Echanges avec les non survivants

Après 1 an, j'ai ENFIN assez d'éléments du puzzle

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Phelenix
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Alors je suis enfermée dans mon corps. Alors je sais ENFIN de quoi je souffre. TOUT. JE SAIS TOUT. TOUT. TOUT. TOUT. Grand dieu, j'ai accès à tout ça y est. Entièrement TOUT. Soulagement. Libération. TOUT. JE SAIS TOUT. TOUT TOUT TOUT TOUT. J'ai tout compris. J'ai trouvé.

J'ai compris ma vie ce matin.

Suite au viol, désemparée au plus extrême des niveaux, en souffrance physique et psychologique dissociée, dans la terreur que Papa soit assassiné ou meure de chagrin s'il apprenait pour le viol, j'ai choisi le mécanisme le plus ultime pour camoufler mon agonie intérieure: j'ai figé et glacé mon corps pour les 20 ans qui ont suivi. Et j'ai fait tout cela dans l'instinct de survie sans aucune connaissance consciente en psychologie.

Je me suis placée devant le miroir et j'ai regardé dans le miroir parcourue de spasmes dans une transe, j'ai répété 'Je dois oublier, ça n'est jamais arrivé' J'ai verrouillé ma mémoire des faits pour me permettre de souffrir sans ressentir l'agonie, puis là je me suis retrouvée avec un corps flasque et très problématique. Alors j'ai mis en place un deuxième mécanisme de sauvegarde, j'ai appris à utiliser chaque muscle, chaque sourire, chaque mot, chaque variation du ton de la voir pour simuler. Simuler l'émotion de joie; Simuler l'émotion de colère. Simuler l'émotion de détente, de bien-être.

A force année après année, décennie après décennie, la boîte à horreur est restée à peu près scellée, je l'ai oubliée, ma persona a pris le relais. Faux sourires. Véritable agonie intérieure et palpable dans la solitude et l'inactivité à un degré insupportable.

Alors j'ai mis un troisième mécanisme de survie en place, m'occuper les mains et l'esprit, j'ai saisi en CE1 à bras le corps l'occupation des études, je me suis lancée à corps perdu (ironie de l'expression) dans l'apprentissage, en quelques mois investissant toute ma pulsion de vie compulsivement dans le travail pour ne justement pas avoir à me retrouver désoeuvrée et donc en contact mental avec l'agonie j'en suis venue à faire le programme de l'année en quelques mois, mon instit à voulu me faire passer en CE2 dès les premiers mois. Refus de mon père.

L'ennui s'est installé en cours me faisant ressentir l'agonie dans mes moments de désoeuvrement; Désespérée, j'ai mis un 4ème mécanisme de protection en place, la rêverie hypnotique; En cours m'ennuyant désormais absolument, j'ai commencé à m'inventer des histoire de fiction d'enfant qui me permettaient d'être là en cours tout en ne ressentant pas l'agonie occupée que j'étais à imaginer les moindres détails de mon univers de fiction mentale pour me tenir occupée. Cette occupation de rêverie mentale, ce 4ème mécanisme m'a sauvé la vie et condamnée un peu plus à vivre avec mon secret.

Les années ont passé, en cours je sautais toujours avidemment sur les savoirs que j'absorbais trop vite et après la rêverie prenait le relais comme mécanisme d'occupation pour éviter de ressentir l'agonie qui s'échappait de la petite boîte enfouie avec le secret du viol.

Les années ont passé. J'ai commencé à vouloir aimer. Je suis tombée amoureuse. J'ai voulu me libérer de l'armure pour connecter avec le petit garçon que j'aimais. Mais la boîte noire était là, j'ai pensé à lui parler, lui dire à lui pour le viol. Je ne pouvais pas parler aux adultes mais à lui, si.
Il est décédé au bout de quelques mois dans un incendie. Ma boîte s'est ouverte, je me suis sentie mourir à l'intérieur, mon amour est mort dans l'incendie et je suis restée avec mon agonie, mon armure et la douleur de son départ et l'envie de crever moi-même. Je le pleure encore.

J'ai pensé au suicide. J'ai commencé à envisager de monter très haut dans la balançoire et de me laisser retomber au sol et puis ainsi soulager ma vie de malheur de façon radicale.

