Aujourd'hui est un grand jour pour moi, j'ai décidé de partager mon histoire afin que celle-ci puisse aider tous ceux et celles qui la lise, mais j'ai aussi décidé de me libérer la parole.
Elle commence comme ceci : Je m'appelle A*, j'ai 6 ans et mon frère et moi sommes en vacances chez papi et mamie. J'adore mon grand frère, à l'école il me protège, à la maison nous jouons et nous chamaillons ensemble. Nous faisons comme on dit les "400 coups". Il est mon exemple et mon repère, je l'aime très fort. Maman est agent de soins en maison de retraite, donc très prise par le travail, et nous n'avons pas de papa. Enfin, en toute logique si, mais celui-ci n'est plus dans notre vie étant donné que c'était un homme violent et alcoolique qui se ruinait aux jeux d'argent. Donc, souvent, on reste soit tous les deux à la maison, soit chez nos grands-parents.
Ce matin, papi et mamie sont partis faire les courses, ils ont dit qu'ils reviendraient très vite- dans moins d'une heure - je décide donc de jouer toute seule dans ma chambre, à prendre le thé avec mes petites peluches. Mon frère toque à la porte, et passe sa petite tête d'enfant de 10 ans : - Tu fais quoi ? me demande-t-il - Je prends le thé, tu veux jouer avec moi ? - Oui, je m'ennuie tout seul. Tu veux bien me faire un câlin ? Je me lève et lui fait donc son câlin toute contente d'être dans les bras de mon frère. Il me demande à nouveau : - Tu veux bien me faire un bisou ? Je lui fait donc un bisou, mais je remarque que mon frère ne veut pas me lâcher et a un regard très bizarre envers moi. Tout d'un coup, il s'allonge en me gardant de force et me dit : - Embrasse moi sur la bouche, comme les grands. Je le fis, et lui demande : - Tu veux aller jouer dehors ? Il se relève, et me dit : "Non mais viens, on vas jouer dans la chambre en haut". Ce à quoi, sans me douter de ce qui m'attendait, je le suis jusque dans la chambre d'en haut. Il m'ordonne de m'allonger - je m'assieds. Puis il commence à me déshabiller, et à m'embrasser. J'ai peur, je ne sais pas quoi faire tout s'embrouille dans ma tête. Mais c'est mon frère, il ne me ferai jamais de mal, mais je ne me sens pas bien, je me mets à pleurer. - Non je n'aime pas ton jeu. Je finis nue, il est au dessus de moi, il m'agrippe les jambes et tout en me regardant dans les yeux il me dit : "Tu sais comment papa et maman nous ont fait ?". - Non, Non je ne veux pas. Arrête. lui répondit-je en pleurant. De là, je ne me rappel plus que de l'après. Je suis au bord du lit, avec des griffures sur les jambes et je me rhabille la tête complètement vide. Mon agresseur est là, à côté de moi, en larmes. - Pardon, Pardon, Pardon, s'exclame-t-il, je suis désolé. S'il te plait, ne le dit pas à maman, ni à papi ni à mamie. Et il pleure encore et encore. "Mais ce n'est pas grave." Cette phrase que j'ai pu lui dire. Cette fameuse phrase. Aujourd'hui je la regrette. Nous redescendons en bas, il se tourne vers moi : "Tu me promets de n'en parler à personne, c'est notre secret d'accord ?" Ce à quoi je répond, toutes larmes séchées : "Mais de quoi tu parles ?" En vérité je n'ai jamais oublié, sauf l'acte de la pénétration, mais je savais ce qu'il s'était passé.
