Les hommes victimes de violence sexuelle dans l'enfance : Guide à l'intention des survivants adultes

Dossier Publié le 03.11.2009

Pourquoi ce livret ?


Ce livret s'adresse aux milliers d'hommes qui ont été victimes de violence sexuelle au Canada alors qu'ils étaient enfants ou adolescents. Il s'adresse également aux personnes qui aident ces hommes à aborder chaque nouvelle journée avec courage: leurs partenaires, leurs amis et leurs parents.

Si vous avez été agressés sexuellement quand vous étiez enfant, ce livret vous aidera à mieux comprendre les répercussions que peut avoir cette expérience sur votre vie actuelle. Il vous aidera aussi à tirer un trait sur votre enfance dévastée et à guérir. Si vous consultez un conseiller ou envisagez de le faire, ce livret vous aidera enfin à mieux comprendre en quoi consiste son rôle.

Si vous soupçonnez avoir été victime de violence sexuelle quand vous étiez enfant, mais sans arriver à isoler de souvenirs précis, vous trouverez énumérés ici quelques uns des symptômes ou des indicateurs de violence sexuelle. Ces indicateurs peuvent parfois aider à retrouver certains détails d'expériences passées.

Beaucoup d'hommes ont du mal à admettre qu'ils ont été autrefois victimes de violence sexuelle. Dans notre culture, en effet, tout homme qui se respecte se doit de maîtriser tous les aspects de sa vie. C'est pourquoi les garçons victimes d'abus pensent souvent qu'ils auraient dû être capables de se défendre contre leur agresseur; une fois adultes, ils s'en veulent encore de s'être laissés dominer. Les informations contenues dans ce livret vous aideront à mettre de l'ordre dans vos idées et à faire porter les torts là où il le doivent, soit sur l'agresseur.

Voici donc ce que vous trouverez ici :

1. une description des indicateurs le violence sexuelle dans l'enfance;

2. une explication des raisons pour lesquelles les hommes ont souvent du mal à admettre qu'ils ont été victimes de violence sexuelle;

3. un examen des questions soulevées par le traitement, comme la honte et la peur de la sexualité;

Nous employons souvent un pronom masculin pour désigner l'agresseur parce que ce sont le plus souvent des hommes qui agressent le jeunes garçons et les adolescents. Lorsqu'il s'agit d'un agresseur de sexe féminin, nous employons bien sûr un pronom féminin.

4. une analyse du rapport entre les victimes d'agressions sexuelles et les auteurs adultes de ces agressions;

5. une analyse de l'impact de la violence sexuelle subie dans l'enfance sur les relations à l'âge adulte;

6. une analyse de la façon dont la thérapie et les groupes de soutien peuvent favoriser la guérison;

7. une analyse des arguments en faveur et à l'encontre des poursuites judiciaires contre l'agresseur.

Si vous avez été agressés sexuellement quant vous étiez enfant, ce livret vous aidera à mieux comprendre les répercussions que peut avoir cette expérience sur votre vie actuelle.


Qu'est-ce que la violence sexuelle ?

La violence sexuelle constitue un abus de pouvoir. Si une personne plus âgée, plus forte ou plus expérimentée que vous vous a déjà obligé à vous adonner à une activité sexuelle lorsque vous étiez enfant ou adolescent, vous avez été victime de violence sexuelle. Votre agresseur peut avoir gagné votre confiance pour mieux vous tromper et abuser de vous. Il ou elle peut avoir encore aggravé l'abus en vous forçant à garder le secret et en vous culpabilisant.

La violence sexuelle ne désigne pas seulement les attouchements de nature sexuelle. Si on vous a obligé, enfant, à observer des activités sexuelles ou à visionner les vidéos pornographiques, vous avez aussi été victime de violence sexuelle. Vous l'avez été également si un adulte a violé votre intimité de façon répétée - en vous observant lorsque vous preniez votre douche, par exemple. Votre agresseur peut encore avoir combiné violence sexuelle et violence affective. En se moquant de la taille ou de la forme de votre pénis, par exemple, cette personne peut vous avoir causé autant de tort que si elle vous avait touché.

Comment savoir si j'ai été victime de violence sexuelle lorsque j'étais enfant ?

Certains ont des souvenirs précis d'expériences de violence sexuelle et sont capables de décrire exactement les actes commis par leur(s) agresseur(s). Chez d'autres, ces souvenirs sont confus ou même inexistants. Lorsque l'agression a été particulièrement douloureuse ou humiliante, il arrive qu'on l'oublie presque totalement pour préserver son équilibres mental. Certaines réactions physiques ou certains comportements révélateurs de cette expérience peuvent cependant se manifester, même en l'absence de souvenirs précis. Ces réactions sont appelées des indicateurs. En portant attention aux indicateurs physiques, comme les vomissements et les réminiscence ou aux indicateurs comportementaux, comme les comportements bagarreurs, on arrive parfois à se souvenir plus facilement de certains détails d'une agression.

