Témoignage femme: la mater dolorosa

Témoignage Publié le 21.03.2006
Bonjour à tous mes frères et soeurs de souffrance,

Tous les témoignages que j'ai lus sont pour moi plus poignants les uns que les autres.

Je ne serai hélas pas originale en dévoilant que moi aussi j'ai été victime d'inceste du fait de mon père de l'âge de 4 ans environ ( je ne me souviens pas exactement de la date à laquelle cela a commencé ) jusqu'à 16 ans. Ce monstre qui est mon géniteur a hélas fait beaucoup de victimes puisque mes soeurs ont également subit ses agressions, et je le soupçonne de ne pas avoir arrêté là ses crimes... Mais si ces viols répétés ont eu lieu, c'est avant tout parce qu'aucun adulte, qui les connaissait ou les suspectait, n'est intervenu pour les empêcher.
A titre d'exemple, je ne citerai que ce simple fait : j'ai été hospitalisée à l'âge de 6 ans pour hémorragie vaginale. Les causes de cette hémorragie n'ont pas été recherchées plus avant : les medecins se sont contentés de supposer que la présence d'une petite excroissance ( à l'extérieur du vagin ! ) expliquait cette perte de sang. Toutefois, il est précisé (dans mon dossier dont j'ai demandé une copie) que les saignements se situaient au niveau de l'urètre ( donc assez profondément) et ont necéssité une cautérisation.
Mais ces incohérances n'ont pas poussé le personnel soigant à faire ce qu'ils auraient dû faire dans un tel cas : un signalement à la brigade des mineurs et auprès des services sociaux.
Ils ont préféré croire ma mère sur parole : faisant partie elle même du personnel en tant qu'aide soigante et présentant bien, il était certainement plus commode de se fier à elle.

Aujourd'hui, mon abuseur est décédé et ma mère, qui ne veut pas répondre seule de ces crimes, dit n'avoir jamais été au courant de ces abus!
Elle a choisi le déni, même devant les évidences.
Pour sauver sa peau, non seulement elle se dit victime elle même de son époux ( alors que c'était elle qui portait la culotte ) mais elle nous accuse de filles indignes manipulées par les psy puisque nous osons l'accuser, elle qui s'est sacrifiée pour nous, qui souffre du dos pour avoir travaillé en milieu hospitalier pour nous élever, elle la mère courage, la mater dolorosa.

J'ai longtemps gardé espoir qu'elle reconnaîtrait sa responsabilité, qu'elle nous demanderait pardon pour n'avoir rien fait pour nous proteger.
Aujourd'hui, je sais qu'elle ne le fera jamais.Que jusqu'au bout elle niera, sans se soucier de notre souffrance.
Devant cette attitude, je ne peux que choisir l'éloigenement. Une mère qui aime ses enfants les protège envers et contre tout, même la peur au ventre devant la violence de l'agresseur ( ce qui n'était pas le cas de son mari) . Mais j'ai compris et ce depuis toute petite qu'elle éatit incapable d'aimer, que ses enfants lui servent de faire valoir qu'elle n'hésitera jamais à sacrifier dans son propre interet. La seule chose qui lui importait c'était sa situation de femme mariée et mère de famille. Les apparences : un mari, des enfants polis et bien mis et avec de bons résultats scolaires. Rien de plus ne comptait. les abus ne se voyaient pas à l'oeil nu et étaient la seule chose qui retenait son époux à la maison, alors...

Je suis à 100% d'accord avec Einstein : Le monde est dangereux, non pas tant à cause de ceux qui font le mal, qu'à cause de ceux qui regardent et qui laissent faire...

Il y aura toujours des pervers, des pères abuseurs, mais tant qu'il y aura des personnes qui choisiront de se taire alors qu'elles pourraient les dénoncer, ces abuseurs ne seront pas dissuadés d'agir par peur des conséquences judiciaires de leurs actes.

Bon courage à tous et à toutes.
Pensez à vous avant tout, à votre reconstruction.Vous êtes, nous sommes les victimes, et non les mères, les tantes, les pères...qui se sont tus et qui aujourd'hui vous disent qu'ils souffrent des abus que vous avez subis. Ils étaient des adultes, nous des enfants : ils avaient le devoir d'agir.