Le temps passe, je grandis et cet évènement repasse en boucle dans ma tête : Heure après heure, seconde après seconde, chaque jour à chaque instant. Mon enfance a donc pris fin à mes 6 ans. Elle m'a été volée, et je brûle intérieurement. Les années passent, et je me tais, personne ne sait rien. Mon agresseur et moi, ne jouons plus ensemble, sauf dans de rares cas, mais nous restons chacun de notre côté. Je brûle. Le temps passe - Je m'accroche. Puis j'atteins l'âge légal - 16 ans -, pour avoir des rapports, et ma première fois, a été un véritable obstacle à surmonter. Ce fut comme un électrochoc, je n'avais jamais oublié mais le fait d'avoir déjà connu cette sensation, m'a mis un coup. Cela ne faisait que confirmer ce qui m'est arrivé durant mon enfance. Mon corps, lui aussi, se rappelait de tout. Il n'a pas oublié. Je brûle encore plus. Le temps passe - Je me détruis.
Je grandis encore, je commence à vivre seule, et je couche avec le premier venu, sans protection. J'enchaine les infections urinaires, voir rénales - Je m'autodétruis sans en avoir réellement conscience. Pendant les rapports, je n'arrive pas à prendre du plaisir. Les souvenirs sont là. Je me consume à feu ardent. J'ai envie d'hurler, mais à la place... Je dors, je broie du noir et je ne mange que très peu. Le temps passe - Je suis épuisée. Mars 2023, j'ai bientôt 24 ans et je suis à bout. Le peu que je vois mon frère, c'est très dur pour moi d'être en sa présence et de faire comme-ci rien ne s'était passé. je ne broie plus du noir en étant seule, mais aussi en étant entourée. Quand je travaille, quand je conduis, mange, sors avec des amis, sors au ciné... Ma tête et mon corps me disent qu'ils en ont marre de subir tout ça. Je brûle si fort à l'intérieur de moi. - J'explose -
Je prends rendez-vous chez une psychologue, et aussi dur que cela est pour moi, j'explose. Je suis entrée dans son cabinet, me suis assise tremblante - très stressée -, les larmes sont montées à mes yeux, ma gorge se serrait et bloquait, j'avais si peur mais il fallait que je le dise, je me battais contre moi-même c'était insupportable, puis je le cris - Mon frère m'a violée -. J'ai réussi, j'ai réussi à le dire et je raconte tout. Et grâce à son écoute et à son soutien, aujourd'hui, j'avance avec le temps. Mon esprit est plus soulagé. Le temps passe - Je guéris petit à petit. Dr. M* m'a fait remarquer une chose intéressante : C'est que malgré ce que mon frère m'a fait subir, si je ne dis rien aujourd'hui, c'est uniquement dans le but de LE protéger. Mais à quel prix ? J'ai peur de ne pas être crue, d'être rejetée, même si au fond de moi je sais que ma famille m'entendrait. Mais je ne veux malgré tout, pas faire de mal à mon frère, mon agresseur. Et encore moins à ma mère, suite à cette révélation/bombe. Parler de l'inceste est tellement difficile. C'est tout notre équilibre familiale qui est mis en jeu. J'ai aussi appris, que le viol que j'ai subi n'était pas de ma faute. Car, oui, durant toutes ces années, j'ai considéré que j'étais responsable de ce qui m'était arrivé. Seulement, NON. NON. NON et NON. Nous victimes, ne sommes pas responsables. Oui, je regrette de l'avoir suivi, mais non, ce qui est arrivé n'est toujours pas de ma faute et ne le sera jamais. Enfant, ados ou adulte, nous ne choisissons pas ce qui nous arrive, nous le subissons. Mais aujourd'hui, même si le chemin est encore long et périlleux, je sais que je peux guérir -tout comme vous- et avancer dans la vie. Si vous me lisez, accrochez-vous. Un jour, viendra votre moment d'exploser - à votre manière-, un jour vous reprendrez votre vie en main. Un jour, vous serez plus serein(e). Faites ce qui vous semble être le mieux pour vous, ne vous forcez pas à quoique ce soit. Vous êtes libres de parler ou de le garder pour vous, et trouver une autre façon d'avancer. En aucun cas, vous êtes forcés de le dire à votre famille. Faites, ce que vous jugez être bon pour vous. Le temps passe - Je témoigne. Merci pour votre lecture.