Un conseiller peut vous aider à interpréter ces indicateurs :

1. Confusion au sujet de l'identité sexuelle. Il peut arriver que vous ayez du mal à déterminer si vous êtes hétérosexuel, homosexuel ou bisexuel. Peut-être est ce parce que vous établissez inconsciemment un lien entre l'agression dont vous avez été victime et votre sexualité.

On ne sait pas vraiment comment se forme l'identité sexuelle. Par contre, on sait que l'agression sexuelle n'est qu'un facteur parmi d'autres qui influent sur l'orientation sexuelle. Ce n'est ni l'identité sexuelle de votre agresseur, ni ce qu'il ou elle vous a fait, qui peut déterminer votre orientation sexuelle indépendamment d'autres facteurs. Si vous vous êtes senti à la fois « excité » et dégoûté par ce que vous a fait votre agresseur, vous pouvez en effet avoir du mal à vous fier aux messages que vous envoie votre corps.

Par exemple, si votre agresseur a eu avec vous une relation orale, vous avez probablement éprouvé du plaisir tout en étant dégoûté par l'expérience. Que l'agresseur ait été un homme ou une femme ne change rien à la situation. Le pénis répond à la stimulation quel que soit le sexe de la personne qui le stimule.

Il n'importe donc pas de savoir si l'agresseur était hétérosexuel ou homosexuel. Tout comme le sexe de la victime ne change rien à l'affaire.

Les adolescents ou les adultes qui agressent sexuellement des enfants le font parce qu'ils sont sexuellement attirés par les enfants et ont besoin de les dominer sexuellement.

Si votre agresseur était un homme, vous pouvez avoir une peur irraisonnée des autres hommes, en particulier si vous les croyez homosexuels. Vous pouvez éviter les relations d'amitié avec les hommes et développer des relations de dépendance trop fortes avec les femmes. Cette peur des homosexuels peut se manifester par des plaisanteries anti-gays, mais aussi se traduire par une véritable persécution des homosexuels. Cette crainte irraisonnée s'appelle l'homophobie. Il faut noter par ailleurs que l'homophobie est aussi une attitude culturelle négative courante dans notre société et qu'elle n'est donc pas nécessairement un indicateur de violence sexuelle.

Certains cherchent aussi à s'affirmer sexuellement en s'engageant dans une foule de relations sexuelles éphémères et jouent les « Don Juan » en espérant ainsi se débarrasser de cette peur de l'homosexualité. Mais les conquêtes multiples, quel que soit leur nombre, ne viennent jamais à bout de ce genre d'insécurité. Et elles finissent par détruire la confiance que vos partenaires peuvent avoir en vous...

Si vous êtes homosexuel et avez été agressé par un homme lorsque vous étiez enfant, vous pouvez croire à tort, comme beaucoup d'hétérosexuels, que votre orientation sexuelle est la conséquence de cette expérience, Bien des hommes adultes, qu'ils soient hétérosexuels ou homosexuels, souffrent en effet de ce genre de confusion quant à leur identité sexuelle par suite d'un abus dont ils ont été victimes dans l'enfance. En tant qu'adulte homosexuel cependant, votre réaction à l'abus sera probablement différente.

Phil Gray, un conseiller en toxicomanie de Vancouver, travaille auprès des homosexuels qui ont été victimes du violence sexuelle dans leur enfance. Selon lui, lorsqu'ils ont été, agressés par des hommes, ces homosexuels sont

  • plus enclins que les hétérosexuels, à croire qu'ils désiraient être agressés;
  •  plus enclins que les hétérosexuels à sexualiser tout contact personnel;
  •  plus enclins que les hétérosexuels à rechercher les situations où ils sont de nouveau agressés (c'est pourquoi ils sont davantage exposés au VIH et au sida);
  • plus enclins à transformer leur homophobie en haine de soi-même au lieu de l'actualiser, comme le font souvent les hommes hétérosexuels, sous forme de harcèlement à l'endroit des gays.


La violence sexuelle constitue un abus de pouvoir.

Si votre agresseur était une femme, il se peut que vous vous soyez senti dominé et humilié en tant qu'homme au moment de l'agression. Vous pouvez vous sentir « différent » des autres du fait d'avoir été agressé par une femme, ce qui est beaucoup moins fréquent. Et vous pouvez vous sentir d'autant plus isolé et honteux. Certains, par contre, préfèrent croire que l'agression était pour eux une occasion rêvée d'avoir des contacts sexuels et pas vraiment un abus. Pour oublier la honte et le sentiment d'impuissance qu'ils ont éprouvés et pour se sentir maître de la situation, ils accumulent les conquêtes ou vont même jusqu'à commettre des viols.

