Encore une fois, témoigner. Encore une fois, témoigner devant des centaines, des milliers, des billions d’autres victimes. Un théâtre hagard et secret, un théâtre en rouge et noir, un théâtre où enfin, j’ai la parole, une parole reconnue, respectée, entendue, acceptée, comprise. C’est peut-être cela le plus important. Comprise. Cela ne vous ai t-il jamais arrivée de parler à une psychothérapeute, et soudain, ressentir que « bon dieu, elle vous comprend » comme si elle avait vécu elle-même ce truc là, « elle ressent dans ses tripes ce que vous avez vécue », « elle peut comprendre toutes les pensées qui vous traversent, tous les sentiments, les douleurs, physiques, psychiques, les tentations, elle peut tout comprendre ».
Alors ici, ce grand théâtre sur la toile, c’est un peut ça ; c’est un peu mendier un « je vous comprends », un « je te comprends », ou encore « je suis passée par là » ou encore « j’ai dépassé cela », ou encore « dans deux ans, ça ira mieux », ou encore « c’est le début de la résilience », ou encore « ton témoignage m’a fait pleuré et ca m’a fait du bien ».
Alors, par où commencer ? Je suis tellement émue que j’en ai retrouvé mon français. Par où commencer ? Comment décrire et dépeindre ce tableau noir et tragique, ce tableau « tragi-comique », tellement absurde qu’il est presque impossible d’y croire ? Comment ? Il y a peut être aussi la peur, la peur de mettre des mots, sur une douleur sourde immonde, peut être oui, c’est « la peur de parler ». Alors pourquoi ne pas tourner au tour du pot ? Il n y’ a rien de plus agréable en fait… Pourquoi ne pas plutôt parler de résilience, ce mot majestueux et extra – ordinaire, ce mot fort et vigoureux, capable de venir vous chercher dans votre souffrance et dans votre agonie psychique, là ou tout le monde vous pensant anéantie… pour vous amener, tout en haut, en haut, dans un endroit chaud et calme, qu’on appelle le bonheur, la réussite, le dépassement de ses propres limites, l’endroit de tous les possibles, de tous les rêves, de tous les espoirs, de tous les bonheurs.
Alors oui, délectons nous victimes, de ce mot riche en sémantique, délectons nous de cette valeur, de ce phénomène, qu’on appelle la résilience. Brandissons les drapeaux, armons nos armures, revêtons notre uniforme de combat, et relevons-nous ! Relevons nous d’un coup sec, comme le font les sages, comme le font tous ces sages, qui sept fois tombent, et se relèvent huit…. Puisons l’énergie dans la détresse, puisons le blanc dans le noir, la lumière dans l’obscurité et traversons tous les possibles…. A quoi sert-il de se lamenter, de brandir jour et nuit, le statut de « pauvre victime » ? A quoi cela sert il ?
Nous avons été violés, oui, nous avons été torturée, oui, nous avons souffert, nous avons rencontré l’injustice, la souffrance, la terreur, le silence, les menaces… Les souvenirs veulent nous assaillir et nous mener à terre ! Répondons en attaquant ! Répondons et relevons-nous ! Répondons à l’horreur par un sourire, à la tragédie par un éclat de rire, au Mal par le Bien…. On a voulu vous détruire, construisez les autres, on a voulu faire de vous une moins que rien, prenez soin des autres… Retournez votre crime à l’envers, et faites en un vilain chien misérable qui se mort la queue tout seul … L’énergie est en vous, en « puissance » comme disent les psychologues, elle est « cachée », comme disent les fervents… déplacez vous, voyagez, chercher la place la plus confortable dans la vie pour vous permettre de ré-agir face au drame…
C’est le seul message que je souhaite partager, hors de question pour moi aujourd’hui de me plaindre, de dépeindre un tableau noir et tragique… violée, et alors ? Flash- backs, et alors ? Frigidité ? Et alors ? Frigidité émotionnelle ? Et alors ? Injustice ? Et alors ? Dilemme ? Ca me fait rire… J’ai toujours montré du doigt ces déprimés de la vie qui montrent en société une face radieuse et multiplie les éclats de rires …. Aujourd’hui, je leur dis bravo, je salue leur force… et je prends la même attitude… Résilience… une force de vie à l’intérieur de nous-mêmes.. une décision… un choix, un « libre arbitre »