Inceste et handicap

Témoignage Publié le 06.06.2020

Inceste et handicap

Bonjour à tous.

J'ai 47 ans passés et je ne suis sortie du silence qui m'écrasait que depuis l'année dernière.

Le frère de ma mère a eu un accident très grave durant l'année de ses 22 ans. C'était l'année de mes 8 ans. Cela a été un véritable choc pour moi, je dirais un premier traumatisme. Nous avons attendu longtemps avant d'être certains qu'il resterait en vie. Nous avons su par contre qu'il ne marcherait jamais plus. Il était atteint d'une tétraplégie partielle, il avait encore l'usage de ses bras et de ses mains malheureusement, même si ceux-ci étaient devenus maladroits.

Trois ans plus tard, il a quitté le Centre de rééducation où il était pour nous rejoindre. Mes parents avaient fait de lourds emprunts pour adapter la maison à son handicap. Il était mon parrain et j'avais énormément d'empathie pour lui et naturellement, j'allais le voir pour essayer de lui rendre la vie plus facile. Très vite, il en a profité pour m'embarquer dans des jeux déplacés qui me rendaient mal à l'aise. Il a commencé par me mettre deux ou trois fois toute nue, puis il m'a tenu des propos manipulateurs et de fil en aiguille, il a fini par me violer. Longtemps, j'ai cru que ce n'était pas le cas car il avait il avait utilisé ses doigts.

Un jour avec ma cousine qui avait aussi été agressée par lui, nous avons raconté à ma mère ce qu'il nous faisait. Nous avons eu le tort de minimiser les faits car après être intervenue auprès de son frère, ma mère m'a demandé de me taire et il en a été de même pour ma cousine. Si mon père avait été mis au courant, il aurait mis mon oncle à la porte.

Ainsi, il a fallu que je supporte sa présence sans rien dire, sans intervenir durant plusieurs années. J'ai développé des troubles du sommeil, des troubles divers (anxiété, eczéma, manque de confiance, etc...). Ces troubles vous faisant différents, il a aussi fallu supporter les jugements des autres et en premier lieu ceux de ma famille qui considérait que j'étais gentille, mais pas très intelligente. Il m'a donc fallu redoubler d'efforts pour suivre des études et devenir professeur des écoles. Même passer mon permis de conduire a été une horreur car j'avais sans cesse les images de son corps détruit dans ma tête. Et puis surtout, ma vie affective a été compliquée. Trouver un équilibre a été très difficile et cela le reste encore aujourd'hui.

Quand j'entends aujourd'hui dire que les handicapés sont les premières victimes d'agressions sexuelles, je suis d'accord. Je peux l'entendre. Il n'empêche c'est un handicapé qui m'a fait le plus de mal dans ma vie. Dès que je vois des places réservées pour eux, je pense à lui et je me dis qu'il ne le mérite pas. Son handicap se voit et pour cette raison on s'est occupé de lui. Moi, on m'a toujours laissée seule avec tout mon mal être, sans soutien. Je dirais même que l'on me reprochait ce mal être car on n'en comprenait pas l'origine. Je suis désolée pour les personnes souffrant de handicap, mais je ne veux plus avoir d'empathie pour elles car c'est ce qui m'a détruite.