Je ne l'ai pas fait parce qu'un père m'a rappelé à la vie. Il est venu au bout du jardin, il m'a regardé avec un sourire plein d'amour, j'ai pas trouvé la force de le faire, j'ai culpabilisé de mourir. Si je mourrais, il s'en remettrait pas. Pour lui je suis restée vivante. J'ai pleuré seule au bout du jardin. Personne ne m'a vue.

Les années ont passé. J'ai commencé à supporter de moins en moins la protection des mécanismes quand sont arrivés les premiers émois amoureux. De ne pas pouvoir connecter avec mes pairs émotionnellement à cause de tout ça c'était une torture.
Pour m'occuper, je me suis réfugiée dans le savoir parce qu'au collège j'avais accès à un nombre de libres illimités donc ça compensait la douleur de devoir rester seule à cause de mes secrets. En parallèle j'étais très valorisée socialement comme excellente élève alors ça apportait UN PEU d'estime.

Mon corps a commencé à grossir. J'ai senti que la nourriture apaisait assez efficacement ma faim d'amour relationnel, que je ne pouvais assouvir comme je cadenassais mon secret dans les mécanismes. Je me suis effondrée dans la nourriture, 5ème mécanisme.

Je suis passée au lycée, j'ai eu envie de faire l'amour là où je ne pouvais déjà pas embrasser. La dépression s'est installée, l'implosion intérieure. Et toujours l'amnésie induite, je ne me rappelais pas de la boîte noire, je la sentais, l'agonie mais sans savoir 'pourquoi j'agonisais'

Tentatives de suicide pour me soulager. Enchaînement d'anxiolytiques, thérapies, TS. Déscolarisation. Refuge dans la rêverie, je sauve le monde, hyperempathie pour toutes les causes humanitaires dans ce monde, végétarisme. Explosion intérieure. Confusion et perte de repères. Incompréhension du POURQUOI la douleur je la vomis nuit et jour.
Et une réponse que je m'AUTOINFLIGE: je suis bipolaire, je suis malade, voilà.

Je brandis le BIPOLAIRE. J'essaie de prouver que je le suis, je le pense vraiment même si quand même certains symptômes ne collent pas. Je le dis à la psy. Elle n'infirme pas. Ne confirme pas. Je le dis à mes parents. 'Mais non tu n'es pas malade, tu as juste des difficultés mais c'est tout.'

Je me suicide de nouveau.

Je tombe amoureuse de mon premier ex. En ligne. Je veux faire l'amour avec lui. Il est dissocié aussi. Dans l'hypercontrôle à sa manière. On fait l'amour, je deviens une femme. Il est plus gentil pour moi que la plupart des gens. Il me fait des cadeaux. Il est gentil. On s'apprend nos cultures, je parle sa langue couramment très vite. On s'absorbe l'un l'autre vit ensemble unis fusionnels. 30 heures de téléphone. Téléphone dans le bain. On se voit peu. 10000 kms. On s'aime 7 ans. On se déchire. Ma folie me rattrape. Menaces de me suicider. Sa dépression le rattrape.

Je survis. Des années. J'obtiens mes diplômes avec mention sans efforts parce que mécanisme numéro 3 est toujours là vivace. Absorption des connaissances et savoirs qui masque l'agonie. L'agonie grandit, je suis enfermée fortement dans mon corps. J'ai des échanges transférentiels avec trop de personnes d'un coup je suis prof, des centaines de personnes par jour. J'explose. Trop d'amour, trop de joie, trop de douleur, trop de compassion, trop de gratitude, devant tout cet amour, cette bienveillance je me sens assez forte pour dire 'mes amis, regardez l'horreur en moi, aidez moi à l'extraite, à genoux, je vous le demande, par pitié, sauvez moi, aidez moi'

J'explose. Je ne comprends pas ce qu'il se passe, la vie qui veut se libérer enfin, le secret qui veut se dire, je suis perdue, je ne parviens plus à travailler et hyperapprendre, je veux vivre, rigoler, être joyeuse et cool, faire l'amour, avoir des amis, j'ai 26 ans. Je perds pied.

