La justice : une destruction réparatrice ?

Témoignage Publié le 03.06.2019

La justice :

une destruction réparatrice ?

Bonjour,

Je me permets de vous écrire suite à le rediffusion du 23 mai 2019 sur LCP du documentaire « enfance volée, chronique d’un déni », émission que je n’ai pas voulu ou pu regarder en mars.

Tout d’abord je tiens à vous remercier pour cette diffusion, en effet, alors que j’étais sous alcool, en crise d’angoisse, et à 2 doigts de commettre l’irréparable, je pense que vous m’avez sauvé la vie. Les 2 jours précédents la diffusion avaient été très difficiles, rdv psychologue, juriste, j’étais à bout, épuisée moralement et physiquement. C’est la première fois que j’arrive à regarder une émission concernant l’inceste. Cela m’était impossible jusqu’à ce que je tombe sur vous lors d’une énième nuit d’insomnie. La veille, je disais à ma psy mes doutes sur moi, « ça se trouve, j’en fais trop, c’est peut-être pas si grave ce que j’ai vécu, 24 mois de sursis comme peine… » et là, je prends conscience grâce à vous que je suis juste une psycho-traumatisée de viols et d‘agressions sexuelles subis entre mes 8 et 12 ans, l‘agresseur étant l’ancien compagnon de ma mère.

Je viens également partager mon expérience qui peut peut-être vous servir dans votre combat contre la prescription (j’avais 36 ans quand j’ai déposé plainte et les faits étaient prescrits d’un mois lorsque mon frère a été entendu) contre la correctionnalisation, en faveur du dépistage systématique. Je me suis totalement reconnue à travers vos paroles, des mots m’ont réconforté « force et courage » « enfance volée vie volée » « tentative de suicide, conduites addictives, dépression », « mon combat pour révéler le tabou », « la mort est une amie ». Vous comprendrez à la lecture que beaucoup de thèmes abordés lors du documentaire se retrouvent dans mon expérience, notamment la « faillite totale de la justice », outre la correctionnalisation, les faibles condamnations, je reste choquée et déçue du manque d’intérêts de la justice aux dépistages, surtout quand elle sait que la dénonciation  des faits de 1992/93 a permis l’arrestation d’un pédophile qui agissait encore en 2017 sur un enfant fragile et qu’aucune enquête n’a été ouverte à la recherche d’autres victimes sachant que le pervers habitait un chalet dans le jardin de sa fille depuis 2000 et que cette dernière a commencé d’accueillir des enfants placés vers 2008/2009.

Je me prénomme Marianne, j’ai à ce jour bientôt 38 ans, je me suis aventurée depuis bientôt 2 ans dans l’engrenage infernale de la justice. J’espère un jour pouvoir parler de « destruction réparatrice » bien qu’aujourd’hui je ne connaisse que l’aspect destructeur de cet oxymore. Je me console par cette phrase « heureusement qu’il y avait d’autres victimes », ce que je trouve horrible à dire mais qui je pense à jouer en ma faveur pour le délibéré.

Jeudi 29 juin 2017, je ne travaille pas, je suis mal depuis plusieurs jours car je dois avoir une discussion, LA discussion de ma vie avec ma mère. Elle sait que je dois lui dire des choses... Elle arrive, je tremble, elle s’assoit dans le canapé. « Bon maman il faut qu’on parle », je sens l’inquiétude, la peur chez ma mère. Et là je déverse, je lui parle de Daniel F, de ce qu’il m’a fait quand j’avais à peine 9 ans lorsqu’il venait voir si mes poils pubiens poussaient, ou juste avant l’été de mes 12 ans, quand il venait tous les jours me tripoter... et blabla je parle. Elle pleure, je pleure. A 21h, ce même jour, je textote mon frère, nous sommes distants depuis quelques temps sans raisons particulières, juste nous sommes différents... Bref... « M., j’ai eu une conversation compliquée avec maman aujourd’hui. Il se peut qu’elle ait besoin de parler. Je reste à ta disposition si tu souhaites qu’on en discute. Bisous » peu de temps après, « Mimi fix appel » sur mon écran de téléphone. Je réponds doucement, fébrilement, la boule au ventre. Et voilà, après ma mère, mon frère. Et blabla et blabla après mon monologue se terminant par « et toi, il venait te voir le soir, est-ce qu’il t a fait des choses ? » « oui il m’a fait la même chose qu’à toi et je n’ai pas parlé pour les mêmes raisons que toi », à savoir : la peur, la honte, le sentiment de culpabilité, la crainte de ne pas être cru. A ce moment-là, il avait presque 38 ans, et moi bientôt 36. Il n’avait jamais rien dit, jamais. Tout s’écroule et tout s’éclaire en même temps « je ne suis pas folle, pas coupable, c’est un pervers, un pédophile » des souvenirs me remontent, sa cassette vidéo n’était pas un simple film porno mais un film porno à caractère pédophile, avec cette femme habillée en écolière, le vieux qui utilise une poupée pour lui montrer des choses…. Je suis mal, en colère, envie de le tuer, il a touché mon frère.

