J'ai bientôt 30 ans, et tout pour être heureuse : un mari qui m'aime, deux beaux enfants de 2 et 4 ans... Mais voilà, je suis rongée de l'intérieur par un passé qui me poursuit et que je n'arrive pas à surmonter.J'ai été abusée par mon père de 13 à 15 ans (moment auquel j'ai « fui » de chez moi sous prétexte de changer de lycée). Il me touchait, m'embrassait, me disait « je t'aime » et moi, je voulais juste lui répondre « je t'aime comme une fille aime son père »... mais j'ai jamais pu prononcer ces mots... j'ai jamais pu le repousser, lui dire non... c'était pourtant pas compliqué !
Après une période de déni, j'ai tout avoué à mon mari (à l'époque copain)... j'avais 19 ans. Il m'a conseillé de parler à mon père... de lui dire ce que je ressentais... Je voulais lui dire qu'il avait sûrement eu des moments difficiles dans la vie, que je lui pardonnais et qu'on passe à autre chose... J'ai pris mon courage à 2 mains, moi qui était plutôt peu loquace et j'ai essayé de lui parler. Là, je suis tombée de haut... il a fait comme s'il ne comprenait pas mes propos... il a rebondi sur un tout autre sujet... Son comportement m'a abasourdie et je suis tombée dans un mutisme profond... j'ai fait des crises de nerfs, mon mari m'a soutenue... et puis, il faut bien aller de l'avant... Je sais que ça s'est passé... ça fait mal de ne pas être reconnue...Tout s'est embrouillé dans ma tête... j'ai mal de ressasser tout cela et pourtant, il faut que ça sorte.
A l'époque, je voulais lui pardonner... maintenant, la donne a changé... il y a les enfants. J'ai peur pour eux... nous côtoyons encore mes parents. Ils nous demandent les enfants mais je ne peux me convaincre à leur laisser. Je ne supporte pas de voir ma fille sur les genoux de mon père. J'ai l'impression de voir son regard « pervers » posé sur ma fille...
J'ai l'impression que mon mari ne cerne pas bien l'enjeu :
- il me dit que nos enfants sont assez forts, qu'ils sauront se défendre...
mais moi aussi, j'avais un fort caractère et pourtant, je n'ai rien dit.
- Il me dit que mon père n'osera pas...
mais je pense que c'est plus fort que lui, c maladif.
- Il me dit qu'on devrait parler à mes parents pour leur dire clairement les choses...
mais j'ai déjà essayé de lui parler et il a nié. J'ai peur de me retrouver à nouveau face à un bloc de glace qui me renverrait dans mes buts en laissant entendre : « Tu hallucines, il s'est jamais rien passé ».
J'ai peur pour mes enfants...
J'ai peur de leur transmettre mes angoisses...
J'en ai marre de me pourrir la vie. J'arrive à 30 ans et j'en peux plus.
J'ai l'impression que la seule issue est de partir loin de ma famille ou (et là c'est pire) j'attends que mon père meurt pour me soulager... mais j'aimerais ne pas avoir à attendre car ça peut être encore long.
C'est dur de se dire que sa mort ne m'affecterait pas.
Et pourtant c'est la vérité...
Ce qui m'a achevé c'est d'en parler à des personnes (sage-femme) qui m'ont dit que ma mère était sûrement au courant... ça m'a achevé... tout coincide en effet... j'ai lu des témoignages, des livres... ça a l'air assez fréquent et ça m'achève car elle me renvoyait sans cesse dans la gueule du loup : "va faire un bisou/calin à ton père..."
Comment peut-on ne pas protéger son enfant ?
accepter de ne plus rien donner à ton père
accepter de ne plus rien attendre de ton père, et certainement pas sa reconnaissance
quant à ta mère, comme d'autres : sous dépendance de ton père. Et oui : des parents ne protègent pas leurs enfants...
partir loin, oui, mais quand le moment sera venu, quand tu sauras que c'est "ta" solution.
courage pour la suite, sourage