Arguments pour le 4 décembre :
Voici mon histoire dans laquelle j'espère que vous pourrez puiser des arguments.
J'avais 11 ans et mon oncle paternel a commis des attouchements sur moi.
En résumant :
Pendant presque 20 ans je n'ai rien dit à mes parents et je ne l'ai pas dénoncé à la justice. Aujourd'hui, il est trop tard pour avoir un procès au tribunal pénal.
Pendant toutes ces années et même encore maintenant parfois, j'étais dans une détresse indicible. Je me débattais avec l'envie obsédante de mourir pour ne plus souffrir. Ma vie étais peuplée de compagnons que j'aurai du éviter.
Mes études étaient pour moi devenu mon moyen d'exister. Mais même cette confiance là, après avoir eu un ami très manipulateur et menaçant, après être allée un mois en hôpital psychiatrique, même ça, j'ai fini par la perdre. Ce que j'essaie d'expliquer, c'est que ma vie était si dure. Qu'il ne me restait plus assez d'énergie et de courage pour porter plainte, je souffrais d'une manière intolérable. Et j'étais dans une sorte de prison qui m'interdisait de dire aux personnes qui auraient pu m'aider l'ampleur de ma souffrance.
Toutes les personnes à qui je me suis adressée pendant des années (religieuses, parrain, père etc...) m'ont dit que je devais oublier , qu'il était trop tard, que je serai seule si je voulais aller en justice etc...
Etre seule c'est vraiment dure pour moi. Et puis, il faut être solide pour aller contre une famille qui fonctionne avec un système de patriarcat très fort.
J'ai toujours eu à l'esprit de dénoncer mon oncle, sans trouver le courage et surtout la force de le faire. Je me suis donc débrouillée pour obtenir une lettre dans laquelle mon oncle reconnaisse les faits. Un jour, un petit ami à qui j'en parlais m'a dit : "puisque tu ne te sers pas de cette lettre : brûle là". A ce moment là, j'ai su que j'allais trouver le courage de dénoncer mon oncle. Cependant, la date n'était pas fixée. Puis une autre personne m'a fait comprendre que si je ne faisais rien, j'allais encore souffrir autant jusqu'à ma mort. Et j'ai compris que je ne pouvais endurer autant d'années cette souffrance. A ce moment là, je me suis décidée. Je suis allée voir une association d'aide aux victimes. J'ai préparé ma lettre au procureur et j'ai attendu que la famille soit réunie à l'occasion de Noël 2002 pour demander les témoignages qu'on m'avait conseillé d'obtenir. Chaque membre de ma famille m'a rejetée à sa façon.
Dans un tout premier temps, je n'ai pas parlé par peur du qu'en dira t'on, puis de "ce qui arriverait si je parlais" ces 6 derniers mots étaient un extraordinaire verrou pour moi. J'avais peur des réactions de mon père, puis de la "puissance" de mon oncle. Je ne savais pas si on me croirait. Je ne savais pas si on ne rejetterait pas la faute sur moi etc...
Je pense que si j'ai commencé à parler, c'est seulement parce que j'ai craqué, alors que j'étais en hôpital psychiatrique, 15 ans après les faits. Je crois que si je n'ai rien dit c'est parce qu'il fallait assumer les conséquences de ma parole : le rejet, le déni éventuel, la solitude, la méchanceté de ceux qui m'étaient le plus chers. Ces conséquences là, je n'étais pas assez fortes pour les assumer, et je le savais. Cependant petit à petit, j'ai compris que ma famille n'était pas si bien que ça et même loin de là et que cela se jouait en termes de mort et de vie. Je n'arrivais pas à mourir, il me fallait donc vivre et donc changer ma vie. J'ai énormément souffert : les médicaments enlevaient un peu de la souffrance morale mais le désespoir grandissait. Curieusement n'étant pas morte, j'ai ouvert les yeux sur mon entourage, j'essaie de sortir de la vie de victime à perpétuité. J'essaie même de changer ce qui ne va pas dans ma vie. L'espoir est là et je me sens plus forte que je ne l'aurais jamais cru.
Voilà, c'est mon parcours. Si vous trouvez de l'intérêt à mon témoignage, faites moi le savoir et je suis toute prête à témoigner. Je dois ajouter que ma vie étais une telle plaie (peuplées de violences diverses et variées que parfois je m'infligeais moi même)que j'étais déjà bien occupée à survivre. Comment dans ces conditions, trouver la force de se créer des luttes supplémentaires ?
Comme je l'ai déjà dit, j'ai toujours eu envie de dénoncer mon oncle. Je savais qu'il était professeur, et peut être même directeur de colonie, je me sentais responsable du moindre enfant qu'il aurait pu abîmer après moi, responsable parce que je n'avais rien fait, je ne l'avais pas dénoncé à la justice. Mais ce qui m'a fait taire était encore plus puissant. J'ai lu sur un site, et j'adhère à cette théorie, que le climat des familles dans lesquelles se déroule un inceste est particulier. Chacun savait, plus ou moins consciemment ce qui se passait, et chacun protégeait ce secret (en ce qui me concerne, ma mère lisait régulièrement mes journaux intimes mais jamais, elle ne m'a aidée, bien au contraire).