Mercredi 5 juillet, je me rends à la gendarmerie de mon domicile « qu’est ce que je peux faire pour vous » « je ne sais pas, il s’est passé des trucs quand j’étais enfant », j’explique brièvement les faits subis par mon frère et moi, je suis convoquée le samedi 8 à 8h30 pour être entendue par l’adjudant gérant ce genre d’affaires. Samedi 8 juillet 2017, 8h15, je ferme la porte de chez moi. Mes jambes tremblent, je descends les escaliers en me cramponnant à la rambarde métallique noire, je fais attention à ne pas butter dans l’écart causé par la perte de trois ou quatre petits carrelages pourtant, je les prends tous les jours depuis 2 ans. Je sors, « Par où je passe ? à droite ? à gauche ? Peu importe» Je prends à gauche. Je fume une cigarette, puis une seconde sur ce trajet interminable d’à peine 500 mètres. Je me sens fébrile, je suis presque arrivée, encore 50 mètres, mon rythme cardiaque s’accélère à chaque pas. Je m’assois sur le seul banc que j’ai trouvé en chemin, Je suis chamboulée, tachycardie, mes jambes sont toujours en coton. « je dois y aller, je suis attendue à 8h30 ». J’ai peur de ce qui va se passer. Je pleure depuis une semaine. Je ne dors plus. »

Mon cœur s’accélère encore, je suis au bord du malaise. Je suis arrivée « ouverture des bureaux 8h30 » il est 8h30. Je sonne. « Gendarmerie nationale bonjour » « bonjour, Me S marianne, j’ai rdv à 8h30 avec l’adjudant K » « biiiip » je rentre dans cette petite salle d’attente pour la seconde fois en 4 jours. Cette fois, je suis attendue. On m’accompagne dans le bureau au fond à droite. L’adjudant doit avoir à peine 30 ans, il a de beaux yeux bleus, il dégage quelque chose de rassurant de suite. Je m’assois. L’adjudant me propose un verre d’eau, il me dit que ça va être compliqué, que nous pourrons faire des pauses, qu’il devra poser des questions pouvant me mettre mal à l’aise. J’acquiesce à chaque fois sans un mot. Il prend mon identité et je commence à parler. Il est à peine 9h00. « Mes premiers souvenirs... » s’en suit plus 3 heures d’audition, les heures le pires de ma vie, là où l’adulte de 36 ans que je suis aujourd’hui réalise ce que l’enfant qu’elle était a subi.  Ce que j’ai considéré comme des abus sexuels deviennent des « viols et agressions sexuelles sur mineure de moins de 15 ans par personne ayant autorité parentale » pour la justice. Les faits ne sont pas prescrits. Il risque les assises. « Mme S, voulez-vous porter plainte contre Mr F ? » « oui ». Il est 13h je sors, vidée, soulagée, fière, je pleure, je suis mal triste… Le retour me semble plus court, je ne fume qu’une seule cigarette.

