Une orgie familiale

Témoignage Publié le 31.03.2021
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Je fais partie d’une lignée de victimes d’inces-TUEURS.

La plus ancienne victime dont j’ai connaissance était une cousine de ma mère, inces-TUÉE par le grand-père maternel. Ma mère, à ses dires, n’a jamais été la proie effective de ce grand-père, mais, dans cette famille, il était admis et de coutume que tous les enfants sont des proies potentielles. Le décor est posé.

À chacun donc de réussir à se cacher, se protéger derrière les tentures et la « chance » pour échapper aux inces-TUEURS. On ne sait pas sur qui la battue va s’abattre, si le chasseur achèvera sa cible ou la laissera s’échapper mutilée, estropiée ou simplement apeurée et sans souffle, cachée derrière le fourré. Ma mère a dû avoir le souffle court si souvent qu’elle a plusieurs fois voulu cesser de respirer. Cesser de respirer le même air putride aux relents incestueux que celui d’un père alcoolique lui demandant de partager son lit de femme mariée et mère. Cesser de respirer le même air pourri que celui de ses frères inces-TUEURS. Cesser de respirer le même air toxique que celui de sa mère complice maltraitante. Macabre décor, Sombre histoire, Infâmes secrets.

Mon enfance a grandi dans ce macabre décor, cette sombre histoire, ces infâmes secrets, de l’arrière-grand-père pédophile, du grand-père malaisant, de l’oncle inces-TUEUR de ses frères et de sa plus jeune sœur. Ma mère, sœur aînée de cette fratrie de 7, « échappe » à la battue des frères. Mais la traque continue et l’unique fils aîné de ma mère sera la tendre cible d’un l’oncle maternel. Puis, un jour, ce fut moi la proie. La proie de l’adolescent de frère sous les couvertures. La saleté de proie qui suffoque sous les couvertures. Je ne sais plus comment, quand, ça a commencé ni comment, quand, ça a fini. Aux alentours de mes 8 ans peut-être, par là, sous la chaleur des couvertures. Mon sexe dans sa bouche et le sien dans la mienne, ses mains, ses doigts certainement, des tentatives d’effraction dans un petit corps trop fermé !!! Les couvertures de son lit, du mien, du lit chez la grand-mère maquerelle, ... La petite fille putain décharnée et sans seins. Le copain qui joue avec les manettes de l’ordinateur tandis que le frère joue avec les manettes de l’intimité de sa sœur et aspire son âme. Indicible sale honte. Sous l’absence et le déni du père qui ouvre la porte sur un amas de couverture. La honte encore et toujours, la terreur aussi et l’espoir enfin d’un sauvetage puis : « À table ! » Et la porte se referme. Sous l’aveuglement de la mère déprimée, engluée dans sa propre saleté, malgré l’alerte de sa mère maquerelle qui savait bien elle, de quoi tout ça parlait !

Trop de vacances passées chez les grands-parents maternels complices et meurtrissants. Ce grand-père immense dont le regard et les mains sur mes joues m’effrayaient et me dégoûtaient à mesure que je grandissais (mais, je crois qu’il les préférait à partir de l’adolescence, comme son propre père). Des vacances irréelles chez l’un des oncles inces-TUEUR à le voir passer nu au fond de l’appartement comme un monstre effrayant filant au coin de l’œil et puis sa jeune et jolie belle-fille qui avait l’air si triste. L’oncle paternel, vieux garçon alcoolique dégueulasse qui vous regarde avec ses yeux pervers et vous invite à faire de la balançoire en vous faisant assoir sur ses genoux en érection, tout en rêvant certainement de vous abimer dans son antre au sous-sol de la maison du grand-père. J’ai passé quelque années avec dégoût et peur. Dégoût de moi-même, peur des hommes, peur de la vie, insécure. Peur, mais il fallait y aller, pour ne pas mourir de peur. Puis très vite, je décidais de faire mien le désir des hommes, croyant ainsi à un semblant de maîtrise. Mais quelle méprise ! J’étais enfant souillée, sale, honteuse, coupable et nue sous le cauchemar de ma petite jupe ! Puis adolescente d’à peine 14 ans, trop tôt tachée de sang et de dégoût !

La vie ne dissout rien et le temps non plus. Ce qui aurait dû avoir lieu n’adviendra jamais. Il est trop tard. Trop tard pour s’asseoir autour de la table, mes parents, mon frère et moi pour mettre à plat tout ça en pleurant. Trop tard pour le pardon. Trop tard pour l’empathie bienveillante. Trop tard pour le soutien. Trop tard pour la reconnaissance. Le secret a demeuré. Mon père savait, mais ne m’en a jamais rien dit sauf à la veille de sa mort où il m’a partagé sa pensée à ce sujet estimant que « celui qui avait certainement le plus souffert dans tout ça c’était mon frère » ; ma mère avec qui j’en ai parlé à plusieurs reprises, mais qui je ne suis pas sure, mesure vraiment les conséquences que tout cela a pour moi ; et mon frère à qui j’ai parlé, seule, pré-adolescente courageuse et qui m’a dit ne pas s’être rendu compte du mal que cela m’avait fait. Bref, une famille classiquement dans le déni comme souvent dans ce genre d’histoires sordides. Même si j’ai eu des excuses, je n’ai pas eu de demandes de pardon ni de réelle reconnaissance d’être victime. Aujourd’hui il y a « prescription » et de toute façon, le déni de la famille accompagné de celui de la société n’encourage pas à demander justice, et ce même si j’ai eu connaissance que certains de ces oncles avaient continué leur traque et que peut-être ils continuent encore aujourd’hui ... je ne sais pas. Bref, le sens du sacrifice finit par avoir ses limites quand tout se passe presque comme s’il ne s’était rien passé (je pense notamment à ma tante qui accepte d’avoir encore des contacts avec ses agresseurs et dit avoir pardonné). Le déni, protecteur assassin, souvent nous rend fou. Alors de mon côté, je choisis l’indignation, la rupture et la réparation. L’éloignement pour se rapprocher de soi-même. Lorsqu’on est face à un lion qui veut nous dévorer, on ne lutte pas avec lui, on s’enfuit ! L’éloignement, la fuite, la rupture puis le salut ! Qu’il en soit ainsi, parfois, c’est la meilleure des solutions pour entrevoir la réparation.