Témoignages femmes: Une enfance refoulee qui ressurgit

Témoignage Publié le 10.03.2006
Cela fait 4 ans que je me souviens de ma veritable enfance, de quasiment la plupart de toutes les horreurs que j ai pu vivre. C est la premiere fois que je vais raconter mon histoire, dans les details dont je me souviens. Apres etre passee par une sorte de depression (alcool) il y a a peine quelques mois, je suis allee voir un psy, sur le conseil d amis. Moi qui ne croyait pas du tout que cela pourrait m aider, je dirai que, meme si cela ne m a pas liberee, cela m a ouvert les yeux sur moi meme, sur ce que je suis devenue, et pourquoi. Mon histoire n est certainement pas la pire, et j ai eu la 'chance' d avoir inconsciemment refoule tout ca durant des annees, car cela m a permis d arriver ou je suis maintenant. Cependant, en ce moment meme, je n arrive plus a gerer tout ca, c est devenu trop lourd a porter et je me rends compte que je ressens le besoin de vider mon sac, de dire ce qu il s est passe.

Je ne sais plus tres bien quand tout cela a commence, peut etre vers mes 5-6 ans, mais je me souviens tres bien quand cela s est termine, le 4 janvier 1996, date du deces de mon grand pere.

Petite, nous allions quelques fois en week end, voir nos grands parents, avec mon frere et mes parents. J aimais beaucoup aller les voir, ma grand mere en particulier qui faisait tout pour nous faire plaisir.
Durant ces week end, nous y passions generalement une nuit, des fois deux. Leur maison etant petite, il avait ete decide (etant la plus jeune), que je dormirai dans un petit lit dans la meme chambre que mes grands parents, mon frere dans le petit bureau juste a cote, et mes parents dans une chambre de l autre cote de celle ou je dormais. Comme j etais petite, je devais me coucher tot, alors ma mere montait me border le soir, me disait bonne nuit et redescendait avec le reste de la famille.
Quelques minutes apres, mon grand pere decidait alors d aller egalement se coucher. Il entrait donc dans la chambre, et s asseyait a cote de moi, sur mon petit lit. Au debut, nous bavardions, et plaisantions, meme. Jusqu au jour ou, tres vite, il commenca a avoir les 'mains baladeuses'. Etant jeune, je ne savais pas que ce n etait pas des relations habituelles entre un grand pere et sa petite fille. Alors, le jour ou il descendit plus bas, puis quand il ajouta sa bouche, je n osais rien dire. Ne sachant pas. A 6 ans, qui saurait?En plus, il me parlait toujours avec des mots tendres, jamais de violence, et il disait que j etais sa petite fille preferee...

Cela se reproduisait a chaque fois, chaque soir, de plus en plus longtemps. Alors, quand mon corps commenca a avoir 'mal', mon esprit a vite pris l habitude de s en detacher. PLus de douleur, plus d image, plus de son...le regard vide vers la fenetre...je ne sentais plus rien, le neant...C est peut etre ce qui fait que j ai 'facilement' tout occulte.

Pourtant je l aimais ce grand pere en dehors de ces horreurs, il etait intelligent, toujours a rire...doue pour manipuler les gens en fin de compte, et je ne le remarque que maintenant.

Je ne lui ai alors jamais dit non, ne voulant pas le contrarier peut etre, car je ne voulais pas qu il soit facher contre moi. Petite fille, on fait tout pour que nos grands parents ou autre nous aime, nous apprecie, et puis, il n ajamais ete violent, n a jamais leve la main sur moi...

Jamais un non, jusqu au jour ou il me demanda de prendre son sexe dans mes petites mains, et de lui faire une fellation. Je ne savais pas ce que c etait jusqu a ce jour, mais j ai bien compris que je ne pouvais pas. Je me suis sentie comme dans un piege, ne pouvant reculer, sentant ses mains sur ma tete... Mais je lui ai dit non ce jour la, et j ai bien vu, du haut de mes 8 ans, que je l avais contrarie. Je me decevais, je ne sais pas pourquoi mais ce fut ainsi, alors j ai commence, mais j ai bloque et n ai pas pu continuer.Cela s est termine...au moins pour ce soir la...

Cela a continue, ca devenait la routine, je m y sentais obligee, et de toute facon, comme j avais pris l habitude de 'partir ailleurs' pendant les actes, cela ne me faisait plus rien. Et puis une fois de plus ou de moins, au point ou j en etais, le mal etait fait de toute facon...
Il me disait "ce sera notre petit secret", j en frissonne rien que d ecrire ses mots. Car selon lui, si j en parlais a mes parents ou qui que ce soit, ces derniers ne seraientpas contents de moi, je les auraient decus. Et comme j avais en particulier peur de mon pere qui, en plus, prenait un malin plaisir a m humilier verbalement pour je ne sais quelle raison, jamais je n aurais pense leur en parler. Alors, cela continuait...