L’engrenage a commencé, si j’avais su que la suite aurait été si difficile, je ne sais pas si je serai allé au bout, mais il fallait protéger d’autres, là était ma motivation première à la démarche judiciaire. L’adjudant a fait un bon travail, l’enquête préliminaire n’était pas évidente. Mes quelques confidents de l’époque dispersés aux 4 coins de la France ont été entendus soit à la gendarmerie de mon domicile, soit par visiconférence. Mon frère est intervenu en tant que témoin en septembre 2017 à 38 ans et 1 mois), j’ai également été expertisée par une psychologue. Tous ces témoignages ont permis que Mr Daniel F soit placé en garde à vue le 18 décembre 2017. Une confrontation a été réalisée le 19, un moment très difficile à vivre, il nie les faits, insistant sur l’absence de pénétrations digitales, reconnaît quelques gestes déplacés mais je l’aurai provoqué avec une jupe blanche, c’était pour me taquiner. Il n’a aucun remord, aucune culpabilité, minimise les faits. Il reconnaît les attouchements sur mon frère... J’en sors dépitée, épuisée. Il a été déféré devant le procureur de la République le 20 décembre, placé sous contrôle judiciaire et convoqué le 14 février 2018 devant le tribunal correctionnel. N’ayant pas avoué les viols, et la priorité étant que je me reconstruise au plus vite, la correctionnelle est plus simple. Je l’ignorais à ce moment là, et sans le savoir, j’ai cautionné la correctionnalisation des viols.

Le 14 février, arrive le procès. Nous commençons l’audience par une demande « d’exception de nullité relative à la procédure antérieure à l’acte de saisine ». Je ne comprends rien, pourquoi me parle-t-on de prescription aujourd’hui ? Il risque de ne pas être jugé... Après quelques minutes de délibération nous sommes entendus chacun notre tour. Je déballe ma vie privée devant une cour pleine d’inconnus, des juges, des avocats, devant mon papa qui est tout pale devant ce qu’il entend... Nous abordons les faits, ma tentative de suicide à 14 ans quand il a voulu recommencer, mes difficultés d’avoir une vie intime « normale »... Je pleure, j’ai l’impression d’avoir 12 ans. C’est horrible, les larmes montent rien que d’y repenser. Je sens l’empathie des juges, du procureur qui a noté combien « la victime avait su retenir sa souffrance en ne les divulguant pas pour préserver la cellule familiale, les faits sont vrais, la victime les a exprimés avec beaucoup de pudeur, ses révélations écartent toute suspicion. La candeur chez un enfant ça se préserve ». On me traite de menteuse, je l’aurais provoqué avec une jupe blanche en crépon, « j’ai pas souvenance » insiste sur l’absence de pénétrations, « ce n’était que du superficiel, il n’y avait rien de sexuel » selon lui et j’en passe... Son avocat a repris tous les codes pénaux depuis 1994 afin de démontrer que les faits étaient prescrits.

Et puis arrive la fin des débats, quand la présidente revient sur l’obligation de soins que Mr F a depuis sa garde à vue, ce dernier avoue à la barre un comportement identique avec un garçon de 12 ans, enfant gardé en 2017 par sa fille qui est famille d’accueil ! Stupeur de tout le monde, changement d’ambiance. Je suis hors de moi, mais contente qu’il avoue enfin, j’avais l’intime conviction qu’il y avait d’autres victimes, c’est ce qui m’a conduit à déposer plainte et à aller au bout, pour « protéger d’autres ». Le jugement a été mis en délibéré. Le 28 février 2018, Mr F est reconnu coupable « d’agressions sexuelles incestueuses sur une mineure de moins de 15 ans ». Il est condamné à 24 mois de prison intégralement assorti d’un sursis, avec mise à l’épreuve de 2 ans, inscription au fichier des auteurs d’agressions sexuelles, interdiction d’entrer en contact avec la victime et les mineurs, et une amende de 3000 euros (minorée de 20% s’il paie dans le mois). Par ailleurs une enquête est ouverte concernant les faits avoués sur le petit A.

Me voilà soulagée, il est coupable. Nous sommes attendus le 12 avril 2018 pour une audience à la chambre des intérêts civils. J’étais Cadre de santé, en arrêt maladie depuis juillet 2017, mon employeur m’ayant convoqué le 6 avril pour me proposer une rupture conventionnelle, en cas de refus, il entamera une procédure de licenciement pour perturbation du service. Pensant arriver au terme de la machine judiciaire, je signe cette rupture le 10 avril. Et puis le 12 avril, tout s’écroule quand je me rends au tribunal. J’apprends que l’audience est renvoyée, le coupable ayant fait appel le 7 mars !!! Le tribunal n’a pas prévenu mon avocat, et mon avocat n’a pas pris la peine de se renseigner. Tout s’écroule, appel sur du sursis !!! Je ne comprends pas, pourquoi je ne suis pas au courant ? Je suis en colère, triste, démoralisé, il va falloir retourner au tribunal, engager des frais supplémentaires, et je suis au chômage... Motif d’appel : la PRESCRIPTION.

