Lettre ouverte

Témoignage Publié le 11.01.2010

Fotolia_121937_SLettre ouverte aux instances politiques pour la défense des victimes de violences sexuelles psychiatrisées. En l'honneur d'Elodie. Lettre ouverte aux responsables et militants politiques pour aider juridiquement les victimes de violences sexuelles par la création d'un pôle médico-légal au sein des institutions psychiatriques publiques, para-publiques et privées.
Introduction : En 1985, j'ai fait connaissance d'Elodie X, jeune fille sémillante, brillante, très jolie, issue de l' "upper middle class" parisienne dans une clinique universitaire dénommée actuellement X. Cette jeune femme avec laquelle j'ai entretenu une liaison amoureuse m'a confié sur l'oreiller qu'elle s'était fait violer par son père avant ses 10 ans et jusqu'à sa mise à l'abri en institution psychiatrique vers ses 15 ans. Elle en est devenue psychotique.

De plus, elle a développé un hirsutisme sévère qui, à mon avis, éloignait dans son inconscient son père violeur et personnage social respecté, probablement acteur politique local.

DEVELOPPEMENT - THESE

J'ai observé et vécu comme Elodie de l'intérieur le constat terrible qui suit. A l'époque, au sein d'une institution psychiatrique même élitiste, les soignants et les victimes de violences criminelles étaient confrontés à une réalité complexe qui ressemblait à un cercle vicieux (et cela n'a pas changé d'un iota) : comment soigner et réinsérer la victime d'un père incestueux sans la réduire à la misère par vengeance dudit père au niveau financier et social et sans que le personnel hospitalier ne soit accusé de dénonciation calomnieuse et condamné judiciairement en l'absence de preuves juridiquement validables.
Dans une société en crise grave qui se judiciarise à l'américaine, les soignants sont confrontés à ce type de problèmes médico-légaux quotidiennement lorsqu'ils tentent d'aider des victimes rendues gravement malades par crimes incestueux sur leur personne. Les soignants doivent se protéger et se méfier d'une éventuelle attaque juduciaire en retour de la part de pervers criminels bien installés socialement et parfois politiquement (c'était le cas pour Elodie).

DEVELOPPEMENT - ANTITHESE

Elodie m'a confié à plusieurs reprises que "ses "médocs" ne lui faisaient rien".
Elle m'a dit également sa détresse de ne pouvoir apporter la moindre preuve juridiquement valable des violences criminelles qu'elle a subies au sein de sa famille.
Elle m'a bien expliqué sa crainte d'être considérée comme une affabulatrice, voire une perverse.
Paradoxalement, son attachement à ses parents, notamment à son père criminel et multi-récidiviste, restait profond : elle se savait entièrement dépendante, psychologiquement et financièrement, de ce père criminel.
Elle était intimement consciente que sa vie dépendait, dans tous ses aspects, d'un père criminel.

Je tiens à préciser que le parent soit-disant ignorant des actes criminels de son conjoint (la mère en l'occurence pour Elodie) est forcément manipulateur et menteur si le couple fait vie commune. Je connais la difficulté, tout comme mon épouse qui a un père violé au séminaire par un représentant du clergé, de prouver l'improuvable, les pervers criminels étant experts dans l'art de dissimuler leurs forfaits et de retourner leurs conséquences contre les victimes elles-mêmes.
Mon beau-père, aujourd'hui décédé, a été violé alors qu'il était adolescent par des ecclésiastiques pédophiles dans le séminaire franc-comtois dans lequel il faisait sa scolarité. Le silence de sa génération (il est né en 1915) sur ces questions de pédophilie homosexuelle dans l'Eglise catholique l'a conduit à une forme d'idiotisme, de désinvestissement psycho-affectif, à détruit son couple et saccagé sa famille, a rendu sa fille cadette (mon épouse) dépressive à vie et victime d'une forme plus légère qu'Elodie d'hirsutisme.
Comme par hasard, mon épouse a eu deux amies, Colette X et Isabelle X, qui ont été victimes de viols incestueux.

DEVELOPPEMENT - SYNTHESE

Ce que m'a enseigné l'expérience tragique d'Elodie, c'est qu'il pourrait être intéressant de faire collaborer les soignants des institutions psychiatriques et des experts juridiques au sein de pôles médico-légaux, afin de judiciariser, si nécessaire, ce type de crimes et, en conséquence, soulager les victimes.
Au cours de ma liaison avec Elodie, j'ai été frappé par le silence de l'institution psychiatrique sur les causes psychologiques et criminelles de son hirsutisme galopant qui la désespérait, elle qui était une beauté incontestable que son père avait dû apprécier à sa juste valeur.
J'ai constaté ses larmes et son coeur brisé, j'ai vu l'horreur qu'elle ressentait devant son miroir. Je ne l'oublierai jamais de ma vie.

CONCLUSION

Pour avoir été le témoin, par hasard, des conséquences du martyr d'Elodie, pour avoir vu dans sa vie ce que signifie d'être une victime à vie de crimes impunis, je me décide enfin à porter témoignage, d'abord pour Elodie mais aussi pour moi, puisque j'ai vécu ses atroces souffrances par le lien si cher qui nous a uni.
C'est pourquoi j'ai appris avec colère, par le quotidien "LE MONDE" en date du 24 septembre 2009 que le gouvernement souhaitait supprimer la "défenseure des enfants".
Elodie aurait bien eu besoin aussi d'une défenseure des enfants avec laquelle je dis avec Antoine de Saint-Exupéry à la fin de "Terre des Hommes" : "C'est Mozart qu'on assassine".
Thomas FROISSART VAN-MALDEREN
Créteil, le 22 11 2009

Nous en parlons
M
minotorero
Publié le 23.01.2010
Inscrit il y a 14 ans / Actif / Adhérent

merci pour voter témoignage poignant, mais même si tout ce que vous dites dans votre lettre est vrai, en ce qui concerne la défenseure des enfants, AIVI a fait passer un communiqué de presse pour se réjouir de sa disparition car elle était abolsument incompétente dans le domaine de l'inceste. Elle a été remplacée par un autre poste apparemment plus adaptée... donc, se méfier des faits isolés.... dans le cas où l'incesteur est socialement bien respecté, c'est extrêmement difficile pour la victime de dire sa vérité, c'est sa parole contre celle de l'homme bien établi et hélas, on sait de quel côté penche la société