2. Troubles des fonctions sexuelles. Peut-être éprouvez-vous parfois des troubles des fonctions sexuelles ? Érections douloureuses, difficulté à maintenir l'érection, éjaculation précoce, absence de désir, obsession sexuelle, tous ces problèmes peuvent être des séquelles d'un abus sexuel datant de l'enfance. Qu'ils soient hétérosexuels ou homosexuels, tous les hommes qui ont été victimes de ces abus peuvent éprouver ce genre de problèmes.

Soulignons quand même qu'il est tout à fait normal pour un homme d'éprouver à l'occasion des ennuis d'ordre sexuel : il ne faut pas en déduire automatiquement qu'il a été victime de violence sexuelle.

3. Peur de l'intimité. Si vous avez été agressé par une personne en qui vous aviez confiance et qui vous protégeait, il se peut que vous ayez du mal aujourd'hui à vous fier assez à qui que ce soit pour jouir d'une relation d'intimité à long terme. Si vous n'arrivez à fonctionner sexuellement que dans le cadre de rencontres de passage ou de relations éphémères, il se pourrait que vous ayez été agressé par un proche parent qui a exercé un pouvoir sur vous pendant longtemps. Une relation de longue durée pourrait alors vous rappeler ce genre de situation et c'est pourquoi vous l'évitez. Pour la même raison, vous pouvez avoir du mal à vous engager dans une carrière durable.

4. Toxicomanie ou mauvais usage des drogues, de l'alcool ou des aliments. Si vous abusez des drogues, de l'alcool ou des aliments, il se pourrait que ce soit pour masquer le souvenir douloureux d'un abus sexuel. Votre agresseur pourrait, par exemple, s'en être servi pour vous amener à céder à ses demandes.

Parce qu'on peut en abuser, ces substances peuvent empêcher la guérison. Les programmes du genre Alcooliques Anonymes, qui viennent en aide aux personnes qui abusent de drogues ou souffrent de troubles de l'alimentation, peuvent s'avérer de précieux compléments au counseling en matière de violence sexuelle.

5. Autodépréciation, remise en situation d'agression ou agression d'autrui. Lorsqu'on se sent dévalorisé par suite d'une agression dont on a été victime, il arrive que l'on retourne ses sentiments négatifs contre soi-même. Certains se blessent ou se brûlent volontairement : c'est de l'automutilation. D'autres se masturbent si souvent qu'ils se sentent encore plus honteux.

On peut aussi rechercher les situations où l'agression risque de se répéter, soit au sein d'une relation où l'on subit des agressions affectives, soit dans le cadre de rapports sexuels où l'on joue un rôle masochiste.

Il arrive aussi qu'on s'en prenne à une personne plus jeune et moins forte pour l'agresser à son tour.

Si vous vous rendez compte que vous avez tendance à reproduire le comportement de votre agresseur en abusant vous-même des enfants, demandez de l'aide sans tarder, car vous risquez de faire du tort à d'autres personnes.

6. Anxiété, perte de mémoire, réminiscences et cauchemars. Si vous avez des crises d'angoisse ou de panique inexpliquées et devez recourir à des médicaments pour contrôler certaines émotions qui vous assaillent, peut-être est-ce parce que vous revivez le même genre de sentiment de panique que vous avez ressenti lorsque vous avez été agressé sexuellement.

Si vous oubliez souvent le contenu de conversations que vous venez d'avoir, certaines tâches qu'on vous a confiées au travail ou des rendez-vous personnels, ces oublis pourraient être le fait de pertes de mémoire périodiques. Peut-être avez-vous appris à chasser ainsi certaines choses de votre conscience lorsque vous étiez victime de violence sexuelle pour vous protéger contre la douleur.

Les réminiscences sont des images intempestives reliées à la violence sexuelle dont on a été victime qui apparaissent soudain à l'esprit. Ces images peuvent survenir aux moments les moins opportuns : lorsque vous faites l'amour, par exemple. Si c'est le cas, c'est probablement parce que l'excitation sexuelle réveille en vous certains souvenirs reliés à l'agression sexuelle.

Certaines personnes ont aussi des cauchemars récurrents qui leur rappellent d'une façon ou d'une autre l'agression dont elles ont été victimes. Un conseiller vous encouragera à vous souvenir de vos rêves et même à les noter par écrit : les rêves peuvent en effet aider à retrouver certaines émotions associées à une agression.

7. Colère. Certains hommes estiment qu'à titre de mâles, ils ont le droit d'exprimer et de concrétiser leur colère et jugent ce genre de comportement plus « sain » que celui des femmes victimes d'agression, qui répriment souvent leur colère et sombrent dans la dépression. Mais lorsqu'on ne ressent que de la colère, c'est parfois parce qu'on refoule d'autres émotions, le plus souvent de la honte, de la peur et de la solitude. La colère peut aussi éloigner de vous certaines personnes qui, autrement, pourraient vous aider. Un conseiller peut vous aider à comprendre les raisons de votre colère et à éprouver des émotions plus « douces », et vous amener aussi à éprouver de la peine ou de la peur sans craindre de craquer.

