Je vais en faire quelque chose

Témoignage Publié le 24.09.2020

Je vais en faire

quelque chose

J'ai été violée par mon grand-père entre mes 8 et mes 12 ans environ. Ca a commencé quand j'ai proposé d'aller dormir à l'étage avec mes grands parents pour éviter à mon frère de subir ma présence et mes ronflements qu'il ne supportait pas. Je montais donc me coucher et mon grand-père suivait de quelques minutes pendant que ma grand-mère discutait avec mes parents. Il me caressait, m'embrassait, me léchait en disant "petit con". J'éprouvais à la fois du dégoût, de la honte et à la fois du plaisir. Il me demandait aussi de le toucher, de le prendre dans ma bouche car il ne bandait pas. Il a essayé de me pénétrer avec son sexe mais je crois qu'il n'a pas réussi. Une chance !!!

Au début, cela se passait le soir puis aussi le matin après que ma grand-mère soit levée. Je pense que ça s'est arrêté quand mon frère ne venait plus avec nous et que j'ai décidé de retourner dormir en bas. J'ai enfoui ce traumatisme jusqu'à mes 19 ans où la vérité est sortie comme si je la vomissais. J'ai commencé à me faire aider (psychiatre) quand j'avais 22 ans pendant 1 an peut-être. J'ai fait une tentative de suicide à 26 ans (médicaments puis voiture dans le fossé) et j'ai dit aux pompiers qui m'ont ramassée que c'était à cause du viol (je ne m'en rappelle pas, j'étais presque inconsciente). J'ai passé 2 semaines en hôpital psychiatrique dans un service réservé à des personnes en dépression aiguë, comme moi. Les personnes soignantes étaient très attentionnées. Je suis ressortie en me disant que si je n'étais pas morte, c'est que je devais avoir une mission sur cette terre liée à mon traumatisme.

Je suis devenue enseignante et j'adore mon métier. Mais j'ai beaucoup de mal à supporter mon impuissance pour aider certains enfants en grande détresse, l'institution et les parents mécontents, d'autant que je ne rentre pas trop dans le cadre conventionnel. J'ai vécu pendant 18 ans sans trop de heurts, avec des suivis thérapeutiques variés, j'ai même réussi à fonder une famille avec mon compagnon qui est une personne extraordinaire, qui est toujours à mes côtés (quelle volonté !), mais depuis fin mars 2019, je suis en dépression. Je suis suivie par une psychothérapeute vraiment compétente, bienveillante, qui pratique aussi bien le dialogue, l'EMDR que l'interprétation des rêves. Elle m'aide à avancer et à accepter ce que je vis, ce que je suis sans jugement.

Je ne sais pas encore ce que je vais faire de ma vie professionnelle. Suis-je à un tournant ? Vais-je retourner auprès d'une classe ou auprès d'enfants en souffrance ? Il y en a tant... Je ne sais pas encore, mais ce que je sais c'est que j'ai décidé de prendre soin de moi, et en le faisant, je prends soin de mes enfants. Les relations avec mes parents et avec mon frère sont très compliquées, je sais que je suis l'enfant symptôme qui remue la merde et c'est parfois un peu lourd à porter mais le dysfonctionnement familial (qui se répète depuis... ) va s'arrêter avec moi et j'en suis fière.

Je suis heureuse de partager ce vécu avec vous. Merci !