Je veux savoir maintenant

Témoignage Publié le 27.05.2010

Fotolia_15951260_XSJe n'arrive pas à témoigner pour de vrai. A nouveau ma tête se vide comme si elle était percée de petits trous d'où s'échappent mes pensée, ma raison, mon cerveau tout entier et il ne reste plus que l'appréhension, la peur, la tristesse, la gorge nouée, la boule au ventre, l'envie de pleurer, comme une chaleur qui m'envahit suivi plus tard de frissons et ma tête, ma tête vide qui en même temps semble vouloir exploser.

Voilà ce que je vis depuis quelques années maintenant. Je bloque, je me heurte à moi-même. J'ai du mal à parler de tout ça concrètement me concernant. Je ne peux en parler que quand je ne parle pas directement de mon expérience. Mais maintenant, j'en ai marre ! J'en ai marre de ne pas savoir, j'en ai marre de douter de moi et, du coup, de ne pas pouvoir avoir totalement confiance en moi et m'aimer.

J'ai fait une fausse couche cette année et ça revient. Je refais des rêves troublants concernant mon père mais qui restent symboliques. Aucun réel souvenir. Aucun.

Et puis je fais des crises aussi. Très violentes. Envers celui que j'aime, qui a ses défauts comme tout le monde mais qui ne mérite pas toute cette violence et cette méchanceté (parfois juste à cause du ménage!). Je hurle, je le frappe, je lui crache dessus et puis ensuite je pleure prostrée. Quand je reprends mes esprits, je m'en veux et j'ai honte de moi. Je ne veux pas être cette hystérique.

Je reste inlassablement partagée entre ces deux positions: 1-je suis une fille bien qui pourtant ne va pas bien depuis très longtemps (depuis toujours en fait) qui ne peut pas inventer cette horreur en elle. 2- je suis folle, méchante et perverse et ce sont d'autres soucis familiaux qui m'ont perturbé (tels que le divorce de mes parents, le fait ensuite d'être la seule issue de cette union et de me sentir différente de mes frères et soeurs qui eux forment une vraie famille avec ma mère et mon beau-père, mon père qui  toujours été très dur et exigeant avec moi sans jamais avoir été violent physiquement, et une famille toute entière qui a beaucoup beaucoup de problèmes) et me font avoir ces idées-là pour me rendre intéressante moi la 5ème roue du carosse

Mais, depuis quelques temps et après quand même 5 ans de thérapie, la première position semble vouloir être la seule. Durant cette thérapie, j'ai surtout appris à avoir confiance en moi et à m'aimer, j'ai réglé pas mal de problèmes concernant ma relation à ma mère, mais je n'ai pas réussi à dénouer ça, le problème lié à mon père, je me cogne toujours à un mur invisible, je tourne autour sans jamais y accéder véritablement.

Je veux savoir pour pouvoir me battre mais je ne sais toujours pas comment faire. Pour l'instant, je me laisse un peu de temps parce que je dois faire mon mémoire pour la fac (bien que j'ai déjà 28 ans), de réels flash maintenant me feraient perdre pied et laisser tomber mon mémoire (que j'ai déjà beaucoup de mal à entamer malgré un sujet qui me tient beaucoup à coeur, je suis très très en retard et ne vais du coup le rendre qu'en septembre,mais, à l'heure d'aujourd'hui, je n'arrive toujours pas à m'y mettre). Alors je fume avant de dormir et je me couche tard, assomée, comme pour éloigner les rêves, mais je compte arrêter en août. J'en ai marre de me cacher derrière la drogue.

Ayant déménagé, je ne voyais plus ma psy depuis octobre (sauf 2 ou 3 fois quand je reviens à Paris), il n'y avait pas de place dans le CMP de ma nouvelle ville, je ne savais plus quoi faire et puis j'ai trouvé la médecine préventive de mon CROUS, je les ai vu la semaine dernière, ça s'est bien passé, j'y retourne demain et toutes les semaines jusqu'en juillet. J'espère que ça ira mieux...

