Ma vie s'est arrêtée, et a du mal à repartir...

Témoignage Publié le 20.11.2016

Ma vie s'est arrêtée,

et a du mal à repartir...

Quand j’étais petit, nous partions en vacances avec mes parents et les sœurs de mes parents. Nous avions loué des maisons, des gîtes pour se retrouver en famille. Nous étions bien, nous faisions des visites, etc... Mais le moment venu, le soir, tout était différent.

Il était là, plus âgé que moi, de la même famille, c’était le fils de la sœur de mon père, autrement dit un cousin et me terrorisait. Pourtant il fallait que je dorme avec lui car il n’y avait pas d’autre place ailleurs dans la maison alors c’était convenu que c’était dans le même lit, vu c’était un lit deux places et que nous étions deux garçons, c’était normal de dormir ensemble...

Mais c’est devenu une épreuve pour moi, une aubaine pour lui... Alors il a abusé de sa position, il était plus grand que moi, plus fort que moi, plus âgé que moi, et m’a fait subir ce qu’on ne devrait jamais faire subir à une personne. C’était au départ rien que des caresses, c’était pour jouer soi disant puis le jeu à pris d’autres proportions, c’était normal, c’était les règles du jeu soi disant, il fallait les exécuter, et pour finir par l’acte, celui qui vous fait perdre la notion de la réalité, celui qui vous salit au plus profond de lui même, celui qui vous traumatise chaque jour, celui qui ne vous permet plus de vous regarder dans une glace, celui qui vous hante chaque fois, chaque moment où vous n’êtes pas bien, celui qui est incarné en démon...

La première fois, je ne comprenais pas, je pensais c’était normal, puis une autre nuit, puis encore une autre, j’en ai arrêté de compter... Puis l’année d’après le même scénario, puis encore celle d’après... Je pensais que cela n’en finirait jamais... J’étais pétrifié, j’étais sans défenses, j’ai abandonné mon corps et mon esprit, jusqu'à que cela finisse, je n’étais plus moi, j’étais quelqu’un d’autre qui ne pouvait rien faire, ni se défendre, ni dire non, ni tout arrêter, lui faisait comme si de rien n’était. Le jour d’après, moi je ne savais plus quoi faire, j’essayais de faire bonne figure, de rien dire, de faire comme si c’était normal et après je pensais a ce qu’aurait dit les membres de la famille ? Serais je passé pour l’affabulateur ? Serais je passé pour la victime que je suis ? Je ne pouvais pas en parler, je ne pouvais rien dire, j’ai tétanisé et sans voix alors j’ai décidé de garder le silence... De me taire, de laisser cette douleur me ronger, pour ne pas créer de problèmes, pour ne pas faire exploser la famille, pour protéger les autres sans me protéger moi...

Et si vous n’avez pas encore compris totalement, l’aigle noir de Barbara est un complément à mon histoire.

Et j’ai grandi, en n’oubliant jamais cela, en étant toujours rongé mais plus doucement, moins fortement. Mais mon histoire en est affectée, mon caractère également, j’ai perdu l’estime que j’avais pour moi, j’ai perdu la confiance que j’avais en moi, je suis détruit, anéanti, et comment s’en sortir après tout cela, comment ne pas être affecté chaque jour par cette histoire, comment ne pas vouloir en finir car le mal se déclenche et vous ronge encore plus.

C’est une douleur intérieure, indescriptible, que je ne souhaite à personne de vivre, ni même à mon propre ennemi. Cela s’est passé il y a des années, mais cette douleur, ce traumatisme est toujours présent et je pense le sera jusqu’à la fin de mes jours.

 C’est incroyable de se sentir aussi démuni, aussi sale, aussi dégoûté de soi. Et je m’en veux terriblement de ne pas avoir réussi à dire non, de ne pas pu arrêter ce processus, de ne pas m’être opposé, de ne pas avoir eu le courage, le cran de m’élever contre lui. Je suis dégoûté de moi, je n’arrive pas à comprendre et je n’aurai jamais l’explication de cette dérive traumatique.

Je vis avec ce poids maintenant, avec cette boule à l’estomac chaque jour, et de le recroiser en repas de famille, il faut arriver à faire semblant, à oublier, à mettre de côté le passé. Lui fais toujours comme si de rien n’était, moi je ne peux pas, je n’y arrive plus…

Je ne peux plus, j’ai mis du temps à comprendre, à ouvrir les yeux, à mettre des mots sur ces maux.

Mais comment se construire avec ce poids ?

Nous en parlons
S
Sissi
Publié le 20.01.2017
Inscrit il y a 8 ans / Nouveau / Membre

Ton témoignage me touche beaucoup. Personnellement, j'ai écrit ce que j'ai subi. J'ai décrit les scènes pour prendre de la distance et pour extérioriser ma colère.
Des poèmes sortaient de moi comme un jet que je ne pouvais arrêter et que je n'ai surtout pas arrêter pour me soulager.
Puis, j'ai eu le courage d'aller voir une thérapeute spécialisée en TCC qui me soutient bien. Puis, ayant demandé au Ciel de rencontrer un sexologue qui pourrait encore plus m'aider, j'ai enfin eu les références d'un sexologue qui me comprend. Mes blessures béantes se referment peu à peu et l'une après l'autre.
Je te souhaite courage et persévérance car la vie vaut le coup d'être vécue ! :) Accroche-toi, je t'en prie, accroche-toi, ça ira mieux dans quelques temps. :)

R
RAF
Publié le 16.12.2016
Inscrit il y a 11 ans / Actif / Membre

Hello,

Je te remercie pour ton témoignage. Personnellement tes mots me parlent beaucoup et font échos à une partie de ma propre histoire. Je ne l'aurai pas mieux écris. Tes mots sans aucun doute vont parler et faire échos à beaucoup d'hommes ayant subis des incestes d'agresseurs faisant partie de leurs cercles familiaux.

Personnellemt, pour des raisons de procédure pénale en court. Je me dois de me dois à la prudence.

Comme l'un de mes agresseurs, je n'ai eu d'autre choix que le côtoyer régulièrement. Cela jusqu'à l'âge adulte.

Pour se construire il faut un passage de déconstruction.

Merci et courage