8. Honte. Si vous avez été victime de violence sexuelle lorsque vous étiez enfant, vous partagez avec toutes les autres victimes d'abus, hommes et femmes, le même sentiment sous-jacent : la honte. La honte est un profond sentiment de dévalorisation de la personne. Votre agresseur peut vous avoir privé du soutien des personnes que vous aimiez en vous obligeant à garder le secret. Il peut aussi vous avoir dit que personne ne voudrait plus vous fréquenter si l'on apprenait ce que vous avez fait.

La honte est aussi associée au fait que la victime se sent responsable en partie de l'agression. Souvent, en effet, l'agresseur persuade l'enfant qu'il désire se soumettre à sa volonté. Il peut, par exemple, convaincre un adolescent qu'il lui faut apprendre à « exprimer ses sentiments à l'endroit des personnes du même sexe que lui », à « affirmer son autonomie sexuelle » ou à « explorer sa sexualité ». Si c'est votre cas, il se peut que vous ayez honte aujourd'hui de vous laisser aller à partager ce genre d'opinions.

La première étape de la guérison consiste à admettre que l'on a peut-être été victime de violence sexuelle autrefois.

Vous pouvez, par exemple, craindre d'éprouver encore plus de honte en parlant de l'agression à un conseiller ou à quelqu'un d'autre. La honte peut vous isoler des autres dans votre vie adulte. La participation à un groupe de soutien, où vous pouvez parler de votre expérience et écouter d'autres personnes parler d'expériences similaires, peut vous aider à surmonter votre honte et à vaincre le sentiment d'isolement qui l'accompagne.

Il est particulièrement important de faire face à ce sentiment de honte à cause de « l'effet boule de neige » qu'il peut avoir. Cet effet se manifeste chaque fois que vous faites un geste relié à l'agression, comme le fait de boire ou de vous prostituer : ces comportements ne font qu'accroître encore votre honte.

9. Culpabilité. Associée à la honte, la culpabilité vient de ce que l'on se croit responsable de la violence dont on a été victime. Peut-être, par exemple, vous sentez-vous coupable parce que vous avez accepté des cadeaux ou de l'argent de la part de l'agresseur. Il faut pourtant vous rappeler que cela s'est passé alors que vous étiez enfant : les adultes sont censés protéger les enfants et non abuser d'eux. Vous n'êtes pas responsable de ce qui s'est passé.

10. Symptômes physiques. Une foule de symptômes physiques peuvent être reliés à une expérience de violence sexuelle vécue pendant l'enfance. Les maux de tête fréquents, sensations d'étouffement, nausées en présence de certaines odeurs vision trouble, sensations de flottement ou douleurs au niveau des organes génitaux, des fesses ou du dos, peuvent être des symptômes reliés à une agression sexuelle dont vous auriez été victime autrefois. Si votre médecin n'arrive pas à trouver de cause médicale à ces symptômes, votre conseiller pourrait peut-être vous aider à comprendre ce qui se passe.



Que puis-je faire pour obtenir l'aide dont j'ai besoin ?


La première étape consiste à admettre que l'on a peut-être été victime de violence sexuelle autrefois. Si vous ne pouvez mettre le doigt sur un souvenir particulier, mais présentez certains indices, vous vous devez de pousser un peu plus loin votre investigation. Peut-être avez-vous du mal à admettre qu'une autre personne ait pu vous dominer à ce point. Peut-être même croyez-vous que le fait d'avoir été agressé fait de vous un lâche. C'est là une attitude erronée, héritée des vieilles structures patriarcales de notre société, qui valorisent le pouvoir, associé à la virilité, et dévaluent la vulnérabilité, associée à la « faiblesse » et à la féminité. Le déni est à lui seul le principal obstacle qui empêche d'obtenir de l'aide. Et, à cause, des valeurs qui prédominent dans notre société, il est habituellement plus enraciné chez les hommes que chez les femmes.

C'est pourquoi il faut du courage pour admettre que l'on a été victime de violence sexuelle. Mais une fois cette étape capitale franchie, il reste encore à trouver un conseiller ou un groupe de soutien, ou les deux. La meilleure façon de faire est de demander à des gens en qui vous avez confiance de vous en recommander un. Lorsque cela est impossible, vous pouvez communiquer avec des associations professionnelles de counseling, qui vous donneront le nom de personnes qualifiées qui s'occupent des victimes de violence sexuelle. Vous pourrez alors faire votre choix et trouver un conseiller avec qui vous vous sentirez assez à l'aise pour travailler.

