J'ai 49 ans cette année, et j'ai eu la chance de rencontrer l'homme de ma vie l'année de mes 20 ans...
De mes 11 ans à 20 ans, j'ai été victime d'inceste, avec des périodes plus ou moins actives de la part des voleurs de mon enfance qui étaient mon beau-père et ma mère. Mon beau-père m'a dit qu'établir cette relation serait une belle surprise pour ma mère lorsqu'elle reviendrait de voyage pour des vacances de Noël. Dès son retour, ma mère n'a montré aucune objection, et une relation sexuelle en ma présence, sur mon corps, entre eux, avec ma participation guidée et accompagnée par leurs mains ou des films de David Hamilton, avec la participation de chacun de ces adultes (donc ma mère), est devenue le rituel du dimanche... Cela a duré des années... J'ai essayé de parler à ma belle-mère, mais je n'ai pas été entendue, cela ne pouvait pas être vrai, alors je me suis tue.
"Eduquer sexuellement son enfant se faisait dans d'autres cultures, cela permettait de se découvrir, de ne pas passer à côté du plaisir", mais "il ne fallait pas en parler, car les autres ne pourraient pas comprendre cette relation incroyable", c'était un secret. Cela a duré des années... et les actes sont devenus plus invasifs avec l'âge : doigts, fellation demandée sous prétexte que ma mère "n'aimait pas le faire". Une nuit où elle était hospitalisée, il a voulu entrer en moi, mais s'est finalement retenu, je n'avais pas encore 16 ans. Puis mon corps a parlé pour moi, je suis devenue anorexique. Alors, durant les années qui ont suivi, j'ai vu des médecins (qui étaient leurs amis ou des relations) mais toujours en leur présence, j'ai été harcelée : toute situation était prétexte à attouchements et plus, mais en même temps j'étais dénigrée, nommée "Dachau, Buchenwald, etc." car ma maigreur inspirait moins de "désir".
Une fois le cap des 18 ans passé, il est entré en moi un jour où ma mère était absente, pour lui faire une surprise, disait-il encore. Ma mère a vu quelques jours après cet acte, et a demandé que je continue cette relation avec lui pour son bien à lui et le bonheur de leur couple, mais a dit qu'elle ne pourrait plus voir ou participer, car j'étais devenue une femme. Durant toutes ces années, j'ai cherché tous les moyens d'échapper à cela, trouvant des prétextes pour espacer ces actes, comme le travail scolaire, via l'anorexie, éviter de descendre aux toilettes la nuit pour ne pas le croiser, suivre ma mère au travail pour ne pas rester à la maison, échaffauder des plans pour le tuer, demander à mon arrière-grand-père en pensée de m'aider à tenir, me dissocier pour ne pas ressentir, tenter de me suicider... Puis l'année de mes 20 ans, j'ai essayé de parler de nouveau, mais les personnes ont parfois des réactions déconcertantes : une m'a proposé de rejoindre son couple, un autre -adulte- en a profité pour installer un jeu de séduction et d'emprise, une autre m'a confirmé que cela se faisait dans d'autres cultures et que c'était de l'amour, que je devais accepter et surtout pas leur en vouloir...
Et puis, j'ai rencontré l'homme de ma vie. Mon beau-père a encore essayé d'obtenir des faveurs, j'ai passé une journée en enfer, je croyais que j'allais mourir, je n'ai pas cédé au fait qu'il me touche et me salisse encore. J'ai raconté toute mon histoire à l'homme de ma vie un mois et demi après que nous nous soyons rencontrés, il m'a crue, et il m'a aidée à changer de vie, puis m'a rejoint, et nous avons pu avancer tous les deux. Avec des hauts et des bas : une plainte qui n'a pas abouti faute de preuves (ils étaient francs-maçons et soutenus par un cabinet d'avocats très réputé, on m'a conseillé de renoncer face à eux, je n'ai pas renoncé, mais l'affaire a été classée sans suite), j'ai changé de prénom car mon père avait choisi que je porte le même que celui de ma mère, je suis passée par plusieurs phases de soins régulièrement et de manière de plus en plus espacée (ostéopathe, psychiatre spécialisé pour les agressions sur enfants, hypnose consciente et technique de l'EMDR...).
J'ai tenté aussi de comprendre en reprenant contact avec ma mère durant quelques années, avec la possibilité de lui poser toutes les questions qui me venaient à l'esprit. Elle a répondu, j'y ai cru, mais elle a reconstruit sa vie, et après quelques années, ce qui m'a poussé à ne plus jamais la voir sont deux choses : elle m'a avoué qu'elle avait soutenu mon beau-père lors des auditions, qu'elle m'avait accusée et qu'elle avait nié avoir participé ; l'autre chose est qu'elle a choisi de vivre sans raconter son histoire à son nouveau compagnon, ce qui créait des situations horribles quand elle se mettait en valeur ou exemple d'éducatrice, et me soumettait de nouveau au silence, comme durant les dix années de souffrance et d'abus, cela m'était devenu intolérable, insoutenable, et me rendait de nouveau malade. J'ai essayé, j'ai eu des réponses, je ne peux toujours pas comprendre comment un adulte peut ainsi détruire un enfant, mais je n'ai pas de regrets.
Finalement, j'ai dans un premier temps pu continuer mes études et devenir enseignante en primaire (endroit privilégié pour observer et protéger les enfants), et surtout, l'essentiel, le plus important, le vrai bonheur, en s'aimant (depuis bientôt 30 ans), nous avons pu construire une famille de 3 jeunes femmes épanouies et incroyables (une quatrième demoiselle a quitté ce monde alors que j'étais enceinte de quelques mois, et cette épreuve nous a aussi appris et rendus plus soudés encore), nous avons rapidement changé de région, et nous avons pu construire notre nid, et en faire un lieu qui aujourd'hui accueille non seulement nos enfants, mais leurs compagnons, et depuis quelques mois un petit-enfant. Alors, mon message est un message d'espoir : l'amour permet de réparer, d'avancer, de construire, d'espérer, de créer, de croire, de grandir, et de pouvoir dire enfin : la vie est belle !