Dur

Témoignage Publié le 28.03.2017

Dur

J'avais entre 6 et 7 ans. Victime d'inceste suivie d'une scène qui m'a tellement terrorisée que j'ai passé ensuite des années dans un quasi-mutisme, sourires timides, trop sage et trop discrète, à maintenir mon cerveau hermétique à toute émotion pour ne pas exploser et aussi inconsciemment pour protéger une maman malade, un frère qui a failli mourir, des frères qui auraient été séparés de moi. Dépression scolaire. Puis un jour, vers la trentaine, après une vie hermétique et limitée, après le suicide d'un frère, ma tête a commencé à vaciller tandis que je cumulais les critiques et les reproches dans le travail que je ne pouvais plus assurer, dans la famille, etc.

J'ai senti que je n'étais plus qu'à un fil. J'ai dû me résoudre à consulter. Et là, tout a explosé, je reprenais vraiment  là où ma vie s'était arrêtée : l'inceste, la scène qui m'a effrayée, etc. Et j'avais trop honte de moi, de mon père surtout, trop peur de réaliser vraiment. J'ai mis deux décennies pour surmonter, me reconstruire, mais aujourd'hui arrivée à la retraite, en devant m'occuper de mon dossier retraite, tout s'écroule. Le dossier c'est le renvoi de toute mon histoire avec tous les flashes en pleine figure.

Je n'ai pas eu le temps de vivre. J'ai vécu dans la peur, l'insécurité, les élans cassés de la reconstruction où j'ai rarement pu dire "je". La vie professionnelle chaotique, mariée tardivement... Un bilan qui résonne amer, je retombe en dépression, car je suis chronologiquement complètement en décalage avec les 60 ans, puisque je n'ai pas eu une vie normale de femme, puisque ma vie a été complètement décalée. Heureusement qu'il y a mon mari. J'espère que les jeunes victimes d'aujourd'hui auront vraiment la compréhension et les aides adaptées.

Nous en parlons
I
invisibilissime
Publié le 30.10.2017
Inscrit il y a 14 ans / Nouveau / Membre

Merci Jacqueline, je sens votre bon courage. Je n'ai hélas pas le sentiment d'avoir commencé un brin de chemin d'évolution et par ailleurs j'ai juste été reconstruite cahin caha sans psy de remplacement après le départ de mon psy à la retraite, c'est pourquoi je dis heureusement que j'ai rencontré enfin mon mari à la veille de mes 50 ans (jamais eu de vie de couple avant)pour être plus fort chacun, se soutenir : lui handicapé a besoin de moi ; pour la vie de couple, il me faut gérer avec mes difficultés... pourvu que le bonheur que je donne à mon mari rejoigne effectivement ce qu'il y a de Grand quelque part. Je protège mon mari comme j'ai protégé ma famille dans mon enfance.... Mais parfois que Dieu me pardonne...mais bon, y a pire... L'essentiel est de se rendre heureux en couple réciproquement avec des petits riens.