Parcours : Prise en charge par les thérapeutes et psychologues

Témoignage Publié le 16.12.2013

altParcours thérapeutique Au moment du viol conjugal qui m’a sorti du déni et qui m’a révélé mes souvenirs d’inceste, j’étais en Irlande.  J’ai pendant un an cherché vainement un support satisfaisant, dû en plus grande partie au fait que c’est mon père médecin homéopathe qui m’a violé de bébé jusqu’à l’âge de 4 ans. Donc cela fait partie de mon traumatisme : je ne suis non seulement trahi par mon père, mais aussi par le monde médical. Dans le code pénal il y a aggravation de la peine prévue si le crime est commis par un médecin.

Comment avez-vous été pris en charge par le thérapeute ?

Quelle a été sa réaction lorsque vous avez expliqué ?

Cela correspond-t-il à ce que vous souhaitiez ou imaginiez ?

Au moment du viol, j’étais suivie par « Bray addiction team », un centre qui accompagne les proches de toxicomanes et j’ai pu, en première instance, avoir un support émotionnel et une écoute de l’équipe et du psychologue qui m’accompagnait.

Alors, pour l’accueil en urgence de l’équipe, c’était super.  J’ai pu m’asseoir, on m’a offert une tasse de thé, on est resté près de moi et ne m’a jamais laissé seule un instant jusqu’à ce que quelqu’un a voulu m’écouter.  J’étais en état de choc émotionnel et j’ai eu une écoute fabuleuse, le psychologue m’a rassuré, m’a appris une technique pour me remettre de mon choc (technique de l’hypnothérapie).  J’ai été très contente du suivi par après aussi.  J’ai pu profiter d’un massage de temps en temps, d’une écoute une fois par semaine et ils m’ont aidé à trouver une aide plus spécialisée.

Mon psychologue m’avait fait la remarque qu’il fallait porter plainte et faire des démarches juridiques, mais j’étais dans un très mauvais état et ne pouvait concevoir d’entamer tout de suite cette piste là. Pour lui, le problème de l’inceste le dépassait et il ne savait pas trop comment me conseiller ou m’aider, vu qu’il s’est spécialisé dans la toxicomanie.

Au début de mon accueil psychologique, il était convenu que des abus sexuels seraient déclarés aux autorités et comme il s’agissait d’un viol par mon ex partenaire, qui était activement impliqué dans une relation incestueuse avec sa mère, en principe ils auraient dû déclarer les faits. Mais je n’ en ai pas eu de confirmation.

Voilà pour l’accueil en centre d’aide pour la famille ou les proches de toxicomanes.

Dublin Rape Crisis Centre et le psychologue de la ville de Bray

Par ma propre démarche, j’ai pu avoir une place au Dublin Rape Crisis Centre.  Ce qui n’était pas une sinécure vu que le centre a une liste d’attente très longue.

J’ai été accueillie par une nouvelle psychologue, qui n’avait qu’un contrat  courte durée.  J’étais au courant de son statut précaire. Elle était une personne très chaleureuse, un peu incertaine, mais je comprends que dans un nouveau travail on n’est pas trop sûre de soi.  Elle m’a promis 6 sessions d’accueil d’urgence et m’avait dit qu’elle ne voulait pas faire de travail en profondeur.  Or, je m’étais plongée dans un livre d’aide aux victimes d’inceste des années 60 et j’avais une réminiscence après l’autre et ne pouvait arrêter ce flux.

Comme elle refusait de m’aider, j’ai demandé une autre psychologue.

C’est elle qui en a fait part à la directrice du centre, qui m’a donné un rendez-vous deux semaines par après.

