Climat incestueux : comment se reconstruire et revivre ?

Témoignage Publié le 30.03.2006

Ça fait maintenant quelques semaines que j’ai réussi à mettre le terme de climat incestueux sur les quelques moments de cette vie qui ne m’ont plus appartenu.
Je suis à présent quelqu’un d’autre, un être meurtri par la violence, le non respect. Tous ses sentiments qui se bousculent dans ma tête : incompréhension, dégoût, colère.

Impression d’être une proie, un objet sexuel et non plus un être humain. Mais je me demande encore aujourd’hui comment un père peut-il demander à sa fille de faire l’amour avec lui… plus de limites, tout s’effondre, la relation se brise.
Dès lors où l’interdit est franchi, où sont les repères ? Où se raccrocher dans se cafouillage.

Où sont les barrières entre un père et une fille ? Comment peut-on se construire lorsque la blessure est si profonde et si lourde de culpabilité ? je me suis toujours demandée si j’avais fais quelque chose de mal...mais non, c’est mon père qui a déraillé...c’est lui qui c’est posté derrière moi en me caressant les épaules, m’embrassant tendrement dans le cou, me chuchotant doucement à l’oreille qu’il avait BESOIN de faire l’amour et je crois que le sentiment que j’ai ressenti à ce moment là d’être un objet sexuel, objet de fantasme, de désir, a été pour moi un raz-de-marée qui a tout dévasté sur son passage.

Cauchemar d’avoir senti ses mains emplies de mauvaises intentions sur mon corps, violée dans mon intimité d’adolescente. Ces mots chuchotés, qui n’aurait jamais du être prononcés, me résonnent encore dans la tête, mais comment peut-on oser imaginer avoir une relation sexuelle avec sa propre fille ? A ce moment là, je n'étais plus sa fille...j'étais réduite à un statut d'objet qui pouvait répondre à sa satisfaction sexuelle.

J'éprouve tellement de haine envers lui pour avoir détruit une partie de moi, de m'infliger cette terrible souffrance de me sentir sali, coupable...
Longtemps je ne me suis pas sentie victime, je me disais que l'inceste c'était lorsqu'il y avait viol, pénétration génitale. Puis, en lisant et en consultant cet excellent site, je me suis rendue compte que les situations incestueuses que j'ai vécu ont également de lourdes conséquences et que j'étais moi aussi une survivante.

Aujourd’hui, j’y repense souvent, je souffre de ce qui est arrivé, je ne peux plus me le cacher.J'aimerais tellement effacer cette épouvantable partie de ma vie, et me sentir normale, heureuse. Mais au lieu de ça, je me sens prisonnière de ce passé, j’éprouve des difficultés avec mon compagnon, homme que j’aime plus que tout, et pourtant je le fais tellement souffrir... problème d’absence de désir sexuel, refus d’être caressé. Comment vais-je faire pour surmonter tout cela ? est-ce possible ? peut-on vraiment revivre lorsque tout s'est effondré ? peut-on « guérir » ?

En tout cas, je remercie chaque personne qui lira mon témoignage car je sais qu'ici je ne suis pas seule et que je peux être comprise. ça m'a fait beaucoup de bien de l'écrire. merci à TOUS.
Ninie