Maternité, pansement temporaire
Témoignage
Publié le 25.12.2009
Pour revenir sur ma maternité (voir le sondage en cours) : ça a été un moyen de clouer le bec à mes parents sourds à ma souffrance.Leur montrer ce qu'ils voulaient voir : une fille NORMALE, et pas cette pauvre chose qui leur avait affirmé, timidement, 10 ans plus tôt, que son frère, leur fils, avait abusé d'elle. Une façon de continuer à clore, comme eux, la discussion qu'ils avaient eux-mêmes verrouillée. Sauf qu'eux m'ont incitée à mettre de la peinture sur de la rouille en fermant le débat. Je ne sais pas quand ça finira par leur éclater à la figure. Je crève de leur signifier ce que je vis depuis 35 ans, et aussi ce que je suis privée de vivre depuis 35 ans. Je crève à me dire qu'ils n'ont jamais rien compris et qu'ils ne sont pas éduqués pour comprendre ça. Je crève de rester dans mon mutisme, dirais-je le mutisme qu'ils m'ont obligée à forger de mes mains. Je crève de vouloir leur dire que je ne les aime pas.
Je crève de leur dire qu'ils m'aiment certes, mais si mal ! Je crève, aujourd'hui, en pensant que si je parle, la crise cardiaque de mon père sera MA FAUTE, une de plus. Je crève de vouloir trouver des solutions mais de ne pas en avoir les moyens, d'avoir été privée des moyens de vivre, n'ayant jamais eu, comme seule ressource, que la survie. Oui, ces propos sont violents. Il y a 15 jours, j'ai failli ne pas rentrer de mission : la peur au ventre de me jeter de désespoir sous un train. Parce que mal dans mon être, mal dans mon boulot. Et ça, c'est certainement bien plus violent que d'écrire 8 fois "je crève" en exprimant la colère de son corps souillé à jamais.