Fêtes de fin d'année

Témoignage Publié le 17.12.2015

Fêtes de fin d'année

Bonjour,

Pendant plus de 20 ans, j'ai "oublié" ce qui s'était passé pendant mon enfance. Avant mes 7 ans, mon oncle paternel (que je nommerais M. C) venait souvent chez mes parents, mes grands-parents paternels, il nous "gardait" ma petite sœur et moi lorsque les autres membres de la famille allaient en courses ou même rencontrer des voisins. Ce M. C a commencé à me toucher, me faire mal entre les jambes... J'avais tout raconté à mes parents mais ceux-ci ne m'avait pas crue et ils me frappaient quotidiennement (ils buvaient). J'avais tenté de le raconter à mes grands-parents paternels, mais ils n'y croyaient pas non plus.

Pendant la période de Noël jusqu'au Jour de l'An, ma sœur et moi dormions chez nos grands-parents paternels, M. C également. Nous étions dans une grande maison à étage, la chambre de nos grands-parents, salon, cuisine au rez-de-chaussée et les autres chambres, salle d'eau, à l'étage.

Comme vous l'avez peut-être deviné, le reste de la "famille" dormaient à l'étage. M. C venait toutes les nuits dans notre lit (ma sœur et moi dormions dans un grand lit), cela commençait à la Noël jusqu'au soir du nouvel an. Je suis persuadée aujourd'hui que mes grands-parents savaient ce qui se passait mais qu'ils laissaient leur fils (M. C) faire ce qu'il voulait car c'était leur "chouchou".

Les années passèrent, M. C, était mon bourreau pendant 8 "nuits", mais un jour il commença à s'intéresser à ma petite sœur. Celle-ci raconta ce qu'il lui avait fait, à mes parents, ma mère me frappa en me disant (j'en fais encore des cauchemars) : "Tu aurais dû protéger ta sœur et tu aurais dû "lui" suffire. Entendre cela à 12 ans, cela marque, je me souviens avoir pris ensuite un dictionnaire pour comprendre ce que ma mère entendait par "lui suffire". Mes grands-parents paternels en furent informés et éloignèrent M. C de ma sœur et moi.

Mais arrivée la nuit de Noël, M. C était avec le reste de la famille, il restait dormir chez nos grands-parents paternels, il nous rejoignait la nuit dans notre lit et s'occupait de ma sœur et moi. Nous étions son cadeau de Noël, cela dura encore plusieurs années. Jusqu'à ce qu'il parte dans une autre région.

Ma sœur et moi en avions parlé à l'école mais nos parents s'arrangeaient pour faire croire aux enseignants que nous avions l'habitude de mentir sur des sujets graves. Je portais des traces de coup, parfois des bleus, un œil au beurre noir, mais j'étais morte de peur et je mentais aux enseignants en leur disant que j'étais maladroite, je m'étais cogné contre une porte...toutes les excuses était bonnes et mon père surtout, avait la main lourde, très lourde. Alors de là à raconter à mes enseignants que M. C venait dans notre lit chaque nuit pendant 8 jours pendant les fêtes de fin d'année...

Résultat : pendant près de 20 ans j'ai subi beaucoup de violences, de différentes sortes et venant de différentes personnes mais toutes de la même famille. Ensuite j'ai eu une période qui dura pendant 20 ans environ où je suis "tombée amnésique" de mes 20 première années (d'après un psy : choc post-traumatique). Mes parents des pervers narcissiques en profitèrent pour s'immiscer dans ma vie privée, me dénigrer, utiliser mon enfant contre moi...

Cette période m'a "sauvée" de la première période car si je m'étais souvenue de tout ce qui s'était passé pendant mon enfance, j'aurais certainement fait une tentative de suicide ou même pire, j'aurais pu devenir violente et alcoolique comme mes parents... Et pour finir cela fait 5 ans que je me suis "réveillée", j'ai recouvré la mémoire : j'ai déménagé, coupé les ponts totalement avec mes parents.

À la mort de notre père, nous avons beaucoup dialogué ma sœur et moi, elle m'a aidée à me souvenir. Je me suis aperçue que mes cauchemars étaient en fait un rappel de ce qui s'était réellement passé pendant mon enfance. C'est terrible et pas facile à vivre.

Je me sens mieux, libre, pas du tout confiante envers les hommes, je ne fais pas facilement confiance, j'ai besoin de faire du sport quotidiennement pour évacuer cette colère qui est en moi. Mais je déteste autant les fêtes, elles arrivent à grand pas, je ne fais rien voir à mon enfant mais je dors peu pendant cette période.

Ma sœur a fait une tentative de suicide l'an passé, elle se souvient de tout mais lorsqu'elle a connu son mari il y a plus de 25 ans, ils sont partis vivre à l'autre bout de la France. La distance nous avait séparées, plus d'adresse, ni de numéro de téléphone et je lui en veux de m'avoir laissée entre "les mains" de PN (nos parents), qui ont abusé de ma faiblesse pendant 20 ans.

Maintenant j'avance dans la vie en me disant qu'il y a un monde meilleur, qu'un jour la chance tournera et qu'elle me sourira, me protègera ainsi que mon enfant. Et j'ai hâte de changer de région, d'ailleurs c'est mon projet, tourner définitivement la page à ce passé, moche, très moche, horrible, de comprendre que des personnes ont traversés l'horreur de la guerre, ont eu des enfants et n'ont rien fait pour protéger leurs petites filles de leurs fils !!!

Me rendre compte que des enseignants ont fermé les yeux, détourné le regard, ont cru aux mensonges de mes parents et cela malgré les traces sur mon corps... Je me souviendrai ; je ne pourrai plus regarder les autres membres de ma famille de la même manière, je leur en veux également, le fait qu'ils n'aient rien fait, rien dit aux autorités compétentes à l'époque.

Continuez ce combat, sans blesser des personnes qui ne sont pas responsables, votre soutien, votre écoute est indispensable et merci pour votre aide, pour votre lecture.

Agatha

Nous en parlons
L
Louane
Publié le 16.01.2016
Inscrit il y a 9 ans / Nouveau / Membre

Bonjour Agatha,
Beaucoup d'émotions à la lecture de ton témoignage, des frissons, de la colère, les larmes qui montent... Chaque histoire est unique, mais je retrouve dans ton vécu très compliqué de nombreux points communs avec ma propre histoire, alors je te comprends et je compatis sincèrement. Et même sans te connaître, je veux te dire : sois fière de toi ! Sois fière de ton parcours, de ta force intérieure, de ta capacité à te différencier des personnes qui ont abusé de toi, et à ressentir qu'une autre réalité existe, très différente de celle dans laquelle tu as dû te construire. Les périodes de fin d'année sont aussi encore teintées de rêves d'angoisse pour moi, mais cela s'estompe avec le temps et la libération des émotions et des souvenirs douloureux par le biais d'une psychothérapie et de l'art-thérapie. Je te souhaite du courage dans les moments difficiles et beaucoup de bonheur et de chance dans la suite de ta quête de vie. Bonne continuation à toi !