Le counseling individuel prolongé peut coûter cher, à moins de pouvoir consulter un psychiatre dans le cadre d'un régime d'assurance-maladie provincial. Dans certaines provinces, lorsqu'on porte plainte contre un agresseurs on est parfois admissible au counseling auprès d'un psychologue, d'un conseiller clinique ou d'un travailleur social clinique qualifié par l'intermédiaire d'un programme d'indemnisation des victimes d'actes criminels. Si vous ne pouvez porter plainte, informez-vous si votre régime d'assurance-maladie complémentaire ou le programme d'aide aux employés de l'endroit où vous travaillez rembourse les frais de counseling. S'il vous est impossible de consulter un conseiller, le groupe de soutien pourrait être une bonne alternative.

 

En quoi consiste l'intervention du conseiller ?
 

Une fois que vous avez avoué avoir été victime de violence sexuelle dans votre enfance à votre conseiller, vous avez franchi une nouvelle étape importante vers la guérison.

Toutefois, cet aveu comporte parfois encore une part de déni. Cela se remarque aux caractéristiques suivantes :

1. on admet qu'il y a eu agression, mais on se dit que cela n'a pas vraiment eu de répercussions;

2. on parle de l'agression sur un plan strictement intellectuel, abstrait ;

3. on insiste sur les aspects positifs de sa relation avec l'agresseur en excusant en partie son comportement.

Un conseiller vous aidera à mettre de l'ordre dans vos idées : une fois que vous aurez complètement cessé de nier les faits, vous entrerez plus facilement en contact avec vos émotions douloureuses.

Vous pourrez alors vous attaquer sérieusement au traumatisme de l'agression de façon à en éliminer les effets négatifs sur votre vie.

Votre conseiller vous interrogera probablement sur certains indicateurs, comme l'abus d'alcool, les réminiscences et les cauchemars. Cela peut en effet vous aider à mettre au jour d'autres détails au sujet de l'agression. Le fait de se rappeler ces détails et les émotions que l'on a ressenties à l'époque peuvent s'inscrire dans le processus de guérison. Mais votre conseiller vous invitera sans doute à ne pas aller trop vite, car un afflux trop abondant et trop rapide de souvenirs peut être perturbant. N'hésitez pas à le lui dire lorsque vous avez besoin de temps pour comprendre et pour assimiler ce que vous vivez. Votre conseiller peut aussi vous recommander de lire certains ouvrages sur le sujet. Il peut aussi vouloir rencontrer votre conjointe ou votre partenaire pour lui suggérer diverses façons de vous aider à guérir. Il peut enfin vous recommander de vous inscrire à un groupe de soutien pour victimes de violence sexuel1e.

La relation que vous avez avec votre conseiller est un partenariat. Vous décidez ensemble des sujets à aborder et du moment opportun pour ralentir le rythme des séances ou y mettre fin. Si vous n'êtes pas satisfait de votre conseiller, vous avez le droit de changer.



Quel genre de questions les survivants de la violence sexuelle posent-ils à leur conseiller ?



« J'ai bien entendu parler de garçons de cinq et six ans qui se faisaient agresser, mais moi, j'en avais dix quand mon directeur m'a demandé de lui faire l'amour oral dans la papeterie de l'école. N'étais-je pas assez vieux pour savoir ce que je faisais ? N'aurais-je pas dû l'envoyer promener ? »

L'âge n'a rien à voir, c'est uniquement de pouvoir qu'il s'agit ici. Les garçons qui dépendent affectivement ou financièrement d'un adulte ou d'un adolescent sont vulnérables à la violence sexuelle.

« J'avais dix-huit ans et j'étais en première année au collège. Au cours d'une soirée, le Dr Adams m'a demandé de lire un texte que j'avais écrit. Tout le monde a levé son verre en mon honneur. J'étais tellement fier que cela m'est monté à la tête. C'était la gloire ! Tout ce dont je me souviens ensuite, c'est de m'être réveillé dans un lit aux côtés du Dr Adams profondément endormi, sa main entre mes jambes. Moi qui étais assez âgé et assez brillant pour être au collège, n'aurais-je pas dû me rendre compte de ce qui se passait ? »

Un professeur occupe une position de pouvoir et peut facilement séduire ses élèves. Les adolescent, qui sont victimes d'abus sexuels ont encore plus honte et se sentent encore plus coupables que les jeunes garçons. Ils ont beaucoup de mal à signaler qu'ils ont été agressés et souvent, lorsqu'ils se décident à le faire, on ne les croit pas. Même devenus des hommes, les garçons dont les propos sont rapportés ci-dessus se sentaient toujours responsables de leur malheur et en éprouvaient de la culpabilité.

Votre conseiller devra probablement vous rappeler plusieurs fois que vous n'êtes ni responsable, ni coupable de l'abus dont vous avez été victime.

