18 ans de vie commune après la révélation de l'inceste de mon épouse...

Témoignage Publié le 29.06.2013

Une autre forme de témoignage que ce que j'ai pu lire sur le oueb, du moins tel était mon but, j'espère l'avoir atteint, et surtout qu'il vous sera utile, c'est avant tout pour cela que je le fais, même si je m'apercois que cela a un effet libérateur ! Introduction : quelques pré-ambules, attention ce que je raconte est mon ressenti, ce ressenti n'est pas que lié à mon épouse et l'inceste qu'elle a vécu mais aussi à son caractère, son vécu mais bien entendu le mien aussi, mon enfance... en résumé ne généralisez pas!

La découverte

Dans mon témoignage je surnome ici mon épouse KYenA. Je me nome YaKa. Très rapidement après notre rencontre je sentais bien qu'KYenA parlait de ses parents de façon distanciée, grand père, grand mère, par leur surnom de grand parents mais jamais, non jamais père, mère, papa, maman. C'est lors de la rencontre de sa soeur qu'il m'est apparu flagrant cette façon distanciée qu'elles avaient de parler de leur parents même entre elle, et cette abscence d'amour qu'elles avaient pour eux.

La révélation

Un soir, peu de temps après notre rencontre, KYenA me l'a révélé: l'inceste de son père, je n'ai pas vraiment été surpris, disons que je sentais qu'il y avait quelque chose d'étrange avec ses parents, je me suis donc sentit soulagé, soulagé par cette révélation car mon intuition était bonne, enfin j'allais mieux comprendre la personne que j'avais en face de moi.

L'inceste je ne connaissais pas, non je crois que je peux le dire. Le viol oui, mais toujours avec ces clichés qui sont véhiculés ici et là du genre: mais cette salope elle l'a bien cherchée regarde comme elle s'habille ou phrase du genre... et puis j'avais l'idée que le temps effacait la peine, la douleur, pourquoi en parler si longtemps.

J'ai donc vite réalisé que du moins pour l'inceste, même après plus de 20 ans il y avait toujours des traces, que les choses n'avait pas disparues à la vue de cette distance que KYenA mettait avec ses parents.

Bref outre le soulagement, j'étais par ailleurs désenparé... je l'ai donc beaucoup écoutée, intérogée, jamais jugé, pas pris de position (à ce stade) et finalement laissé avancer par elle même.
 

Une confidente...

Chemin allant, une grande confiance s'est installée entre nous, nous avons pris le chemin du mariage, même si je dois le dire je me suis laissé porté dans cette voie, je n'y étais pas opposé, oh non, mais je ne courrais pas après (me faisait elle peur inconsciement?)

Comme beaucoup de garçon, je parlais avec ma mère et bien sur de ma relation avec ma nouvelle petite amie, qui grandissait dans mon coeur. Et bien sur, je lui est parlé du passé de KYenA. Ma mère toujours intéressée par les problèmes humains, avait repéré un magazine qui justement parlait de l'inceste. Une complicité c'est alors installée entre nous, YaKa qu'en penses tu je lui donne l'article? je le laisse trainer? nous concluons qu'on le laisse dans les toillettes... et arriva ce qui arriva.

L'autre révélation...

KYenA le découvre, ... elle découvre qu'elle n'est pas seule, découvre la complexité familliale associée. Elle me parle de cet article bien sûr, elle se renseigne de plus en plus, les souvenirs reviennent, souvenirs de relations familliales très méprisante, injustes, relations d'enfance avec ses parents, ses frères et soeurs.

Maintenant je peux le dire, avec le recul, avec ce que j'ai lu, vu, entendu, c'est du grand classique. Ce sur quoi je voudrais insister c'est peut être sur ce que le conjoint resent, observe, ce qu'il voit qui est si peu écrit et pourtant si traumatisant !