C’est à partir de là que le plus difficile a commencé pour moi, je me suis sentie seule face à un système inhumain pourtant élaboré par des humains, je n’ai aucun recours. Il a flingué mon enfance, il continue à me nuire adulte. La justice l’autorise à me nuire encore. Mon état dépressif s’aggrave à cette période, mes troubles alimentaires d’anorexie reprennent de plus bel. Je suis déçue par la justice, en colère contre cette institution... Je tente de faire face, j’ai une enfant de 7 ans et demi à cette période, que j’élève seule depuis 6 ans. Ma fille qui voit sa maman pleurait régulièrement depuis des mois, ma fille qui prend soin de moi car je peine à pendre soin d’elle. Ma fille qui est mon moteur de vie, pour qui je me lève chaque matin... Le procès d’appel aura lieu le 22 octobre 2018. Et je continue de croiser mon agresseur, il habite à 10km de chez moi, il se promène tranquillement, il a vu ma fille, ma fille l’a vu... je m’efforce de ne pas aller faire justice moi-même.

A l’approche, du 22 octobre, je suis mal, je ne dors plus, j’angoisse, je n’ai plus confiance en personne. J’ai changé d’avocate, elle m’a paru compétente au 1er rdv. Le lundi 22, alors que mon père est sur la route pour m’accompagner au procès, mon avocate m’informe à 10h30 que c’est inutile de venir puisqu’un renvoi est demandé, toujours cette maudite prescription éventuelle ! Je m’écroule à nouveau, j’encaisse. Les soucis financiers s’accumulent, le vois la précarité arriver. J’entame un projet de réorientation professionnelle, je veux me reconstruire vite mais je suis très fragile, pas encore apte à une reprise d’activité... Je vis au rythme de la justice, je subis cette intemporalité judiciaire. L’audience aura lieu le 14 janvier 2019. Je ne me démonte pas, retourne affronter ce pervers. Son avocat me fait les yeux noirs, ils espéraient tous les deux que je ne sois pas présente à l’audience. Le procès est aussi difficile qu’en première instance, sa défense est la même, quelques détails supplémentaires concernant mes « aguichements », après la jupe blanche, c’est à cause du short vert. J’en ressors malheureuse, avec des images en tête que je n’avais pas avant. C’est à cette audience que j’ai entendu les détails des attouchements subis par mon frère. Mon frère qui ne veut pas entendre parler de tout ça, mon frère qui a trouvé plus facile de rejeter sa sœur de sa vie, cette sœur qui est venu lui rappeler des choses qu’il avait oublié, nous n’avons plus aucune relation depuis que j’ai parlé. Cette sœur qui lui imposé de raconter à un gendarme ce qu’il avait vécu. Je pleure mon frère, mes neveux que je ne vois plus.

Le délibéré sera rendu le 18 février, je ne m’y rends pas, je suis fatiguée de la justice, ma voiture est en panne, je veux préserver mon papa. J’attends un coup de fil de mon avocate, voire un mail... Une nouvelle qui n’arrive pas. J’ai peur qu’il y ait nullité... J’attends des jours. Je me dis que mon avocate attend son règlement de 1500 euros pour me prévenir, j’ai quelques jours de retard car je n’ai pas l’intégralité de la somme due. Début mars, je lui envoie son chèque, je me permets de la rappeler, en vain. Le hasard fait que je croise mon agresseur sortant de mon buraliste le 8 mars, je suis en voiture, je viens de récupérer ma fille qui a 8 ans et demi, qui sort de l’école, ma fille qui a eu très peur car sa maman a perdu son sang froid et a poursuivi la Renault 19 bleue de mon agresseur, sa maman qui s’est arrêtée à sa hauteur et qui lui a demandé le verdict, et il m’annonce tranquillement « ils ont confirmé en tout point ce qui a été dit la première fois », je lui demande s’il va en cassation, s’il envisage de me pourrir encore. Je suis énervée, j’ai envie de sortir de ma voiture et de le frapper, je le menace de le tuer s’il continue à me nuire. Il hausse les épaules et repart. Je m’écroule encore, je pleure de colère, de soulagement, ma puce pleure aussi, elle a eu peur que « le méchant monsieur me face du mal ». Je reçois quelques jours après un mail de mon avocate me confirmant la culpabilité, la peine de 24 mois de sursis...