« J'avais treize ans et j'étais membre de l'équipe de basket-ball de septième année à l'école. Un jour, après un match, le principal m'a caressé. J'en ai parlé à mon oncle Georges et il m'a dit que le principal était une tapette. Est-ce possible ? Pensez-vous que j'ai fait quelque chose pour l'attirer ? »

L'orientation sexuelle n'a rien à voir avec la violence sexuelle. Qui plus est, ce n'est pas une caractéristique propre à votre personnalité qui vous rend responsable de l'agression. Les agresseurs sont des gens qui exercent leur pouvoir sur des enfants parce que ceux-ci sont petits et sans défense. À cet égard, la réponse de l'oncle Georges est tendancieuse et témoigne de ses préjugés à l'égard des homosexuels.

Un conseiller devra probablement vous rappeler plusieurs fais que vous n'êtes ni responsable, ni coupable de l'abus dont vous avez été victime.

« Quand monsieur Martin m'a agressé au camp d'été, je me suis senti totalement dévalorisé. L'autre jour, une femme que je connais et qui a été agressée sexuellement par son beau-père pendant cinq ans m'a confié qu'elle avait ressenti exactement la même chose. Les hommes et les femmes victimes de violence sexuelle ressentent-ils les mêmes choses ? »

En règle générale, oui. Ils éprouvent tous le même sentiment de honte, d'isolement et de dévalorisation. Ils présentent aussi beaucoup des mêmes indicateurs. Toutefois, à cause d'un conditionnement social différent, les hommes réagissent parfois différemment. Les hommes sont en effet beaucoup plus susceptibles de donner libre cours à leur colère, d'adopter des comportements anti-homosexuels et de devenir à leur tour des agresseurs sexuels. Les femmes retournent plus souvent leur colère contre elles-mêmes et continuent à être victimisées dans leurs relations adultes.

« Alors, si j'ai été agressé sexuellement lorsque j'étais enfant, vais-je tôt ou tard finir par m'en prendre moi aussi aux enfants ? L'autre jour, j'ai observé deux enfants qui jouaient dans un parc. Lorsque je me suis mis au lit, le soir, je me suis masturbé en pensant à eux. Ça me rend complètement malade. »

De nombreux adultes et adolescents condamnés pour violence sexuelle ont en effet eux-mêmes été agressés sexuellement lorsqu'ils étaient enfants. Il ne s'ensuit pas automatiquement que tous les garçons agressés sexuellement deviennent à leur tour des agresseurs. Vous pouvez avoir des pensées troublantes au sujet d'enfants de temps à autre ; l'apparition de fantasmes sexuels est certes un avertissement. Il est important de prendre conscience de ces sentiments et de ces fantasmes et d'en discuter avec un conseiller pour vous assurer que vous n'éprouverez pas le besoin de vous défouler en passant à l'acte.

« Quand j'avais huit ans, ma gardienne m'a fait mettre mon pénis dans son vagin. On ne peut certainement pas parler ici de violence sexuelle : au contraire, cela m'a permis d'être initié longtemps avant les autres et, encore aujourd'hui, je fais un malheur auprès des femmes plus âgées. Le mois dernier, par exemple, dans un congrès, l'une d'elle m'a invité à monter dans sa chambre à l'hôtel et m'a offert de l'argent pour que je la baise. Qu'y a-t-il de mal là-dedans ? »

Dans nos sociétés, les hommes sont conditionnés à considérer toute expérience sexuelle avec une femme comme « une bonne affaire ». Les jeunes garçons agressés sexuellement par des femmes ou des adolescentes nient en général avoir été abusés, utilisés et humilies. Il arrive même qu'ils exploitent cette expérience pour se donner de l'importance, sans comprendre, à quel point elle perturbe aujourd'hui leurs relations d'adulte.

« Combien de temps ces séances de counseling doivent-elles durer ? Je veux en finir au plus vite et reprendre une vie normale. »

Comme la plupart des hommes, vous avez probablement été conditionné à agir et à obtenir des résultats rapidement. Mais on ne traite pas une agression sexuelle de la même façon qu'on tond le gazon ou qu'on règle une affaire commerciale. Le changement personnel demande du temps et si vous avez été victime à la fois de violence physique et affective, il vous faudra travailler sur ces deux tableaux.

« Il y a autre chose..., un détail important dont je n'arrive pas à me souvenir. Pouvez-vous m'hypnotiser ? »

Ce genre de demande est faite par ceux qui pensent que la clé de leur problème se trouve juste sous la surface et qu'il s'agit de mettre le doigt dessus pour être instantanément guéri. Comme les questions précédentes, cette demande découle du désir, fréquent chez les hommes, de régler rapidement le problème. À mesure que vous travaillerez avec votre conseiller, vous commencerez à mieux comprendre la valeur du changement progressif.
 