Je vais voir mon père pour lui dire que ma mère nest pas gentille avec moi qu'elle me 'viole' mais la seule chose qui sort fulgurante imprévisible que je parviens pas à refouler au point que même plaçant en réflexe de refoulement mes mains sur ma bouche les mots se prononcent quand même bien audibles de mon père dans un hurlement déchirant, j'explose de pleurs de la détresse la plus absolue là pendant quelques secondes tous les mécanismes, toutes les digues cèdent et je hurle en transe sanglotante et désespérée dans l'agonie à mon père livide 'ET IL M'A VIOLEE ENCORE ET ENCORE. IL M'A VIOLEE. ENCORE. ET ENCORE. ET ENCORE.' Ma voix saccadée par le 'encore' du viol, je ressens les coups du viol, les saccades de destruction. Là devant Papa j'ai 27 ans. Je viens de complétement lui révéler ce que j'ai subi. Je suis choquée catastrophée par ce qui vient de sortir de ma bouche.

Je ne comprends pas. Ma mère ne m'a pas 'violée', elle se met nue et me met des mains sous la jupe. Ce n'est pas un viol. Je reste figée. Choquée. Je ne comprends plus rien. Je voulais dire à mon père en sous-entendant le nom de ma mère que quelqu'un m'avait agressé qu'il connait et pour qu'il me protège. Et sort ce cri du coeur agonisant. Je ne comprends pas. Papa me hurle les yeux dans les yeux tenant ma tête dans ces mains 'Je te crois, bon dieu, dis moi qui c'est.'
Je reste figée. Mutique. Je ne comprends pas ce qui vient de sortir de ma bouche. Qui m'a violée. Je cligne des yeux. Sors de l'hypnôse. Me ramène. J'ai honte. Ma mère je me débrouillerai avec. J'ai besoin de mon père, le voir régulièrement et parler de choses positives voilà. Dans un réflexe désormais naturel depuis plusieurs décennies, je remets mon masque de normalité et prétends que je suis folle et fatiguée en ce moment que je raconte n'importe quoi. Il m'engueule, me dit qu'il ne veut plus me voir si c'est pour 'se taper ça' et me donne sa tranche de jambon 'tiens si tu en veux tu peux la manger moi j'en ai déjà eu, si ça te fait plaisir je te la donne (en plus)'

Voilà ma vie. Elle est claire devant mes yeux aujourd'hui et je peux désormais parler aux médecins en conscience. Je sais de quoi je souffre.
13 messages
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Melina
Inscrit il y a 6 ans / Actif / Membre
Publié le 19.05.2018 18:15
Tu expliques bien les mécanismes de ton amnésie et de ton mode de survie. Il y a quelques jours pour ma part je me suis souvenue (suite à l'agonie du viol et le refus de vivre) me balancer comme une autiste dans mon lit en me répétant en boucle (ce n'est jamais arrivé, ce n'est pas vrai") et d'avoir ensuite le soulagement d'aller un peu mieux et j'en recommencé à chaque fois que l'angoisse montée, il me semble même en avoir parlé à ma soeur comme un "secret".
Je me demandais justement combien de temps faut il à peu près pour retrouver une bonne partie de ses souvenirs
Je ressens aussi ces rallumages de mémoire traumatique régulièrement dans ma vie d'enfant, sans en comprendre le sens ayant oublié, beaucoup de pleurs inexpliqués pour ma part et de se refugier dans un monde imaginaire
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Phelenix
Inscrit il y a 7 ans / Actif / Membre
Publié le 19.05.2018 18:42
Bonsoir Melina,

Je me demandais justement combien de temps faut il à peu près pour retrouver une bonne partie de ses souvenirs


Comme je le comprends dans mon cas, les souvenirs remontent à chaque fois que j'ai un transfert sur quelqu'un et qu'à ce moment là je n'utilise pas ou pas autant les 6 mécanismes de mon histoire de vie (le 6ème c'est l'hyperintellectualisation tout expliquer et rationaliser par les mots).

Si je lâche prise avec ça, là j'ai une batterie de souvenirs qui reviennent.

Je me sens en protection là en écrivant justement je ne sais pas torp ce que je cherche à verrouiller mais je suis hypertendue physiquement, cuisses croisées en écrivant ça.

