Mal de vivre

Témoignage Publié le 14.01.2007
Je me fais violence à travers cette démarche qui je l'espère m’aidera à sortir de l’impasse dans laquelle je me trouve depuis de nombreuses années et dans laquelle je suis entrain de me perdre.
Entre 11 et 13 ans j’ai subi des attouchements répétés de la part de mon frère de deux mon aîné. Dans ce même temps, j’ai également été victime de viol à deux reprises de la part d’un cousin ayant trois ans de plus que moi. J’ai fini par avoir le courage de dire non à mon frère et à mon cousin, tout s’est arrêté. J’ai décidé de me dire que tout ceci ne devait pas être grave, que ça n’avait aucune conséquence, que ça devait bien arriver à d’autres enfants. J’ai décidé d’oublier, de ne jamais en parler. Aujourd’hui, j’ai 27 ans. Je n’ai jamais abordé ces événements avec mon frère ou mon cousin, ni avec qui que soit d’ailleurs. Le temps avait fait son travail me semble-t-il puisque, progressivement, sans que je m’en aperçoive, je n’y pensais plus réellement.
Seulement, suite à des problèmes relationnels important avec un ami très proche, j’ai commencé à avoir de profondes crises d’angoisse il y a 7 mois… peur panique de la solitude, de l’abandon, impression de vide en moi et autour de moi. J’ai déjà eu régulièrement de telles crises depuis mes 14 ans, mais elles n’ont jamais duré aussi longtemps, et jamais de façon aussi intense. Cette fois ci, l’angoisse est telle que la mort est omniprésente dans mes pensées, et même si je sais que je ne pourrai jamais arriver à cet extrême qu’est le suicide, je me fais peur, ignorant jusqu’à quand je pourrai me dire que ça ira mieux demain. Il y a deux mois environ, cherchant une fois de plus à comprendre l’origine de ce mal être ancré en moi, ne supportant plus l’isolement dans lequel je m’enferme et qui me pousse à refuser involontairement l’aide de mes amis, tout m’est revenu en pleine tête une nuit. Je me suis sentie tellement oppressée par ses souvenirs lointains d’attouchements et de viols que j’ai du appeler un ami au secours le lendemain. Mais les mots ne sont pas sortis, juste une crise de larmes. C’est lui qui a trouvé les mots à ma place et qui a deviné. J’ai pensé que j’irai mieux en ayant céder à ce besoin irrépressible et brutal de lui faire connaître ce qui m’était arrivé après 15 ans de silence, que là était une des clés de mon mal de vivre ; réussir à parler. Malheureusement, rien n’a changé, c’est peut être même pire. J’attendais inconsciemment que cet ami me donne des solutions, m’aide à m’en sortir, à comprendre si le fait d’avoir subi ces choses pouvait expliquer mes angoisses. Je voulais qu’il me protège de mes pensées noires. Mais je n’ai pas le droit me semble-t-il d’imposer ceci à qui que ce soit, et je suis d’ailleurs persuadée que quelque soit la volonté d’une personne souhaitant apporter son aide, la détresse n’appartient qu’à celui qui la subit. Ce qui veut dire qu’on est toujours seul face à ses difficultés. Alors voilà, je me sens mise à nu, j’ai perdu les protections que je m’étais fabriqué, j’ai peur d’être jugé et je me renferme encore plus sur moi même, rejetant le soutien de mes amis bien malgré moi.
J’aimerais savoir vers qui me tourner pour savoir d’où vient ce mal de vivre qui ne me lâche pas depuis bientôt 15 ans, si les attouchements et les viols, ainsi que le silence qui entourent toujours ces événements peuvent apporter une explication. J’ai peur de m’enfoncer un peu plus chaque jour dans mes angoisses, de ne plus en sortir. Je voudrais arrêter de n’être penchée que sur moi même, me libérer de toutes ces questions et avancer dans la vie, enfin.