Presque en même temps j’ai eu une consultation chez le psychologue de la ville de Bray.  Les consultations sont gratuites et c’est un homme expérimenté.  Mon psychologue du « Bray Addiction Team » était intervenu personnellement pour obtenir un rendez-vous.  Je lui avais parlé de la façon dont j’avais été accueillie au Dublin Rape Crisis Centre et il ne m’avait pas cru.  J’en étais un peu offensée, mais comme c’était un homme chaleureux aussi je me suis présentée une deuxième fois chez lui.  Il m’avait dit qu’il allait vérifier mon histoire chez le Dublin Rape Crisis centre, mais en fait il n’en avait rien fait et ne se rappelait même pas qu’il m’avait fait cette promesse-là. C’était suffisant pour moi de ne plus retourner.  Je l’ai remercié pour ses services en disant que je ne me sentais pas bien avec lui. Il m’a invité de revenir quand je voulais.

J’ai fait des démarches pour trouver de l’aide ailleurs et je me suis présentée dans un autre centre « One in 4 » où j’ai eu un entretien assez  vite.  Ils m’ont expliqué toutes les règles du contrat psychologique, ce à quoi je devais m’attendre, ce à quoi je m’engageais.  A la fin de ce premier entretien, j’ai mentionné que j’avais été accueillie par le Dublin Rape Crisis centre mais que j’étais dans une impasse avec ma psychologue.  Tout de suite le ton de la conversation a changé et au lieu d’une dame patiente, à l’écoute, calme et attentive, j’avais devant moi quelqu’un qui tout de suite m’a mis dans le banc des accusés.  « Comment j’ose me plaindre d’un service psychologique ! Comment j’ose me présenter dans leur service alors que je n’avais pas encore terminé l’autre suivi ! C’était immoral de prendre deux psychologues à la fois. » J’ai été tellement bouleversée par ce changement émotionnel et ce renversement d’attitude que je me suis encourue du bâtiment en me cognant contre toutes les portes et en me perdant dans les escaliers avec la psychologue derrière moi qui me poursuivait et essayait de m’empêcher de partir.  En me criant « Mais qu’est-ce que vous avez entendu  que je n’ai pas dit. »

J’étais en choc : une psychologue me met dans une impasse totale, me laisse sans aide (m’abandonne à mon sort, alors que j’étais noyée dans les réminiscences) et je n’ai même pas le droit ni de m’en plaindre ni de chercher une autre solution.

Le rendez-vous avec la directrice du Dublin Rape Crisis centre s’est tourné en vrai horreur.  Le local baignait dans l’encens.  Elle n’arrêtait pas de me poser et de me reposer les mêmes questions.  Apparemment, ma psychologue avait raconté de drôles de choses sur moi, car j’étais considérée comme une femme pleine de fantasmes qui devait être corrigée.  J’ai supporté cet entretien pendant au moins une heure et ai pris une telle colère que je m’en suis allée en claquant la porte.  C’était la pire des humiliations que j’ai jamais subie.  J’avais compris que la psychologue n’avait pas voulu perdre son nouveau travail et qu’elle était même amie de la directrice.  Je me suis sentie « en punition «  d’une infraction grave par la directrice du centre.

J’ai essayé une dernière fois d’avoir un suivi psychologique par le biais de mon médecin généraliste.  Elle m’avait écrit une lettre de recommandation dans le centre psychiatrique de Bray.  J’ai été accueillie par une jeune psychiatre qui tout de suite a commencé à me poser des tas de questions concernant le passé psychiatrique de toute ma famille, de l’âge et de la santé de tous ceux de ma famille, proche ou élargie, … Avant d’en venir à mon histoire personnelle, j’avais déjà répondu depuis une heure et demie à toutes sortes de questions.  On en était au viol conjugal et les faits d’inceste commis sur moi en tant que bébé.  C’était l’impasse totale tout de suite.  Elle m’avait dit que je ne pouvais prétendre des faits pareils sans preuve, que je ne pouvais accuser mon père ainsi.  Et elle a continué à me poser d’autres questions du dossier que je n’ai pas voulu répondre.

Elle s’est mise en colère. « Comment tu oses accuser ton père ainsi, sans preuve ! » Et elle est sortie en courant dans le couloir.  Deux minutes après, un autre psychiatre est entré pour me parler tout gentiment du bienfait des médicaments dans des périodes de détresse et m’a donné des prescriptions. 