L'histoire de Richard

Richard s'est adressé à un conseiller sur les conseils du curé qui, après avoir discuté quelque temps avec lui, le soupçonnait d'avoir été victime de violence sexuelle dans son enfance. Richard souffrait de sueurs nocturnes et se réveillait souvent dans des draps complètement trempés, parfois même en criant après avoir rêvé qu'un énorme animal l'attaquait. C'est sa femme qui l'avait imploré d'aller parler au curé, affligée de cette habitude qu'il avait d'interrompre l'acte sexuel avant d'atteindre l'orgasme. Richard se plaignait souvent de douleurs au pénis pendant les rapports sexuels et préférait les éviter.

Marié, Richard a eu trois brèves aventures homosexuelles dans lesquelles il jouait le rôle passif. Ces épisodes le remplissaient de honte et il se sentait indigne de son mariage. Sa femme, craignant qu'il contracte le sida et le lui transmette, menaçait de le quitter s'il recommençait.

Grâce au counseling, Richard a pu raconter qu'il avait passé la majeure partie de son enfance avec sa mère et ses cinq frères et soeurs dates un petit village de bûcherons. Après la séparation de ses parents, sa mère s'était mise à boire et avait eu plusieurs relations de courte durée. Certains de ses amants étaient violents avec elle et avec ses enfants. L'un d'eux, un travailleur de la scierie nommé Vincent, était non seulement alcoolique et violent, mais aussi pédophile.

Les enfants ne savaient jamais quand Vincent allait venir et vivaient dans un état de terreur permanent. Richard s'est rappelé comment Vincent, ivre, montait dans son lit et le masturbait avant de sombrer dans le sommeil.

À mesure que ses souvenirs remontaient à la surface, les symptômes et les comportements de Richard ont pris un sens nouveau. Ses sueurs nocturnes, ses cauchemars, ses douleurs au pénis, sa crainte des relations sexuelles et ses aventures homosexuelles étaient vraisemblablement associés à l'agression dont il avait été victime. Le conseiller a demandé à Richard de venir avec sa femme pour une séance, afin d'expliquer à celle-ci le rapport qu'on pouvait établir entre les symptômes de son mari et l'agression dont il avait été victime dans son enfance, et de lui suggérer divers moyen de l'aider.

Par ailleurs, il a recommandé à Richard de s'inscrire à un groupe de soutien. Parce qu'il avait vécu si longtemps seul dans un petit village, isolé de ses frères et soeurs à cause de la honte que lui inspirait les agressions dont il avait été victime, Richard a trouvé son expérience en groupe particulièrement profitable. Il a enfin pu s'exprimer librement parce qu'il savait que les gens qui s'y trouvaient le comprenaient.

Il a fallu a Richard beaucoup de temps pour guérir. Mais avec l'aide de son conseiller, de son groupe de soutien et de sa femme, ses symptômes ont progressivement disparu. Bien sûr, les cauchemars reviennent à l'occasion, mais quand il se réveille, Richard comprend maintenant d'où ils viennent et peut plus facilement se rendormir. S'il est encore craintif sur le plan sexuel, sa femme ne tarit pas d'éloges à propos de leur « nouvelle relation ». Leurs enfants perçoivent d'ailleurs le changement et sont aujourd'hui beaucoup plus détendus en présence de leurs parents.

C'est à vous de décider: pardonner ou ne pas pardonner. Les deux options sont légitimes.



Quelle attitude adopter vis-à-vis de l'agresseur ?



Il peut être difficile de décider des démarches à entreprendre vis-à-vis de votre agresseur, mais vous devrez prendre une décision. Voici quelques possibilités:

1. Les accusations au pénal. Vous pouvez porter des accusations au pénal contre votre agresseur. La première chose à faire est alors de signaler le cas à la police. Les autorités policières porteront la question à l'attention d'un procureur de la Couronne, qui décidera si les preuves sont suffisantes pour porter la cause devant un tribunal provincial ou fédéral. Le succès de la poursuite peut être facilité par la présentation de preuves corroborantes (des photographies prises par l'agresseur, par exemple) ou de preuves de faits similaires (des renseignements fournis par d'autres victimes).

Le fait de porter des accusations au criminel a l'avantage de faire porter le fardeau de la poursuite au bon endroit, soit sur la société dans son ensemble. Il est en effet contraire à la loi d'abuser sexuellement des enfants : c'est donc un crime contre la société en plus d'être un crime contre votre personne. Porter des accusations au criminel est également un moyen de canaliser sa colère de façon constructive, en obtenant justice. Par contre, le recours aux tribunaux demande souvent beaucoup de temps et peut se révéler très frustrant.

Vous pouvez aussi poursuivre votre agresseur au civil. Cela peut être plus facile, car la norme de preuve y est moindre qu'au criminel. Si le juge rend sa décision en votre faveur, votre agresseur pourrait alors devoir vous dédommager en argent, ce qui vous aiderait à payer votre thérapie et vous indemniserait pour les heures de travail perdues à cause des répercussions de l'agression.