Mon hypothèse est que dans les jours qui viennent diminuer mes mécanismes de défense (les 6 gros): diminuer les rêveries (déjà en cours), diminuer l'hyperintellectualisation (déjà en cours), l'autohypnôse dans le miroir (éviter les miroirs?), diminuer de me réfugier dans l'absorption de connaissances intellectuelles, diminuer les sourires quand je souffre et les minimisations quand j'ai peur, prendre un léger Effexor, et relâcher le corps, ça devrait me donner de nouvelles visions et de nouvelles réalisations. Faire sortir de la souffrance et là mon boulot c'est de l'accueillir, les flashs, les images et les noter.

J'en suis là sur cette question qui est centrale aussi dans mon histoire: je cherche le nom et le visage du type qui m'a violée. Son vrai nom et son vrai visage, s'il avait bien les yeux noirs et les cheveux noirs une obsession dans mon histoire amoureuse que je ne me suis jamais expliquée. 8 ans, ça devrait le faire pour trouver.

Aller en transfert sur des personnes qui me rappellet des personnes de mon passé et lorsque l'émotion monte en moi en présence de la personne ou après coup éviter le recours aux 6 gros mécanismes (le diminuer réalistement) et là des souvenirs vont revenir en morceau. En fait c'est le travail des derniers mois pour moi mais là je peux l'accélérer comme je sais ce qui le ralentissait vraiment (les 6 mécanismes que j'utilisais pour anesthésier mes transferts de vie de tous les jours).
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Phelenix
Inscrit il y a 7 ans / Actif / Membre
Publié le 22.05.2018 10:25
Ce matin j'ai réussi à contrôler mon réflexe de dissociation en utilisant une situation de rêverie comme entraînement

Je ne pense pas que j'ai dissocié fortement depuis 48 heures, j'ai réussi à contrôler ma respiration et mon coeur. Pour autant des morceaux de passé traumatique me remontent mais je reste en contrôle. C'est juste libératoire pour moi d'avoir passé ainsi ces 48 heures à ni oublier les traumas, ni pour autant me les prendre dans la figure en infusion ingérable et pouvoir donc parler de choses positives et faire des choses positives.

Ce matin je me suis réveillée et pour moi c'est positif de le dire, j'avais envie de faire l'amour avec mon deuxième ex. J'avais envie de douceur, de tendresse, de chaleur des corps, de regards aimants, de caresses. Bien entendu je me suis dit que si je me laissais aller à ce fantasme j'allais violemment redissocier et après les 7 jours de fou que je viens de passer, je me suis dit 'non, juste non, occupe toi avec autre chose' Et puis après je me suis dit ceci: en fait je dissocie quand mon coeur bat trop vite, si je le laisse s'emballer et que ma respiration devient courte et que j'étouffe en somme. Mais si mon coeur reste à un rythme correct et que je m'arrange pour garder une respiration assez claire, alors je ne dissocie pas.

Donc je me suis autorisée à juste m'imaginer dans les bras de l'homme que j'aimais, juste UN PEU. Pas beaucoup. J'ai focalisé en même temps sur ma respiration et vérifié en même temps que le coeur ne s'emballait pas. Me sentant un peu stressée, je l'ai fait me parler avec douceur (ce ton de voix qu'il adopte parfois que j'adore), me dire 'ça va ton coeur?' et ce genre de phrases gentilles et de soutien. Je me suis autorisée à profiter un maximum du pouvoir de la rêverie 'je peux certes revivre des choses dures mais aussi enfin penser à faire des rêveries hyper positives, pleines de soutien et de tendresse, de bienveillance.'
Et j'ai senti que ma respiration devenait courte et mon coeur s'emballait un peu. Alors je lui ai dit mentalement dans mon fantasme 'J'ai du mal à respirer attends je m'apaise' et il m'a répondu 'oui détends toi' en me caressant doucement les épaules et ce genre de gestes et de mots tendres toujours avec sa voix douce que j'aime.

Et ainsi j'ai pu penser et aimer mon ex dans un fantasme sans dissocier.