Cette re-découverte de son vécu, des relations familliales, cette reprise de contacts avec des membres de la familles pour comprendre, à la manière d'une enquête policière. Devant les policiers des gens disent la vérité, d'autres la détourne, d'autres accuse, d'autres encore minimisent les problèmes (c'était il y a longtemps il faut oublier) eh bien pour l'inceste c'est la même chose, l'Homme est ce qu'il est... bien tristement!

Bien sur tout ce soulèvement famillial, mais avant tout personnel pour KYenA est énorme, cela l'empêche de dormir la nuit, de manger normalement, cela génère des discussions des nuits durant entre nous à essayer de comprendre ce qui est arrivé, mais aussi la comprendre elle.

C'est là que commence mon aide il s'agit de la guider, lui indiquer le normal de l'anormal, c'est à dire qu'est ce que l'amour des parents normaux (non incestueux du moins) pour leurs enfants? Qu'est ce que la gravité de faits? C'est alors que je prend cette image, pour moi même déjà, mais pour l'aider aussi, cette image d'un père qui serait un meurtrier.

Note: ces 2 éléments parents normaux et gravité de faits sont des choses que j'ai eu à lui rappeler pendant des années et cela continue parfois, même si les années appaisent cette nécessité.

Son père sait qu'elle sait qu'il est le meurtrier, et elle le dit à tout le monde... quel peut être la réaction du meurtrier à part se protéger? De vrais meurtriers se protègent en fuyant, ce cachant, mais cela fait tant d'années que son père n'a jamais fuit, il est resté à la maison comme tout bon père de famille, sa mère aussi...

Non il est bien plus simple de manipuler les autres, faire passer la victime pour folle, faible, l'enfoncer. Et oui ce comportement d'écrasement, de déni de la victime, le "meurtrier" l'a toute sa vie après les actes incestueux, il se protège, au fond qui ne ferait pas de même en situation de meurtrier... le problème n'est pas là il ne faut pas commettre le meurtre. Que fait on aux meurtriers on les emprisonnent, oui c'est bien ce que méritent aussi les agresseurs d'inceste, c'est pour cela qu'il faut porter plainte, quand il est encore temps...

Note: Cette période je la vois comme interminable, KYenA avait des questionnement permanents, peut être était ce parce que l'on en parlait le jour et la nuit mais pour moi cela a duré une éternité.

En même temps que tout cela KYenA consulte divers psychologues et découvre l'association SOS inceste ou elle participe à des groupes de paroles, tout cela l'aide dans son cheminement.

Le grand ménage

Cette cartographie familliale, cette enquête policière, permet un repérage des bons et des méchants, mais les inspecteurs se trompent parfois, il en est de même ici KYenA s'est trompé parfois sur la vraie nature des gens, et les gens parlent entre eux... et cela retombe sur KYenA car dans l'inceste il est malheureusement bien rare qu'il n'y est qu'une victime et qu'un agresseur dans la famille qui ont a se protéger. Difficile de faire un parallele avec la police ici (du moins pour moi) je pense au réseau mafieux mais il y a des règlements de compte entre eux (agresseurs), je ne crois pas qu'il y est cela dans l'inceste, au contraire les agresseurs semblent soudés entre eux, ils font blocs contre leurs victimes.

Note: en tant que conjoint vous êtes au coeur de cette enquête pas ordinaire!
Les agresseurs sont en cavale, on ne peut pas les arrêter, il y a prescription des faits... que faites vous? C'est simple vous fuyez! la fuite ici consiste à couper les liens familliaux, ne plus voir les méchants x, y ou z. Préserver des contacts avec les "considérés" bons, comme je l'ai dit auparavant parfois l'inspecteur se trompe...

L'invitation à notre mariage a donc été la première phase du "ménage", et de révélations. Un example KYenA n'invite pas mon père, tiens mais sa mère est solidaire de son père elle ne viendra pas... donc finalement qui est elle cette mère? c'est là que KYenA remonte son passé le jour, la nuit, la nuit, le jour, ...