Selon moi, l'enfant victimes d'inceste a intériorisé les lois familiales, fussent t-elles implicites, notamment, la loi du silence.
Je n'en avais pas du tout conscience mais pendant des années, je me suis tue sur les violences que je subissais. J'ai été violée, menacée, harcelée dans ma vie privée comme à l’école ou dans mon travail. Je me suis tue pendant très longtemps et en général si j'en parlais, c'était toujours après coup souvent quand je craquais. Sur le moment, j’avais conscience de vivre quelque chose de mauvais, mais je ne mettais pas de mots sur ce que je vivais, je n’y pensais pas, comme si cela n’existait pas. Il m’est arrivé de me faire agresser physiquement. J’ai parfaitement vu mon agresseur. Mais il m’a été impossible de l’identifier, le jour même, au poste de police. Des témoins disaient qu’il m’avait agressée. Il m’était impossible de le reconnaître. Il n’y a pas plus d’une semaine, j’ai eu un problème avec ma responsable (il semblerait qu’à nouveau je subisse un harcèlement moral depuis que j’ai dit que je ne souhaitais pas demander ma mutation). Cela m’a mis dans un état épouvantable. Pourtant, il m’est très difficile de raconter ce qui s’est passé sans faire preuve de confusion. Je sais que ma responsable n’avait aucun droit de me parler comme elle l’a fait. Je sais que ce n’était pas normal. Me rappeler des faits est extrêmement difficile et mettre des mots sur ce qui n’était pas normal et violent m’est impossible. Comment peut on se défendre efficacement dans de telles conditions ! Quelque part, dans les problèmes que j’ai et j’ai eu avec mes supérieurs, mon comportement est resté le même (celui d’une petite fille), sauf circonstances exceptionnelles, : j’ai toujours peur de n’être pas crue, et de subir encore plus de brimades qu’avant, parce que je me serais plainte.
Je pense que dans mon cas, et j’imagine que je ne suis pas la seule, l’inceste que j’ai vécu à totalement modifié mon caractère. Depuis lors, il semble que dans certaines situations (le manque de respect, la violence …), j’agisse comme une petite fille. Non seulement, je ne sais souvent pas dire ce qui m’a fait violence, mais je la subis sans arriver à me défendre. J’ai peur qu’on ne me croit pas. J’ai peur que la situation devienne pire si je réagis. Et j’avais une grande répugnance à m’adresser à la Justice.
Je parle de moi, j’essaie de trouver ce qui m’a empêchée de dénoncer mon oncle et ainsi de le laisser jouir de la prescription. J’essaie de trouver des arguments qui montre qu’adulte, que longtemps après les faits, les victimes se taisent. C’est difficile et j’ai du à la fois faire des digressions et ne pas assez aller au fond des choses. Pour l’heure, je vais vous envoyer ce témoignage car le temps presse (4 décembre). Je reste à votre entière disposition pour tous renseignements.
Mon oncle est un manipulateur, il m’a agressée, il a bouleversé ma vie et j’ai beaucoup souffert. Il n’ira probablement jamais en prison pour ça, parce qu’il a tellement bien fait son « travail » de destruction que j’ai été dans l’impossibilité de porter plainte plus tôt. C’est injuste. En tant que victime, j’en conclue que dans ce domaine là, plus on brise les personnes, mieux on les réduit au silence, et mieux on s’en tire ! Je ne comprends pas : on m’a dit qu’en matière de délit d’initié ou bien d’abus de bien sociaux (à vérifier), il n’y avait pas de prescription. Ce ne sont que des problèmes d’argent. Avec la pédophilie, on parle de souffrance d’une force indicible, des vie brisées, de suicide, de prostitution etc… des victimes. Cette souffrance n’a pas de prix. Au nom de quoi l’argent aurait il plus de poids que les personnes ? ! ! !! La société doit se protéger de ses destructeurs d’avenir (pédophiles) puisque les enfants sont l‘avenir de toutes sociétés. Elle doit les condamner. Et si la nature même du crime fait que les victimes sont bâillonnées des dizaines d’années durant, il faut que les victimes puissent porter plainte quand elles en ont la force et ainsi obtenir une condamnation au pénal comme au civil.
J’ajouterais que si la société ne peux pas protéger ses enfants, il me semble qu’elle a le devoir de leur rendre justice.
Comment peut-on exiger des victimes (comme de chaque éléments de la société) qu’elles respectent ensuite la loi, si la justice ne leur rend pas justice ? C’est une machine à produire de mauvais citoyens, de l’amertume, du mal être, de la violence et… qui se ressent partout : rapport familiaux, professionnels etc… Rendre justice et la rendre bien, n’est pas un accessoire : c’est essentiel pour chacun. Évidemment, l’encombrement des tribunaux est connu. Mais je me pose la question de savoir si une meilleure justice quand un préjudice est commis n’enlèverait pas justement du travail aux tribunaux. En effet, j’en ai fait l’expérience plusieurs fois lorsqu’une injustice est commise et qu’il n’y a pas réparation les choses s’enveniment et on aboutit en fin de compte à un problème plus grave.
On dit qu’aller en justice est salvateur pour les victimes, que le suicide est un fléau, mais combien de personnes devront se suicider dans le silence pour qu’enfin les coupables puissent être punis même tard ?
J'ai 32ans.