Nous sommes attendus le 9 mai au tribunal pour les intérêts civils, je vois enfin la fin de tout ça. Je nourris depuis 1 mois et demi ma fille avec des bons alimentaires, bien que n’ayant pas fait la démarche pour l’indemnisation, je suis au moins dans l’attente du remboursement des frais de justice (3000 euros d’avocats) et une aide au frais de psychothérapie. « Allez Marianne, encore quelques semaines difficiles ! » Je me permets mi-mars de demander une « provision » à la CIVI afin qu’on me sorte du rouge avant mai. Demande refusée par le fond de garantie des victimes car « le préjudice est en cours d’évaluation et nous ne prenons pas en charge les frais de justice » mais malgré tout accordée partiellement (1500 euros) par la CIVI à une audience le 7 mai (courrier reçu aux alentours du 15 mai). Nous sommes le 10 mai, j’attends des nouvelles de mon avocate concernant l’audience de la veille. Je l’appelle, envois un mail. Sa réponse : « le compte rendu est à la frappe, vous le recevrez dans quelques jours ». Je suis hors de moi, le 1er rdv était juste un rdv « commercial », il y a aucune humanité chez cette personne, aucune conscience. Après quelques échanges par mail, elle m’informe que l’audience est renvoyée en fin d’année.

Pour la première fois depuis 25 ans, je pète les plombs, j’explose, il y a risque de passage à l’acte, un des deux va y passer, lui ou moi. Personne ne peut me raisonner, ni mes proches, ni ma psychologue. Ce qui lui a sauvé la vie, c’est l’alcool dans un premier temps car je ne souhaite pas perdre mon permis de conduire que je viens d’avoir, et ça serait dommage de me faire arrêter avant de lui casser la gueule, dans un second temps le digicode de son immeuble, dans un troisième temps, ses voisins qui ont été surpris de mes révélations concernant ce « monsieur gentil » et qui m’ont convaincue de rentrer chez moi. Je reçois un mail le 15 mai de mon avocate qui me confirme le renvoi à novembre 2019 « pour nos conclusions » à la suite de l’arrêt de la cour d’appel du 18 février !!! Je suis outrée, je suis choquée, je suis en colère, je suis épuisée moralement et physiquement, je n’ai plus envie de rien... Je reprends rdv en urgence le 21 mai avec la juriste de l’AVL que je revois le 4 juin. Elle m’a apaisée et raisonnée. Je suis déçue, déçue car je voulais juste pouvoir souffler cet été avant de reprendre une activité professionnelle en septembre, déçue de ne pouvoir offrir des petites vacances à ma puce qui subit également les déboires de la justice, les humeurs de maman, qui s’inquiète pour moi, ma fille qui mérite et attends de voir sa maman retrouver le sourire, ma fille qui saute de joie quand elle apprend que le vilain monsieur a pris de la prison, ma fille qui sait déjà à quoi sert un tribunal, qui a entendu 10000 fois que personne n’a le droit de toucher ses parties intimes sans son consentement, ma fille qui est privée d’une vie de famille car maman se refuse de laisser entrer une tierce personne sans notre intimité, ma fille qui a su garder le sourire quand maman pleurait « maman, tu pleures à cause du méchant monsieur ? », qui me force à manger car elle en marre de manger seule, ma fille qui se réveille la nuit et qui vient me chercher pour que j’aille dormir, ma fille qui me dit « je suis fière de toi maman, tu es courageuse », elle n’a que 8 ans et demi.

Et puis il y a eu votre documentaire et enfin j’ai appris sa condamnation à 18 mois de prison dont 6 mois ferme concernant les faits commis en 2017 sur le petit A., enfant fragile, suivi en IME et placé en famille d’accueil, cet enfant qui l’appelait papy et qui aurait toujours été d’accord voire demandeur mais qu’il menaçait de mettre des claques s’il refusait...  Cet enfant qui a la sortie du tribunal a pu dire qu’il allait bien, qu’il était soulagé du verdict. C’est ma seule récompense, mais quelle fierté et satisfaction d’avoir « sauvé » ce petit au détriment de ma destruction.

Voilà où j’en suis aujourd’hui, en vous remerciant du temps pris pour la lecture de mon témoignage. Je reste à disposition si vous avez des questions.
Marianne