Si je ressens le besoin de vous raconter un morceau de ma vie, ce soir, c'est que j'ai eu envie de mettre fin à ma vie, tout simplement.
J'aimerai savoir si je bascule dans la folie. J'en appelle à vous pour m'aider à y voir plus clair. Suis-je la fille indigne d'une mère indigne?
Il y a quelques temps, ma mère apprenait que j'avais été la victime de mon père entre l'âge de 6 ans et de 9 ans. Divorcée, elle devait nous laisser partir chez lui un week-end sur deux. Elle l'ignorait jusqu'alors. Elle s'est montrée outrée, très en colère.
Mais ce qu'elle n'ignorait pas, ce que ma petite soeur et moi ne lui avons jamais caché, elle veut l'occulter à tout prix: son second mari a tenté lui aussi d'abuser de nous.
Fortes de la douleur ressentier trois ans auparavant avec mon paternel, ma soeur et moi avons géré la situation, sans l'aide de notre mère.
Celle-ci remettait sans cesse nos paroles en question, excusant le comportement de son cher et tendre et affirmant qu'il ne voulait nous donner que quelques signes de tendresse... tu parles!
Il y a deux ans, il l'a quittée pour une autre femme. Pour ma part, je n'avais pour ainsi dire aucun contact avec lui. J'étais quelque part soulagée que ma mère échappe enfin à son emprise.
C'est alors que ma mère s'est retrouvée dans une dépression telle que je l'ai accueillie chez moi.
Elle présentait énormément de problème de santé et, mes trois petits bouts sous le bras, j'ai arpenté les couloirs d'hopitaux pendant près d'un an pour veiller sur ma mère.
Finalement, son médecin a découvert l'origine du mal: un munchausen!
Elle prenait des diurétiques pour simuler un problème rénal.
Le docteur m'avait mise en garde sur les côtés manipulateurs de la personnalité de ma mère, mais j'ai continué à veiller sur elle.
Il y a huit semaines, une dispute a éclaté entre nous. A propos de son pervers de mari, bien sûr, qui téléphonait plusieurs fois par jour et qu'elle revoyait, très enthousiaste.
Je lui ai rappelé qu'après avoir coupé tout contact avec mon géniteur, je ne souhaitais plus aucune trace de celui qui m'avait salie une seconde fois dans ma vie... elle a claqué la porte.
Elle s'est trouvée une petite maison dans une ville voisine et mon mari et moi avons retapé la bicoque, soir après soir, pour qu'elle puisse y être heureuse.
Mais voilà que tout à l'heure, alors qu'il était convenu qu'elle garde mon petit dernier cette nuit, je tombe nez à nez avec mon deuxième bourreau, tranquillement en train de faire la cuisine.
Je suis partie immédiatement, et elle n'a rien tenté pour me retenir. Elle savait parfaitement que cette situation me serait insupportable, pourtant, quand je l'ai contactée en cours de route, elle ne m'a absolument rien dit sur la présence de ce monstre.
Je me suis sentie abusée, aux deux sens du terme. Sale, dégueulasse, poisseuse, minable, voilà l'image que j'ai de moi ce soir.
Je n'ai pas le choix. Mes enfants méritent la meilleure des mamans! Aussi, j'ai décidé ce soir de rayer ma mère de ma vie, pour pouvoir remplir mon rôle en toute sérénité.
J'en ai assez bavé comme ça, et je ne suis plus le jouet, la petite conne victime des adultes censés la protéger.
Je suis sortie de chez elle, j'ai eu envie d'acheter un bidon d'essence et de m'en asperger avant de gratter une allumette. Et puis, j'ai regardé dans le retroviseur, et j'ai vu le visage merveilleux de mes petits loups.
Merde! J'y ai droit au bonheur moi aussi.