Je suis retournée chez moi, hébétée.  Je n’ai jamais vu une situation si ridicule.  C’est le psychiatre qui se tappe une crise de colère et c’est moi qui dois prendre des médicaments pour cela ?  J’ai écrit à mon médecin et au centre psychiatrique que je n’allais plus me présenter, que je ne désirais plus continuer le suivi psychiatrique.  Une semaine plus tard j’ai eu une lettre impersonnelle de l’administration du centre comme quoi j’avais été convoquée.  Ils n’avaient même pas pris note de mon refus.

J’ai survécu grâce à deux jeunes femmes de la méthode Feldenkrais, qui m’ont soignée de leur façon.  Après trois mois, j’ai découvert que Feldenkrais était une personne très controversée en question de femmes, qu’il avait la réputation d’être un misogyne, et d’humilier ses patientes féminines en public.  J’en ai eu la confirmation d’un des élèves qui l’avaient connu personnellement.  Et effectivement, sur les vidéo internet, des passages ont été coupés, mais dans les commentaires les femmes qui avaient commenté toutes s’étaient indignées. Malgré le fait que Feldenkrais soit mort, j’avais perdu confiance dans sa méthode.  En quoi un misogyne pourrait-il m’aider même si sa méthode est géniale ? Le parallèle avec mon père, qui est un vrai génie – mais un mauvais génie, car il a  commis des crimes horriifiants, violant ses propres bébés, moi, mon frère, les enfants de mon frère, des patientes suicidaires ou terminales… J’ai arrêté le traitement et j’ai déménagé vers une autre ville en Irlande.

J’avais rencontré dans une autre ville un couple charmant avec un enfant.  Elle était psychologue dans un centre pour aider des victimes d’inceste et lui était médecin.  J’avais été accueillie chez eux de manière spontanée et l’échange s’était passé dans la convivialité.  Je ne lui avais pas dit tout de suite mon problème d’inceste.  Quand je lui avais écrit une carte postale avec la vérité, elle m’a répondu que le déontologie lui empêchait d’avoir des relations personnelles avec les victimes.  Soit.

J’étais seule, dans une nouvelle ville, il fallait bien recommencer.

J’ai trouvé deux femmes extra-ordinaires.  Caroline était psychologue accueillant des femmes au centre des femmes battues.  Elle était vraiment superbe : elle m’écoutait avec attention, intéressée par mes histoires, parfois incrédule, parfois en me supportant, parfois en demandant plus de détails, … C’était un vrai bijou, tel que je l’avais rêvé vraiment.  Comme une amie, qui me soutenait dans les choix que je me faisais, qui s’enquêtait de moi si je prenais trop de temps avant de revenir, juste pour voir si j’allais bien.  Elle était d’une joie de vivre merveilleux, était devenue de bénévole pour le centre professionnelle et sa passion pour le combat des femmes était dans toute sa vie et dans toute son approche.  En même temps j’ai rencontré une psychologue japonaise dans le centre de la ville qui avait une lucidité incroyable et me comprenait à un niveau existentiel.  L’entente avec elle était inconsciente, presque sans mots, mais c’était une confiance instantanée et si jolie, si merveilleuse, que j’en étais émue.  Elle ne pouvait m’aider que dans l’orientation des choses quotidiennes, mais j’étais super contente de son aide.

Avec le soutien de ces deux femmes j’ai porté plainte contre mon ex pour viol conjugal en Irlande et j’ai fait l’aller-retour en urgence en Belgique pour porter plainte contre mon père pour viol et meurtre.

J’avais demandé au centre des femmes battues de m’inscrire dans un groupe de soutien.  Pendant l’entretien individuel préalable, une des psychologues est devenue blême dès qu’elle a entendu mon histoire et m’a remis à l’atelier 9 mois plus tard.  C'est-à-dire qu’elle m’a claqué la porte. Caroline n’a pas réagi car c’était une collègue à elle, donc j’étais en quelque sorte piégée de nouveau.  Comment est-ce que je peux construire une relation de confiance avec Caroline si dans le même centre on bafoue mes droits et ma dignité impunément ?