Je me suis autorisée à ce fantasme pour plusieurs raisons:

1) la rêverie est pratique, elle me permet de contrôler ma respiration et mon coeur plus facilement que si j'avais vraiment mon ex avec moi qui n'aurait pas forcément sur le coup ces mots rassurants (et donc je pourrais alors dissocier par manque de réassurance en absorbant son stress)

2) je voulais voir un peu si je peux me contrôler, c'était encore une inconnue pour moi de savoir si un fantasme de nature sensuelle je pouvais le supporter sans dissocier puisque mon plus gros trauma vient d'une agression sexuelle. Et je pense que oui tout à fait dès lors que je respecte mes limites et ce matin me le prouve.
J'ai dû faire beaucoup de pauses respiration et ralentir mon coeur parce que je partais beaucoup dans les palpitations et la difficulté à respirer mais j'ai bien contrôlé (huile de menthe à l'appui aussi) et ainsi mais j'ai mentalement passé un moment que je qualifierais de plutôt doux et positif avec mon ex. Un peu comme un câlin de couple assez épanoui et 'normal' qui a envie de construire ensemble et simplement.

3) j'aime toujours mon ex et j'ai réutilisé des choses pour m'apaiser qu'il a vraiment faite ave moi. Les caresses rassurantes sur les épaules. Me laisser allongée contre lui sans rien faire (le contact de son corps et sa respiration régulière m'apaisaient alors). Ces mots doux 'Détends toi', 'je ne te force pas, c'est toi qui dit (ce que tu veux sur toi)', etc.

Je réalise que mon ex a eu des COMPORTEMENTS agresseurs mais qu'il n'EST pas un agresseur.
Je réalise que je l'aime (ça je le sais depuis toujours) et qu'au prix de vraies discussions de fond, s'il reconnait ce qu'il m'a fait comme mal par certains de ses comportements, je pourrai lui pardonner pour eux.
Je voudrais pouvoir me dire avec mon deuxième ex que 'comme avec mon premier ex, il a su m'apporter du soulagement en reconnaissant le négatif dans certains de ses comportements et que je lui ai presque tout pardonné, que je peux dire qu'il est désormais un ami pour moi.'

J'ai presque tout pardonné à mon premier ex avec qui je reste en contact quotidien depuis quelques temps. Un contact amical et de soutien. Et je pense que justement ses petits messages optimistes, joyeux, de soutien, d'écoute et de compassion pour moi ces derniers temps, le fait qu'il reçoive aussi de ma part ces choses et qu'on dialogue bien, ça pousse dans le sens pour moi de bientôt lui pardonner entièrement. En ce moment, spontanément, il me parle de vouloir être moins dur avec lui et me félicite sur le fait de prendre ce temps de repos et de réparation pour moi. Il me fait du bien de me féiciter, ça me touche profondément venant de lui et puis il me touche de dire la vérité sur lui: qu'il n'a pas assez de bienveillance envers lui. Je l'encourage à passer à l'action dans sa situation et parce que je pense que s'il a plus de compassion envers lui, simplement il en aura encore davantage envers les autres.

Je suis encore très émue d'écrire qu'il me félicite régulièrement de prendre soin de moi, pour les 'jolies' choses que je fais que je lui montre parfois. Il y a avec lui un échange globalement bienveillant qui me renforce dans ma croyance profonde que l'être humain peut changer avec les années. L'homme qu'est mon ex aujourd'hui est tellement meilleur que lors de notre rencontre, je peux dire que j'aime bien l'homme qui m'écrit. Je ne partage pas tous les moments de sa vie et ses difficultés notamment il ne me les mentionne pas beaucoup (parce que je pense qu'il est comme moi: il les gère avec les personnes indiquées) Donc j'apprécie cet ami qui me parle de beaucoup de choses positives, de difficultés de façon constructive et pour les difficultés sur lesquelles je n'ai pas d'influence qui va chercher plus d'aide où c'est indiqué.
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Phelenix
Inscrit il y a 7 ans / Actif / Membre
Publié le 22.05.2018 22:03
J'ai vu mon médecin généraliste (soit c'est lui, soit c'est sa fille que je vois) et j'étais juste heureuse. Voilà, je lui ai dit simplement pour la dissociation, que c'était quelque chose sur lequel les professionnels de santé sont souvent peu au courant et que juste ça me fait du bien de lui en parler.

