Prévention

Témoignage Publié le 03.12.2018

Prévention

Je cherche de l'aide.

Je suis la maman d'un fils de deux ans et d'une fille de neuf ans, les deux dorment chez leur grand-père qui a abusé sexuellement de leur père quand il était enfant. Ça fait un an et demi qu'on est séparé à cause la violence conjugale et depuis un an je tente de faire parvenir à un juge mes préoccupations par rapport aux risques d'abus sur mes enfants. Au début les professionnels m'encourageaient dans mes démarches en me confirmant la gravité de la situation et la légitimité de mes inquiétudes. Un an plus tard, les délais et les frais exorbitants en cour, la loi qui exige des preuves d'abus sur mes enfants (inconcevable) ou la dénonciation de l'inceste de leur père (il ne le fera pas) m'obligent à tout abandonner sinon je risque tout perdre. Un rapport d'expertise récent me discrédite comme mère à cause de mon anxiété alors que je ne fais que chercher de l'aide pour faire de la prévention.

Je suis entourée d'amies qui me soutiennent, mais les contradictions des experts sur les dangers que courent mes enfants avec un pédocriminel sont déstabilisantes et leur impuissance à m'aider en se lançant tous la balle me révolte. Je réalise que le système de justice n'a rien prévu pour les mères comme moi et les psychologues banalisent l'inceste et me rendent coupables de la situation de stress que je vis, ce qui est le comble de la cruauté. Si ma demande de protection pour mon fils (et ma fille) est raisonnable pourquoi ma recherche de solutions concrètes pour une garde partagée qui minimise les risques est ''trop compliquée'' ?

Je ne peux pas exiger une aide thérapeutique non plus. Une psychologue me demande si je cherche à tout contrôler. Une autre me menace d'être tenue responsable si mes enfants sont un jour abusés. Une policière me dit d'arrêter d'en parler au risque que ça ne se retourne contre moi. Une intervenante me dit que je n'ai pas assez d'argent ni une assez bonne avocate. Mon avocate me dit que je n'ai aucune chance de gagner le procès car je ne suis pas assez ''en forme''.

Pour résumer ma situation, je souhaite partager mon histoire pour dire que je vais suivre mes convictions, mais à quel prix? Je suis une mère qui est au courant de l'inceste commis il y a plus de 30 ans mais je n'ai pas d'aide légale ou psychologique pour faire face à une situation d'abus hypothétique. Après douze ans de silence à faire des compromis sur mes valeurs et ma moralité, je veux parler. Je suis l'ex-conjointe d'un survivant en déni et je veux parler pour lui de ce qu'il a vécu car j'ai un fils à protéger. Je dois et je veux parler de l'inceste de manière préventive et non curative. Après un an de démarches invisibles pour dénoncer le plus respectueusement possible un abuseur protégé par sa propre famille, je suis épuisée. Mon ex couche trois nuits par semaine chez son père avec mon fils et ma fille dans un même grand lit, dans la même chambre où on eu lieu ses abus, mais je suis celle qui risque de perdre la garde de mes enfants selon une travailleuse sociale. Pourquoi? À cause du stress que me cause tous mes échecs pour aller chercher du soutien compétent pour confronter une situation qui me dépasse ?

SVP me dire quoi faire si je refuse de me taire, qui contacter si je ne veux pas me ruiner ? Je suis au Québec. Je n'ai pas perdu espoir que justice soit rendue et que mes enfants bénéficient d'un contexte de garde partagée beaucoup plus sécuritaire.