Note:  Aimeriez vous entendre des choses comme "ne vois plus tes parents, tes frères et soeurs?" Même si certain membre de sa famille véhicule le MAL, je lui est toujours laissé prendre ses décisions, je l'ai écouté.

Ce "ménage" a continué jusqu'à il y a peu, car il y a les bons, les méchants, mais aussi les entre deux... ces personnes qui à un certain stade, n'ont peut etre pas vu la gravité des faits comme KYenA à pu le voir, ou bien simplement qui sont les vrais méchants. Car oui l'Homme pardonne, excuse, ou probablement plus justement est aveuglé, est encore dans le déni de l'inceste!

Note: en tant que conjoint je réalise à ce stade de ma vie avec KYenA comme ce doit être difficile de faire le ménage dans sa famille, car nous avions des contacts normaux, conviviaux avec ces "entre deux" et puis KYenA décide de ne plus les voir, pour les raisons évoquées auparavant, donc nous ne les voyons plus. Si ces personnes avaient été dans une famille "normale", n'avaient pas été victime, je n'aurai pas coupé avec elles, hors ici pour des éléments qui vous sont quelque part étrangers, qui au font nous dépassent, votre conjoint coupe la relation et vous n'avez pas mot à dire (ce ne serait bien sur pas le cas pour une famille "normale").
Cela a vraiment été très perturbant pour moi.
 

L'éducation/L'amour

Pour l'éducation, les détails ne me semblent d'aucune utilité dans ce chapitre tellement les situations familliales peuvent être differentes, famille classique, recomposée, caractères des enfants, qui a élevé qui? que je me contenterais de questions que je n'ai formulé que récement en groupe de parole Face à l'inceste qui me semblent être ce qu'il faut avoir en tête en tant que conjoint.

Pour l'amour du conjoint, je crois que finalement cela se rapproche de l'éducation d'une certaine manière, c'est aussi une histoire d'amour.

Les questions:
- Comment donner lorsque l'on a pas reçu soit même?
- Comment savoir quoi donner et comment donner lorsque l'on a reçu que de la mal-traitrance morale*?
*KYenA a eu des attouchements de la part de son père étant enfant, ensuite un "inceste moral" très profond (manipulation, perversion) jusque vers l'age de 20 ans.
 

Note: le rôle que j'ai essayé de jouer ici à été le "référent" de l'éducation dans une famille "normale". Cependant j'ai vécu cela comme une lutte perpetuelle avec ma femme car bien sur cela la culpabilisait, même si tel n'étais pas mon intention. J'agissait pour les enfants uniquement.  Ce sujet a été tellement dur pour moi, pour notre premier enfant que j'ai penser à quitter notre couple à différentes reprises tellement c'était dur pour moi, pour notre second j'ai adopté une toute autre posture = la fuite, pas du couple non mais de son éducation.

Note: d'un point de vue de l'amour dans le couple, j'ai "tout donné", probablement en évoluant vers une sorte d'infirmier de psychologue dans le rôle du "référant". De toute cette attention que j'ai pu donné à KYenA, je me suis mis dans la position "j'attend tout" sans rien manifester si cela ne venait pas, sans m'exprimer.

La vie au quotidien

Je n'ai pas bien envie de parler de cela, ce sont des choses très intime du couple, il est pourtant utile d'en faire état car en tant que conjoint cela nous empoisone la vie aussi, le site Face à l'inceste et les groupes de paroles Face à l'inceste couvrent bien cela je pense, je ne m'étalerai donc pas.

Je ne citerai que ce à quoi je pense, ces petites choses que j'ai découvert et accepté tout au long de ma vie avec KYenA, mais que je n'avais pas relié à l'inceste, merci Face à l'inceste pour votre site et cette page sur les symptomes, cela m'a permi de faire ce lien de façon explicite.