Il m'a écoutée. Il a été très à l'écoute, il m'a bien demandé comment j'allais avec bienveillance, j'étais touchée et heureuse de le revoir (ça fait un moment qu'en repos je n'avais plus besoin de le revoir et simplement revoir son visage bonhomme et le voir ça m'a rendue heureuse )

C'était pas facile de lui expliquer qu'en fait ma vie semble toujours bien mais au fond de moi il y a une agonie pourtant depuis toujours. Je sentais justement cette agonie dissociative à lui évoquer cela. Qu'à 19 ans je voulais me suicider parce que je ne comprenais pas comment je pouvais être heureuse comme ça et agoniser en moi. Je lui ai dit que comme je comprends désormais que la dissociation est la cause, ben j'ai envie de me réassocier, que je pars en traumato, j'espère limiter la dissociation si ce n'est me réassocier vraiment bien un jour.
Il m'a dit de continuer en effet à me reposer en CLM. A été vraiment chic en 10 minutes.

J'en reviens pas que ça m'ait été au fond si facile de lui parler. De lui dire les choses que j'ai mis 14 mois pour comprendre. Si simple. J'attends de même un simple soutien avec la traumato dans 3 semaines. Je suis contente.

Pour fêter ça je me suis fait des panisses de Provence Comme dirait un ami 'my little treat', mon petit plaisir du soir.
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Phelenix
Inscrit il y a 7 ans / Actif / Membre
Publié le 03.06.2018 03:13
Si je suis honnête, il y a deux minutes, buvant un verre d'eau tranquille à la maison, libre, libérée, je me suis dit que 'ohlala je sais plus si viol ou pas viol, et si j'oubliais toute cette histoire ça m'éviterait de jamais avoir besoin de savoir si c'est arrivé ou pas et puis que voilà, allez, je reprends le travail en septembre plutôt que dans un an et je me remets en relation avec quelqu'un et repars voir mes parents en disant que j'ai eu un coup de fatigue à croire des choses et puis c'est pas vrai au final, et voiolà je me fais une petite vie bien calme où les mots trauma, viol, inceste n'existent pas.'

Et tout aussi honnêtement je pense que j'aurais pu vraiment être tentée de le faire si dans la minute qui avait suivie je n'avais été violemment dans l'obligation de vomir toute l'eau que je venais de boire. Et oui, je vois ça comme le pied du mur, si je veux continuer encore à être dans le déni, c'est pas un problème, mais c'est le corps qui me rappellera les squelettes du placard.

Je suis très en colère bien entendu de ne pas pouvoir gentiment oublier tout le passé. Et puis je suis en colère contre moi parce que voilà: ce n'est pas ma faute si j'ai été abusée, grand dieu non! C'est un départ dans la vie absolument indubitablement injuste. INJUSTE. Mais c'est mon départ. Que je le veuille ou non il y a un principe de réalité que je me rappelle à moi en écrivant ces lignes: voilà, Lena, c'est pas juste ton départ dans la vie, non! C'est d'une injustice ABSOLUE, mon enfant. ABSOLUE. Mais voilà c'est ton départ. C'est un fait. Inaltérable. Tu as ainsi démarré dans la vie, probablement par une naissance choquante et assurément par un abus sexuel puis des abus divers et de l'inceste. C'est comme ça, Lena. Tu ne peux pas le nier. Il te faut l'accepter, l'intégrer en faire le deuil. Comme tu devrais faire le deuil d'un amour perdu. D'un amour parti trop tôt au ciel. Il te faut accepter, ma petite Lena, aussi dur, aussi terrible, aussi profondément viscérablement douloureux blessant tuant que tu as EU ce départ dans la vie. C'est ça ton départ de vie, mon enfant, mon petit, c'est ça ton départ dans la vie.

Voilà, c'est ça mon départ dans la vie, les amis. C'est ça. C'est ça mon départ dans la vie, c'est ça. C'est ça. C'est l'abus. C'est ça. Je l'accepte, mes amis, je l'accepte. C'est si dur, c'est si dur mais je l'accepte. Je l'accepte. C'est mon départ dans la vie. C'est mon départ dans cette vie, c'est mon départ.
A
abribus
Inscrit il y a 15 ans / Actif / Membre
Publié le 03.06.2018 13:52
Bah ouai parfois il faut se rendre à l'évidence.

La vie n'est pas un compte de fée, avec une famille idéale, et les gens ne sont pas tous gentil.
OH que non.

Dans nos sociétés il y a beaucoup d'apparence, de faux semblant, de compte de fée raconté, de croyances institués. Mais en regardant de prêt, on se rend bien compte que tout cela n'est pas rose. C'est meme parfois rouge, violacé virant au noir.