2. La confrontation de l'agresseur. Certains peuvent être tentés de trouver leur agresseur et de lui dire face à face ce qu'ils pensent de lui. Cela peut cependant se révéler plus difficile qu'il n'y paraît, surtout si, une fois en face de lui, vous retrouvez soudainement vos sentiments de petit garçon impuissant que vous étiez autrefois. Il peut être satisfaisant de lui signifier de vive voix à quel point ses actes ont été dévastateurs, mais on risque aussi de se trouver face à quelqu'un qui nie les faits ou qui les trouve insignifiants. Il faut donc prévoir les réactions possibles de l'agresseur.

3. La revanche. Certains caressent l'idée d'attaquer et de battre leur agresseur. Si on peut se sentir justifié d'exprimer ainsi sa colère, on risque par contre d'en payer cher les conséquences. On risque notamment d'aggraver encore ses problèmes psychologiques ou même d'aboutir en prison...

4. Le pardon. On peut aussi choisir de pardonner à l'agresseur dans le cadre du processus de guérison... ou de ne pas lui pardonner, parce que son geste est trop grave, parce qu'il a trahi un pacte de confiance et parce qu'il ne s'en repent pas. Certaines personnes de votre entourage peuvent insister auprès de vous pour que vous pardonniez à votre agresseur. Mais un pardon prématuré peut accroître encore la culpabilité et bloquer le processus de guérison. Si vous n'arrivez pas à pardonner à votre agresseur, vous pouvez toujours vous dire qu'il obtiendra le pardon du dieu auquel il croit. C'est à vous de décider : pardonner ou ne pas pardonner. Les deux options sont légitimes.

5. L'oubli. Vous pouvez décider de ne rien faire au sujet de l'agresseur pour le moment et choisir de concentrer tous vos efforts à votre propre guérison. L'oubli n'est pas le pardon. Après vous être occupé de vous-même pendant un certain temps, peut-être déciderez-vous d'entreprendre quelque chose...

Sans doute voudrez-vous discuter de ces diverses options avec votre conseiller, votre partenaire ou un ami, mais n'oubliez jamais que c'est à vous-même que vous devez être fidèle. La décision finale vous revient de plein droit.


Que dois-je dire à ma ou à mon partenaire ?


Si vous êtes membre d'un couple, votre partenaire peut être pour vous une précieuse source de soutien. Par soutien, on entend la capacité de partager la douleur, de donner de l'amour, d'encourager et d'appuyer les décisions. Mais ne prenez pas votre partenaire comme conseiller ! Cela exerce en effet une pression beaucoup trop forte sur la relation. Et il est peut-être aussi abusif, sinon impossible, de demander à votre partenaire de vous donner un avis objectif. Cherchez soutien et réconfort auprès de votre partenaire et demandez plutôt conseil à votre conseiller.

Il est important de raconter à votre partenaire ce que vous vivez et ce que vous avez vécu. Cela peut cependant créer certaines tensions... qui peuvent par contre être profitables. Si votre partenaire a également été victime de violence sexuelle, vous risquez ainsi de lui rappeler de pénibles souvenirs ; mais vous pouvez alors profiter de l'occasion pour consulter un conseiller tous les deux et essayer de guérir ensemble. En exprimant en même temps les mêmes besoins affectifs, vous risquez aussi de mettre votre relation à rude épreuve ; pour vraiment s'aider, chacun doit être capable de dire à l'autre quand il a besoin d'aide, quand il est en mesure de donner de l'aide et quand il a besoin d'être seul.



Peut-on guérir de la violence sexuelle ?
 

OUI, mais il faut voir cette guérison comme un processus et non comme un projet aboutissant à un résultat final. On ne peut espérer atteindre un moment de grâce où, comme par magie, tous les problèmes s'évanouissent et le bonheur s'installe en permanence. Il est plus probable qu'à divers stades de votre vie, de nouvelles questions surgiront qui vous inciteront peut-être à retourner voir un conseiller pendant quelque temps.

La guérison se manifeste plutôt par une diminution des symptômes liés à l'agression sexuelle, par un accroissement de l'estime de soi, et par l'instauration de relations plus satisfaisantes avec les autres. Vous aurez davantage l'impression de maîtriser votre destinée. En d'autres mots, au lieu de laisser le traumatisme de l'agression guider votre vie, vous prendrez vous-même les affaires en main. Vous pouvez certes mener une vie heureuse !

La guérison peut ressembler à ce qui est arrivé à Richard. Richard a vu ses symptômes pratiquement disparaître, sa relation avec sa femme s'est améliorée, et ses enfants sont moins anxieux. Ce n'est peut-être pas le bonheur total, mais c'est tout de même mieux que l'enfer dans lequel il vivait avant sa guérison.