Voici ce à quoi j'ai été confronté, ou du moins ce qui m'a marqué:
La peur, l'angoisse, un énorme manque d'assurance en soi cachée derrière une "grande gueule", l'alimentation/la relation à la nouriture, le sommeil, la digestion,  les micoses vaginales à répétition, les fissures anales, la mauvaise image de soi, le besoin de controler, maitriser.

Note: vous vous demandez surement et avec le temps? eh bien des choses vont mieux, disparaissent, mais certaines ré-apparaissent, sans que vous ne sachiez pourquoi... et certaines sont toujours là.

La rage, Le besoin de parler...

Un sujet tabou par excellence... probablement mon caractère aussi, mais je crois que l'on est probablement tous assez proche en caractère (j'entends nous conjoint) s'il on se met en couple avec une victime d'inceste (du moins pour qqs années).

J'entends par là que je pense que l'on est tous à l'écoute, attentionné, indulgent,...

Dans ce contexte, même si j'avais ma mère comme confidente avant notre mariage, j'ai ensuite à peu de chose près gardé tout ce que nous échangions avec KYenA pour moi et ceci pendant ces 18 longues années, jusqu'à recontrer des difficultées importantes au travail qui m'on amené à consulter un psy du travail et après ~9 mois m'on amené a me rendre compte comme ce sujet de l'inceste de ma femme me pesait énormément et qu'il était temps que je pense à moi.

J'ai donc commencer à consulter d'autre psychologue pour en arriver à...
 

... La séparation


Trop c'est trop, il me fallait prendre de la distance, c'est ce que j'ai fait il y a qqs mois maintenant. Et c'est ce qui me permet d'écrire tout cela, j'aurai bien aimé écrire cela il y a 9 mois mais... je n'y arrivais tout simplement pas, j'ai bien commencé pourtant. Je crois que je n'avais pas assez de distance sur les événements et puis pas l'espace pour le faire dans notre couple.
 

Et après ?


C'est bien là que j'en suis, est ce définitif? est ce que KYenA peut se soigner, est ce que YaKa peux se soigner? et peut on repartir de plus belle? ah j'aimerai tant, elle aussi d'ailleurs.
Je qualifie notre amour d'impossible car:
* d'un côté j'ai tellement appris à connaitre qu'KYenA que je sais ce qu'elle a au fond d'elle, je sais pourquoi elle ne peut aimer "normalement", je comprends ses maladraisses, j'excuse tout!
* mais de l'autre j'ai tellement besoin de recevoir de l'amour que je ne peux me satisfaire de ne pas en recevoir mais juste le voir au fond d'elle...

Aurais je la patience d'attendre que nous allions mieux?
 

Conclusion

L'avenir dira pour notre couple...

Pour ce qui est du conjoint accompagnant la victime, s'il y a un conseil que j'aurai à donner, c'est vraiment ne faites pas la même erreur que moi, ne restez pas seul, parlez, dépassez cette honte que vous pouvez ressentir, ce sentiment de devoir étaler sa vie intime de couple aux autres.
Cela peut etre à des ami(e)s, des professionnels, mais aussi dans des groupes de paroles, rien de tel que de partager nos problèmes, il y a moins à étaler entre conjoints et victimes, on se comprend mieux et plus vite. Tout comme les victimes le font, nous devons le faire.

Je pense aussi très sincèrement qu'avoir un groupe de parole pour conjoint uniquement de temps en temps peut être bénéfique. En effet il m'a été très dur d'écrire ce texte, car mes mots même s'il ne se veulent être que des faits, je le sais peuvent et seront compris comme un jugement par certain même si tel n'est absolument pas mon intention. De même j'ai eu a me controller lors de groupe de parole sur ce que je disais pour éviter d'être vu comme juge.

Une autre forme de témoignage que ce que j'ai pu lire sur le oueb, du moins tel était mon but, j'espère l'avoir atteint, et surtout qu'il vous sera utile, c'est avant tout pour cela que je le fais, même si je m'appercois que cela a un effet libérateur!