L'inceste, ça peut être doux, brutal, poli, grossier, joueur ; mais cela reste une violence.
On a abusé de moi de manière "douce". Ça prenait la forme d'un jeu, mais l'un des joueurs ne connaissait pas toutes les règles. C'est un secret qu'on impose à ce joueur à travers des manipulations. Ce sont des questions qui se créent au fil des années et une remise en question totale de ce qui s'est passé. Était-ce vraiment de la manipulation ? Me voulait-il vraiment du mal ? Ai-je interprété des gestes ? L'inceste, c'est garder le silence pour protéger son entourage. C'est pâtir de quelque chose que vous n'avez pas demandé, tout en préservant le statut et la situation confortable de l'agresseur. C'est ne jamais pouvoir évoquer ce sujet avec vos proches, que vous continuez d'aimer et de fréquenter. C'est vivre dans le doute, dans la méfiance, dans la haine, dans la rancœur, sans pouvoir l'expliquer aux autres. C'est subir les reproches de cette mésentente. L'inceste, c'est ne pas être reconnue comme victime parce qu'on n'en parle pas. C'est passer des années à vivre avec ce souvenir dans la tête et les conséquences qu'il a engendrées sans en avoir conscience. C'est penser qu'on a peut-être un rôle là-dedans et qu'on l'a voulu, parce que ce n'est pas représenté parmi les crimes sexuels dans les médias. L'inceste, c'est le plus grand déni produit par ceux qui devraient prévenir et protéger leur population. Je n'ai pas été protégée mais lui le sera à jamais grâce à mon silence. Ce n'est pas de ma faute.