J’ai essayé Limerick Rape Crisis Centre. La psychologue qui a donné l’entretien à l’accueil venait de perdre son père et était en deuil.  Elle était hypersensible et n’appréciait pas d’entendre encore des histoires dures et cassantes. Mais je sais que je tombe souvent au mauvais moment au mauvais endroit et que les gens et les choses pourraient être très différents.  Or, ce sont des coups durs à encaisser. Même si elle était un peu cassante à l’entretien, elle a quand même fait des démarches spéciales pour me donner un rendez-vous avec l’experte dans la ville où je vivais.  Ouf !! Enfin je vais pouvoir me soigner.  Après deux entretiens, il était clair que la psychologue n’aimait pas avoir quelqu’un d’intelligente en face d’elle.  Je n’y peux rien si je suis intellectuelle et intelligente.  J’ai essayé de lui dire que j’étais fort gênée par les anges qui étaient accrochées autour de mon fauteuil.  Une à chaque oreille.  Elle a consentie que je les enlève de mon fauteuil et que je les place à une distance acceptable pour moi.  Mais elle m’en a voulu, car apparemment les anges étaient pour elle ce qui la soutenait dans ce travail de thérapeute.  En tout cas, la semaine d’après, j’ai eu un coup de téléphone du Limerick Rape Crisis centre que j’étais refusée.

Une année sans recherche psychologique est passée.

Ma recherche a continué en Belgique. 

Bien sûr je me suis présentée d’abord au Collectif des femmes battues. Hélas, trois fois hélas.  La psychologue était étonnée que je vienne demander de l’aide au collectif.  Elle n’était pas du tout de l’avis que le collectif était un monde féministe, au contraire, le féminisme et la lutte pour la dignité de la femme c’était hors de mode et je devais oublier cela à l’heure actuelle.  C’était tout simplement mal vu.  Elle m’a renvoyé vers un service spécialiste dont je savais qu’ils ne travaillaient qu’avec des enfants et sous mandat juridique.  On s’est engagé dans une discussion si –non, elle a pris le téléphone pour demander la confirmation d’une collègue que le centre dont elle parlait travaillait bien avec des femmes victimes d’inceste adulte aussi et l’entretien était terminé.  Aucune compassion.  Aucune écoute constuctive. L’impasse. Le centre fonctionne presque comme un château médiéval, j’avais sonné trois fois sans réponses, j’avais attendu plus d’une demi heure parce qu’on m’avait oubliée, l’entretien était terminé en 30 min. Au revoir et salut.

J’ai décidé d’entamer une aide psychologique au centre de planning familial de mon quartier : leur programme pour les femmes me plaît.  Après le premier entretien, je suis toute contente car la psychologue très jeune me paraît très très compétente.  J’ai envie de travailler avec elle.  Elle m’explique les principes de la thérapie brève, me donne du travail à faire à la maison, m’accueille toujours chaleureusement et avec une écoute très lucide, qui ouvre au débat.  Elle me reformule certaines expériences et cela me fait tellement plaisir.  Mais quand elle voit que je me bats vainement pour obtenir une aide juridique, passant d’un centre à l’autre et encaissant coup sur coup, elle me dit que «  je vais me discréditer ».  Je suis à bout, luttant de toutes mes forces, c’est l’anniversaire de mon  père, je suis hyper sensible et je le prends mal qu’on me culpabilise pour les erreurs de gens incompétents et irresponsables.  Les associations d’aide qui sont supposées vous aider mais qui ne le font pas.  C’est une vraie honte.  Cela ne revient pas à moi que les gens soient ignorant, qu’ils ne savent pas de quoi ils parlent et qu’ils s’en foutent de ma démarche.