On connait l'inceste, on connait l'envers du décor, on connait la souffrance, on connait la solitude, on sait que la famille n'est pas toujours un bien fait, on sait que la société a du mal a nous protéger ou nous aider dans notre reconstruction. De tout ca, on en fera quelque chose. Il y a des progrès des avancés. Et faire face a ce genre de fatalité c'est faire changer cette société, et pointer du doigt ces gens qui sont cinglés.

Prend soin de toi, et met la lumière sur ce que tu as vécu.
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Phelenix
Inscrit il y a 7 ans / Actif / Membre
Publié le 03.06.2018 14:08
Merci, abribus, la lumière elle point un peu plus mois après mois comme le soleil qui se lève.

Tu as tellement raison. Cette société nous protège si mal. L'inceste, les viols sur enfant, c'est des choses tellement graves et que ce soit aussi répandu en nombre de victimes et fréquence dans les foyers, c'est tellement représentatif d'une société qui protège mal.

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En lien avec la non protection, la destruction aussi de l'enfant.

J'ai reçu un très long message de K., cet homme de 30 ans qui me dit qu'il était attiré par moi quand j'avais 18 ans, que 'si on avait consommé, je n'aurais pas regretté' (mon coeur qui se glace d'effroi à le lire) et puis ensuite le moment qui me touche absolument quand il m'explique sa vie, sa famille qui lui interdisait absolument toute petite amie et qu'il écrit d'une façon qui me tue pour lui, je pense 'pauvre ado': que si ses parents le voyaient sortir avec une fille, c'était 'la mort assurée'. Qui me parle d'éducation castratrice. Et là cet homme K. que j'ai aimé, que j'aime toujours avec cette chaleur dans le coeur, cette admiration, soudain je le comprends, je comprends l'ami qu'il fut et est encore d'ainsi s'ouvrir sur plusieurs pages de sa vie. Il me dit que tout ça il n'en parlait pas. La castration. Son 'introversion' et son manque d'expérience avec les filles. Il me confie que lorsqu'on s'est rencontrés si je veux tout savoir il avait des idées suicidaires depuis des années.

Je découvre tout cela sur K., je suis si émue, tellement pleine d'amour pour mon ami qui a vécu l'enfer. Le portrait de lui qu'il me brosse dont j'ignorais tout (la castration, l'éducation castratrice, l'introversion et son manque d'expérience et de mâturité avec les filles, ses idées suicidaires, tout cela de ses mots), ça me touche. Il me touche. Je suis outrée en colère et en haine contre ses parents. Je suis fière et aimante de lui qu'il se confie à moi.

ça explique pourquoi ses réactions avec moins étaient inappropriées. Le sont encore. Il me confie qu'à 18 ans j'étais déjà probablement plus au fait de la vie que lui à 30. Je suis estomaquée. Je soupçonnais tout cela chez lui. D'ailleurs je l'ai déjà écrit ici sur le portrait type des hommes violents de ma vie. Mais que K. me le dise noir sur blanc, c'est de ça dont j'avais besoin, que K. mette ses mots sur son histoire et qu'il me les donne pour me montrer qu'il a un coeur et que voilà ce qu'il contient. Je connecte à mon amour pour K., ma chaleur pour lui, je me rends compte qu'il est une bien belle personne avec une histoire bien terrible.

Je me dis que je comprends soudain plus mes deux autres amours, mes deux exs.

Je me dis aussi maintenant pour la partie de douleur que nos relations contiennent encore que j'aurai encore besoin de leurs mots à tous les 3 sur des choses qui m'ont fait mal mais que je comprends comment ça fonctionne pour me libérer: leur demander de me conter leur intérieur, leurs douleurs, leurs hontes, leurs horreurs, leurs pensées sombres. Quand ils me disent la noirceur en eux, en fait ils ne sont alors que lumière parce qu'exposer ses défauts, c'est être vrai, c'est dire, 'voyez comme je suis imparfait et pour vous protéger de mes défauts, je vous les montre, voyez donc comme je vous aime vraiment. Je vous protège.'

Et cet amour de celui qui a un défaut et le montre pour protéger l'autre provoque chez moi l'envie de rester auprès de lui. Car il est beau de ses défauts assumés. Ses défauts perdent de leur pouvoir négatif sur moi car je les regarde et à force je m'immunise.

