prolongée par des actes normaux

Comme le soin à un enfant, le bain

Acte évident, logique, avant l’indépendance

Moins après, comme nous, sans que je le sache

Tu ne t’es pas arrêtée là

Je ne savais pas que je pouvais dire NON

Bains, douches, au début

Complétés par les entrées dans ma chambre

Sans prévenir, sans frapper, pour mater, surveiller

Je devais dire non mais je ne savais pas

Ne savais pas que je pouvais dire non

Tu as pris mon silence comme un encouragement

A tort car ce n’était pas à moi de savoir

Tu as continué sans que je sache que ce n’est pas normal

Les câlins naturels ont fait place à d’autres

Plus précis, plus intimes, des adultes

Relation qui me détruit gentiment mais sûrement

Me marquant au fer rouge

Tu as poussé le vice jusqu’au bout

Jusqu’à la finition finale pour m’apprendre la vie

Ma mémoire me protège de certains détails

Des détails qui n’effacent pas

Les faits revenus il y a peu

Du plus profond de l’amnésie salvatrice

Quantité négligeable tant les dégâts sont là

Indélébiles comme mes tatouages

Forts comme ma volonté d’empêcher

De telles souffrances aux autres

Aux victimes potentielles par l’association créée

Oui, tu m’as abusé, violé, alors que j’étais impuissant

Comme tous les enfants de mon âge

Le calvaire a duré six ans minimum

De mes 9 ans à mes 15 ans

Peut-être avant, mais mon cerveau

Ne veut me le dire

Il lui a fallu 29 ans

Pour me faire réaliser le drame

C’était en août 2015 que c’est venu

Au cours d’une promenade avec E.

28 ans depuis la fin des viols

Pour avoir une explication plausible

Du néant de ma vie sentimentale

De l’absence de confiance en moi

Dans le privé avec les autres

Et comment, pourquoi, j’ai tenu

En sécurité dans l’enfer de la guerre

Ainsi que ma haine profonde pour les pédophiles

Ou l’immense compréhension que j’ai

Pour les victimes qui ne se sont pas relevées

Ou toutes seules, abandonnées de tous

Qui a fait venir instinctivement

La motivation pour l’écriture libératoire