Madame

Témoignage Publié le 14.07.2013

Fotolia_1028170_XSBonjour, Etant à la recherche de témoignages, je suis tombée directement sur cette page « inceste oublié » de ce site où j'ai lu avec avidité tous les messages dans l'espoir de trouver des personnes qui vivraient la même chose que moi. Mais..., je n'ai pas trouvé, ou alors il manque les détails me permettant de savoir si certains d'entre vous traversent ou ont traversé une phase similaire à la mienne et éprouvent les mêmes émotions, les mêmes doutes..., c'est pourquoi je lance une bouteille à la mer avec l'espoir que l'un d'entre vous (ou plusieurs) se reconnaisse dans mes descriptions. J'ai besoin de me rassurer, de vérifier que ce que je vis est possible, que je ne deviens pas mythomane ou folle.

Voici en bref un petit historique, afin de mieux saisir le contexte dans lequel intervient ma demande de réponses. Jusqu'à l'âge de 40 ans, j'ai vécu une vie qui me semblait normale : vie en couple, deux enfants et famille parentale soudée. Les seuls indices qui auraient pu m’interpeller étaient un besoin viscéral de me sentir aimée, ce que j'obtenais grâce à une perception aiguë des attentes de l'autre que je satisfaisais en les anticipant, ainsi qu'une incapacité à adapter mon comportement aux situations émotionnelles, ce que je réglais par des lectures appropriées qui me permettaient de combler ces difficultés. Mais comme je ne connaissais que ce comportement, tout cela ne m'a jamais interpellé. Puis, voilà 13 ans, mon frère s'est suicidé et moi, une femme forte maîtrisant chaque situation de sa vie, j'ai sombré un an plus tard dans une dépression sans fond, sans comprendre ni ce qui m'arrivait, ni ce qui pouvait causer une telle réaction. Percevant intuitivement que ma vie était en jeu, j'ai rencontré quelques psychologues pour tomber enfin sur une personne compétente et depuis dix ans je suis en analyse. J'ai passé plus de six ans à détricoter le lien toxique à ma mère pour parvenir à m'extraire de cette relation d'emprise qu'elle avait savamment tissée dans la douceur et la gentillesse en me félicitant chaque fois que je répondais à son désir et en me disant que je lui faisais de la peine chaque fois que je tentais d'exprimer un désir personnel ou une opposition. Au terme de ce travail analytique, j'ai eu l'impression de sortir d'une secte et j'ai cru que j'allais pouvoir achever mon analyse... et bien non !!! car sont alors apparus des rêves étranges en lien avec la sexualité qui provoquaient un sentiment de terreur sans nom. La psychanalyste, après une période durant laquelle elle a exprimé des hésitations sur l'origine réelle ou fantasmatique du contenu de ces rêves, m'a ensuite clairement orientée vers une traduction d’événements réels, à cause des détails réalistes qu'ils contenaient et de la récurrence de ce thème. J'aurais donc été abusée par mon oncle avec le soutien tacite de mes parents (ce qui se confirme par le fait que je leur ai expliqué depuis ce qui s'était passé, en prenant sur moi de l'affirmer pour voir leur réaction, je n'ai pas été déçue : mon père m'a certifié que des adultes qui s'intéressent sexuellement à des enfants, ça n'existe pas et certainement pas son frère !).

Je dois dire que tous ces rêves me paraissent étranges, dans le sens étrangers à moi, j'analyse leur contenu comme si je parlais de quelqu'un d'autre, sans aucune émotion : ni tristesse, ni colère, rien, juste des réactions physiques qui se rapportent à la peur. Je sens bien qu'il peut s'agir d'une stratégie de défense pour tenter de maintenir dans l'oubli des événements terrorisants, mais du coup je ne parviens pas y croire vraiment. J'ai donc pensé faire appel à vous en me disant que si certains avaient vécu des choses similaires cela m'aiderait peut-être à accepter. Voici donc la manière dont ces rêves se présentent : il s'agit d'une image, comme une photographie, dans laquelle je vois systématiquement une petite fille, que je reconnais comme étant moi grâce à la couleur et la longueur de ses cheveux, je vois très nettement les lieux, forme du lit ou de la table de salle à manger, ce qui me permet de savoir dans quelle maison la scène se situe, je vois également la place et la posture de chaque personne, ainsi par la taille et la forme des corps, je peux identifier de qui il s'agit, mais je ne vois ni leur visage ni ce qui se passe. Ce qui se passe, je suis obligée de le deviner par la posture des personnes et l'angoisse incommensurable que cela génère chez moi provoquant dans la journée suivante un état de dissociation avec un vide au niveau du cerveau (ou un cerveau constitué de brouillard) et un corps qui fonctionnerait tout seul, machinalement. Je sais par ailleurs différentes choses (qui ont resurgi dans mes rêves) : qu'enfant j'ai saigné en urinant, j'ai cru alors que j'allais mourir comme les poules que tuaient ma grand-mère, je sais que j'ai voulu mourir en me noyant, que j'ai souvent vomi comme si quelque chose ne pouvait pas passer, que j'ai fait de l'anorexie et l'ai reproduit au cours de mon analyse... Je ne détaille pas les symptômes qui sont toujours actifs à l'heure actuelle, car mon exposé est suffisamment long, mais ils tournent pour la plupart autour de la protection de mon corps contre l'Autre, mais aussi contre toute chose qui peut pénétrer à l'intérieur, exerçant sur ce corps un contrôle permanent.

Voici donc mes questions :

  • y a-t-il quelqu'un qui ait pu vivre « normalement » durant de nombreuses années, pour voir resurgir des pensées scabreuses comme les miennes ?

  • y a-t-il quelqu'un qui fasse ce même type de rêve ?

  • éprouvez-vous les mêmes difficultés à considérer comme vrai les contenus de vos rêves, car j'ai eu l'impression en vous lisant que vous aviez déjà des doutes avant de parvenir à expliquer votre mal-être, alors que moi je ne ressentais rien de particulier ?

  • Si vous répondez « oui » à l'une ou l'autre de mes questions et que vous avez de l'avance sur moi, comment avez-vous fait pour lâcher prise sur les stratégies de défense et laisser resurgir les souvenirs des événements ?

D'avance je vous remercie pour votre aide et vous souhaite des jours meilleurs...