En même temps, j’ai entamé avec une psychologue connue pour accompagner les victimes adultes inceste un suivi psychologique de trois sessions.  Ce n’est pas très encourageant pour moi.  Ma psychologue se met bien à mon écoute, mais en même temps elle fait cet accueil depuis 30 ans et elle est déprimée parce qu’au niveau politique il n’y a aucun intérêt pour les victimes. Elle regroupe certaines victimes qui se voient une fois par semaine pour un groupe de parole que je rejoins.  Je suis la seule dans ce groupe à vouloir faire une démarche juridique et les autres victimes m’attaquent, me critiquent et me découragent dans cette voie-là.  Je peine, je me sens seule et mal dans ma peau.  Merde. Quand je suis refusée au bureau d’aide aux victimes avec l’excuse qu’ils ont parlé à ma psychologue et qu’ils conseillent tous que je me limite à un travail thérapeutique au lieu d’une démarche juridique, je craque.  Quoi ? Derrrière mon dos, les psychologues discutent de moi, se créent des alliances contre moi au lieu de me soutenir dans mes démarches juridiques !  Je suis indignée.  J’envoie une lettre de plainte d’abord aux deux psychologues, ensuite au directeur de l’aid aux victimes.  La psychologue du groupe de parole m’assure dans un entretien individuel qu’elle n’a pas parlé de moi, qu’elle ne le ferait jamais,  mais j’ai du mal à la croire.  Et puis, j’ai découvert un autre groupe de parole à Lille qui honore beaucoup mieux que son groupe de parole mes idées.  Je me tape 200 km aller retour pour participer au groupe de parole de Lille où j’ai droit à 2 minutes de parole par séance, mais où je me sens experte de mon problème et unie avec un groupe de gens qui luttent comme moi, souffrent comme moi, émergent et replongent, vivent enfin … A vrai dire, je n’ai pas tellement envie de retourner au groupe de parole d’avant où j’étais le point de mire des flèches des autres.

J’ai quand même essayé encore une autre psychologue, sexologue, accompagnant des victimes d’inceste depuis 30 ans.  Elle avait collaboré à un projet de théâtre sur les abus sexuels de l’église et je me confie à elle : elle me dit qu’il est sacrilège de déterrer les os de ma tante pour prouver l’inceste.  Ma tante qui n’est pas ma tante mais ma demi-sœur est l’enfant que mon père a eue d’une relation incestueuse avec sa mère.  Une analyse ADN des os de ma tante (demi-sœur) pourra révéler la paternité et donc constituer une preuve scientifique de l’inceste que mon père a subi.  Et qu’il a caché à tout le monde et perpétué. Dès que je m’approche du champ médical, je me cogne contre un mur d’impossibles et on m’accuse.  Sacrilège ? De faire une analyse scientifique des os d’une personne morte ? D’abord on m’accuse de ne pas avoir de preuve, puis on essaie de m’enlever les preuves que je pourrai avoir.  Le tribunal a classé ma plainte sans suite et mon père prépare un procès de diffamation contre moi. 

Et les psychologues ? Ils continuent à m’attaquer.  Le psychologue du centre de prévention de suicide m’avertit que je vais répéter infiniment le même cercle vicieux.  C’est un combat intellectuel que je mène contre lui mais tellement raffiné. Plus j’affirme mon estime de moi, et plus il m’attaque sur les démarches que j’ai faites dans le passé et qui se sont avouées des échecs. Plus je me sens digne et plus il me prévient que ce que je fais n’a aucune chance de réussir. J’étais venue le voir parce que le suicide de ma copine me hantait : elle s’est suicidée, oui, mais je suis en colère contre son maître de reiki qui en a fait sa maîtresse (et la responsabilité d’un thérapeute alors ?) et contre son ex-copain shaman qui a eu deux copines qui se sont suicidé et qui est resté tout le temps près d’elle jusqu’au jour de sa mort – des témoignages du caractère douteux de cet homme dans ses relations amoureuses et la façon dont elle s’est suicidée, me font croire en sa responsabilité aussi. Des abus l’ont poussée à la mort. Or, c’est bien les thérapeutes qui sont en question ici. Et contre lesquels je n’ai aucune preuve.