Vers mes 11 ans, ma grand mere tomba gravement malade, et mon grand pere ne pouvant s en occuper seul vu son age, ils sont venus habiter dans une residence, dans notre propre ville. Au debut, j avais peur de ce rapprochement, mais je me disais qu au moins l avantage c est que je n aurai plus besoin de passer des nuits chez eux, donc tout serait fini.

J allais donc les voir quelques fois, dans la journee. Quelques mois plus tard, ma grand mere deceda (paix ait son ame) et mon grand pere se retrouva seul. Et je ne sais pas pourquoi, mais cela ne m empechait pas d aller le voir, peut etre par pitie de le voir seul, je ne sais pas, mais en tout cas j y allais. Au debut, rien, alors je venais plus souvent, confiante qu il ne se passerait rien.

C etait trop beau, ces quelques mois de 'liberte'. Car cela a vite revire. Il recommencait de plus belle, la journee ne le derangeant pas, et je ne savais toujours pas dire non a ce garnd pere qui savait tres bien me 'pieger' quand et comme il le fallait.

Tout cela a continue, jusqu a sa mort. Jour ou d ailleurs, beaucoup de personnes ont ete surprises de me voir avec le sourire aux levres, mais moi non plus je ne savais pas pourquoi je souriais. Pourquoi apres tout, je ne pleurais pas cet homme comme les autres? Ce jour la je ne savais pas pourquoi, mais maintenant, avec du recul, je sais. Ce jour, meme si je ne le savais pas encore, c etait le jour de ma liberation.De ce jour jusqu a il y a 4 ans, je m etais toujours demande pourquoi mes relations avec mes petits copains ne marchaient pas. Et c est en regardant une emission sur l inceste, que j ai compris, flashs back en tete. Une fois, j en ai parle a ma cousine (4 ans de plus, et petite fille egalement de ce garnd pere). Parler est un grand mot, aucun mot n a pu sortir alors je lui ai ecrit, et elle a lu mon recit, devant moi. J etais comme tetanisee, ma cousine ne me reconnaissait plus, elle ne m avait jamais vue comme ca, recroquevillee dans un coin de la piece. Et puis on a discute, tout une nuit, et a grande surprise, elle m a crue tout de suite. Pourquoi? Elle m a avouee que cela la surprenait bien sur, mais ne l etonnait pas que cela puisse etre reel, car il avait eu une fois les mains 'baladeuses' sur elle. Mais rien de plus, heureusement. Le lendemain du jour ou je lui en ai parle, je ne savais meme plus si c etait un cauchemard ou un reve, alors j ai fais ce que je savais faire le mieux, occulter, une fois de plus.

Depuis, je fais comme si de rien etait, comme si tout cela n avait pas existe. Mais, depuis quelques mois, je ne peux plus me cacher la verite.
J ai commence a me renfermer de plus en plus, montrant a tout le monde que tout allait bien. Mais, le soir, lorsque je me retrouvais seule chez moi, le noir, les flashs, les sensations, les odeurs, tout revenait...Tellement insoutenable, que j ai commence a faire le vide dans ma tete, l alcool aidant...

Un jour, je n en pouvais plus, j etais a bout...
Alors j ai 'pete un cable' en soiree, mes amis ont eu tres peur de me voir dans cet etat la, je ne peux pas le decrire, l alcool ayant tout efface...

J ai decide d aller voir un psy, sur le conseil de mes amis. Et la...blocage, impossible de sortir un mot. La peur au ventre, je suis sortie quasiment de la seance comme terrorifiee et surtout plus vite que prevu, ce qui a un peu destabilise mon psy. J ai hesite longuement, mais j y suis retournee a la seance suivante car pour moi cette fuite etait de la lachete, peur de voir la realite en face, c etait un echec pour moi, et je supportais encore moins cela.

Alors j y suis retournee, 6 ou 7 fois. Je ne lui ai jamais vraiment raconte en details tout ce qu il s est passe, on discutait de ca 'en general', mais je n ai pratiquement jamais dit ce que je ressentais. Peur de me devoiler, trop habituee a refouler...

Je ne pense pas y retourner, je veux tourner la page, il m a conseille d en paler a ma famille, mais mes relations familialles n etant pas les meilleures, je n ai pas envie d etre la raison d une famille encore plus dechiree.

Mes parents n ont jamais rien vu...ou du moins c est ce que je crois. En tout cas je n ai pas souvenir d en avoir parler etant petite fille. Avec du recul, je me rens compte qu ils auraient pu faire attention a quelques uns de mes comportement. J etais une petite fille super gaie, toujours avec le sourire, allant de l avant, et pourtant, quasiment du jour au lendemain, ce sourire disparaissait a petit feu...A l ecole, je ne me faisais plus d amis, je n en voulais pas d ailleurs, preferant restee seule. Mais je peux comprendre dans un sens qu ils n aient pas vu, car je ramenais toujours de bons bulletins, faisant parties des tetes de classe, peut etre un moyen de ne pas trop me faire remarquer, toujours montrer que tout va bien.

Aujourd hui, je crois que je ne veux meme pas savoir s ils etaient au courant ou non. Et leur dire? pour peut etre apprendre d autres horreurs dans la famille? non merci, j ai mon compte!