Film évènement sur l'inceste : Precious
Actualité
Publié le 20.02.2010
Six nominations aux Oscars : sortie en salle le 3 mars 2010. Critique evene.fr par Mathieu Menossi : "L'amour n'a rien fait pour moi. Il m'a violée. Il m'a rendue malade." Claireece "Precious" Jones n'attend plus grand-chose de la vie. "De la sale graisse noire à virer", c'est ainsi qu'elle se perçoit. Claireece "Precious" Jones voudrait chanter et danser, tourner un clip vidéo. Elle est obèse et illettrée. Elle vit à Harlem, enceinte pour la seconde fois d'un père absent et s'efforçant de survivre sans broncher auprès d'une mère tortionnaire. Le tableau est extrême. Certaines scènes sont d'une rare violence tant physique que morale. Lee Daniels aurait pu céder à la faciliter des images-chocs et se fourvoyer dans un misérabilisme larmoyant. Mais le cinéaste évite l'écueil en insufflant à son récit des respirations poétiques pendant lesquelles Precious se laisse (em)porter par son imaginaire. Une échappatoire grâce à laquelle la jeune fille s'acharne à contrarier un destin qui semble déjà écrit. 'Precious', c'est d'abord et surtout Gabby Sidibe, 24 ans, un physique imposant. L'identification avec le personnage est immédiate.
L'interprétation, remarquable de sobriété. A travers son film, en écho au récit de la romancière et poétesse noire américaine Sapphire ('Push') dont il est adapté, Lee Daniels dénonce ce monde qui persiste à s'imaginer "beau", au détriment d'une minorité invisible vouée à disparaître. Et ni Mariah Carey, méconnaissable en assistante sociale, ni les brèves apparitions de Lenny Kravitz en infirmier rédempteur ne viennent enrayer la puissance narrative de ce film bouleversant. Ils y sont même tout à fait crédibles !