J’ai proposé au collectif d’organiser une session « prévention suicide » pour les victimes d’inceste.  On me l’a refusé, car foireux et dangereux.  Une prévention : foireux et dangereux ? Depuis que je suis arrivée à Liège plus de 80 % des femmes que j’ai rencontrées me parlent de suicide.  Mais qu’est-ce qui se passe avec les gens? Est-ce qu’ils ont tellement peur de vivre qu’ils n’arrivent plus à m’aider, à me parler, à me traiter en tant qu’humain ? Je sais que je suis la plus faible de tous, mais j’en ai ma claque d’attraper des baffes de tous.

J’ai essayé le centre mental et un autre psychologue qui avait consenti de me suivre à long terme.  Il est sympa et il m’accorde une oreille attentive.  Je me sens émue, les larmes me sortent très vite et cela m’étonne.  Il est rare que je pleure devant quelqu’un. Mais très vite je me sens me rebeller.  Comment ne pas devenir un objet d’étude de ce psychologue ? Ma meilleure copine s’est révélée proche de l’avocat Hissel, un avocat qui d’abord a défendu des victimes de Marc Dutroux mais qui a été condamné pour avoir regardé des images pornographique.  J’avais eu confiance en elle, c’était la seule avec qui je me lâchais un petit peu et voilà que je me suis trompée en elle.  Quand je discute avec elle, elle ne défend pas du tout les victimes d’inceste, au contraire, elle fait plutôt l’apologie des abuseurs.  Depuis que je suis en Belgique je n’ai entendu que des arguments pour défendre les abuseurs, des psychologues, des victimes, … C’en est trop.  Je propose à mon psychologue de se rencontrer d’une façon un peu hors session psychologique normale et lui demande de visionner un film sur la sexualité et d’en discuter ensemble.  Je me méfie de tout le monde maintenant et je ne sais comment savoir si je me trouve devant un pervers ou pas.  Voilà ce que j’ai à lui proposer, mais il refuse.  Comme il ne sait pas trop m’expliquer en quoi son suivi psychologique pourrait m’aider je laisse tomber.  Je préfère continuer tout de seule.

Avec le soutien du groupe de parole d’AIVI

Ce que je souhaite ? Retrouver la solidarité spontanée et joyeuse de Caroline et de la Japonaise autour de moi, en Belgique. Et par-dessus tout, quelqu’un qui est content et heureux de mes progrès, de l’estime de moi que je retrouve, qui applaudit mes petites victoires et qui me pardonne mes aux pas, mes moments creux, mes auto-critiques.

Ce que j’imagine ? C’est un cercle de professionnels qui se penchent ensemble sur mon cas.  Au moment de la rupture de mon ex-copain en Belgique il y a quatre ans, j’étais en détresse et un groupe d’homéopathes se sont penchés sur mon cas.  Leur attention commune m’a guérie de l’emprise que mon ex avait abusivement sur moi.  Il était artiste et coureur de femmes : il connaissait l’art de tromper mais aussi le raffinement de posséder ses ex et de continuer à les influencer. J’ai senti très bien que ce cercle de scientifiques qui ont convergé leur attention sur mon cas m’a guérie.  La nuit d’après j’ai fait un rêve : que mon ex était dans la porte de son garage et me regardait partir, de loin.  Et les émotions de déprime autour de la séparation s’étaient évanouies.

Ce que j’imagine ? Que quelqu’un m’accompagne dans ma construction d’un moi-peau.

Que quelqu’un sait sentir le bébé peureux, nécessiteux, hurlant que je suis restée au fin fond de moi et me donner un rayon de chaleur humaine, beaucoup de rayons de chaleur humaine,… Ce serait le début d’une nouvelle vie.

Que quelqu’un sache prendre mes propositions intellectuelles comme des défis plutôt que des attaques personnelles.  Comme des invitations de découvrir ensemble de nouveaux horizons, où les expériences de tous les deux se pointent.