Car, en ce moment, d'après mon médecin généraliste (que j'a beaucoupi vu dernièrement pour diverses raisons: grosse fatigue, mal partout et surtout aux jambes, au talon d'achille, au bras droit, naussées, mal au ventre), je somatise et suis peut-être (enfin même surement) en train de faire une dépression masquée. Il voulait me donner des anti-dépresseurs mais j'ai refusé car ces substances-là me rendent encore plus mal (j'ai déjà essayé de nombreuses fois). Du coup il m'a mis sous millepertuis (et j'ai aussi mes anxiolytiques quand ça ne va vraiment pas). Mais j'en ai marre !!!!!!!!!!! Je somatise depuis toute petite, toute mon enfance j'ai entendu: "c'est psychologique" et j'en ai assez d'être prise pour une déséquilibrée. Oui je suis quelqu'un d'équilibré mais rongée par une lancinante et vieille blessure dont je n'arrive pas à me souvenir et donc me défaire.

Je veux savoir. Même si ça fait mal. Même si c'est affreux. Même si je me suis trompée. Mais je veux savoir. Je ne veux plus être en déséquilibre.  

Nous en parlons
B
Bulle
Publié le 28.06.2010
Inscrit il y a 13 ans / Nouveau / Membre

Merci beaucoup pour ton commentaire, ça fait du bien de se sentir moins seule.

J'espère qu'un jour moi aussi je pourrai avoir ma conviction à moi. Car, pour le moment, je ne suis toujours sûre de rien et je n'ai aucune preuve pour me convaincre que je ne suis pas folle, méchante et perverse. Tout reste irréel, même mon existence, ma personne.

C'est difficile mais je ne veux pas baisser les bras. le chemin est long mais j'y arriverai, d'une façon ou d'une autre.

Merci encore à toi car tu me réinsuffle un peu de vie, d'espoir et surtout de confiance. J'espère qu'aujourd'hui tu te sens mieux et que tu arrives à vivre avec ça et surtout à être toi toute entière.

Amour, lumière, chaleur et bonheur pour toi...

P
poupéerusse
Publié le 24.06.2010
Inscrit il y a 14 ans / Actif / Membre

J'ai cru lire mon histoire.

J'ai 37 ans. Je suis atteinte d'une fibromyalgie (douleurs musculaires et très grosse fatigue) depuis l'âge de 22 ans, à la naissance de mon 1er enfant. J'ai commencé à me poser des questions sur ce que j'aurais vécu et il y a 4 ans, ma mère m'a amené un carton avec mes dessins que j'ai fait quand j'étais petite. J'ai eu pleins de frissons quand j'ai trouvé LE DESSIN ! Je me suis dessinée toute nue avec un truc noir à l'entre jambe, des grosses larmes et les yeux grillagés. Un autre montre un homme (je reconnais mon père...) ou j'ai dessiné un sexe d'homme. Voilà j'avais ma preuve.

Pendant longtemps je pensais que je réagissais par rapport aux histoires des personnes de mon entourage. C'est seulement maintenant que j'intègre le fait que c'est bien MON CORPS A MOI QUI A ETE AGRESSE.

Mon père je le hais. Je n'ai jamais supporté qu'il me touche, m'effleure ou soit simplement soit assis à côté de moi. Je pense que c’est lui mon agresseur.

Je n'ai non plus aucun souvenir. Alors j'apprends à écouter mes ressentis, à me faire confiance A MOI. J'espère que mes souvenirs reviendront. C'est l’horreur d'avoir vécu l'inceste, mais c'est aussi l’horreur de ne pas savoir. On ne peut pas être entière. C'est à devenir folle.

Maintenant je sais que je ne suis ni tordue ni perverse. Ce ne sont pas des choses qui s'inventent, mais qu'on peut effectivement mettre dans un coin de sa tête pour continuer à vivre.

Courage à toi, tu as fait un pas envers toi-même.

Chaleureusement.