Je répondrai mon amour à K. Et puis je lui dirai pour moi aussi ce que j'ai vécu enfant, confession pour confession. Je suis heureuse de replonger dans mon passé. J'en ai besoin.
A
abribus
Inscrit il y a 15 ans / Actif / Membre
Publié le 03.06.2018 16:36
Oui tu as raison, c'est ce que j'appel allez au bout de l'histoire. Quand on est avec quelqu'un et que l'on se quitte il faut terminer l'histoire. Allez au bout de la logique.
Car on a une particularité c'est de revivre les choses d'une certaine façon pour se réparer. Et donc il faut comprendre ces choses. Il n'y a pas vraiment de hasard.

Par contre quand il dit "que tu n'aurais pas regretté", la il faut s'alerter. Personne n'a le droit de dire ou de décider à ta place. Il n'a pas a imposer ta pensé. C'est a toi de le décider. Donc ce genre de propos il faut s'y opposer et y faire attention pour ne pas tomber dans le piège.
P
Phelenix
Inscrit il y a 7 ans / Actif / Membre
Publié le 03.06.2018 18:04
Par contre quand il dit "que tu n'aurais pas regretté", la il faut s'alerter. Personne n'a le droit de dire ou de décider à ta place. Il n'a pas a imposer ta pensé. C'est a toi de le décider. Donc ce genre de propos il faut s'y opposer et y faire attention pour ne pas tomber dans le piège.


Tu as tout à fait raison abribus, merci pour ton soutien sur ce point. ça me renforce encore pour réinsister un peu plus sur ce point fondamental là même où on glisse d'une bêtise vers un abus le point de chute précis. Dans mon précédent message j'ai souhaité insister sur l'humanité que je vois en K. et je pense que dans mes prochains messages j'insisterai justement sur le point noir du tableau.


Je lui ai affirmé ceci concernant effectivement le fait qu'à 18 ans je ne voulais PAS être nue et me retrouver devant un homme nu. Que j'aurais donc souffert. Je lui ai martelé qu'il n'avait pas ce droit de me placer SES fantasmes, SES envies dans la bouche et alors j'ai dit que 'voilà ce que je pense vraiment' et lui ai affirmé (!) que:

Je t'en veux, K. à près de 40 ans de pouvoir avec un ton léger évoquer pour MOI ce que TOI tu penses. De me mettre TES fantasmes à TOI dans MA bouche et TON plaisir à TOI.

Alors JE rectifie avec MES mots pour MOI:

Non, K., à 18 ans, je n'avais pas envie de coucher avec toi vraiment. J'étais confuse et perdue mais je ne voulais pas VRAIMENT cela: non.

A 18 ans, je peux te le dire désormais car je me connais assez pour le savoir, je ne voulais pas VRAIMENT avoir un rapport sexuel ou un contact physique sensuel avec toi et en fait je ne voulais déjà pas être nue devant toi ou te voir nu. ça m'aurait fait souffrir atrocement. C'était trop tôt dans ma vie pour être avec un homme. Je n'étais pas prête à voir un homme adulte nu et encore moins à me mettre nue devant un homme. C'est important pour moi de te l'affirmer.

Merci encore abribus, ton soutien de bon sens me donne vraiment encore plus de force pour m'affirmer pour moi dans mon prochain message de réponse à K.
P
Phelenix
Inscrit il y a 7 ans / Actif / Membre
Publié le 05.06.2018 00:34
5 juin 2018 - Ma mémoire trauma se réouvre d'un coup

Je sens que je suis en train de replonger dans le passé. Avoir recontacté l'homme de 30 ans qui me parlait à 17-18 ans ça a précipité la réouverture de mémoire sur le viol. Là je vois des choses, je réaccède à des souvenirs précis du lycée où ça s'est passé. Le distributeur de sucrerie, les sucreries à la noix de coco. ça va être une nuit difficile.

Demain je vais à un entretien pour un groupe de parole de victimes de violence sexuelle.

J'ai peur de me laisser aller à me souvenir. Et puis c'est pas si terrible, je le fais depuis 14 mois techniquement.

Bon courage à toutes et tous. Je sens que ma nuit va être longue.

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