Procédure judiciaire : Juge Délégué aux Victimes : JUDEVI

Dossier Publié le 03.11.2009

Voté le 13/11/2007, le décret instituant le JUDEVI ou Juge délégué aux victimes, est entré en vigueur en janvier 2008. Son titre et sa fonction interpellent.  Ce juge, qui est-il, que fait-il, comment le fait-il ?

Un inconnu, d’abord.  A Lille, ni le Centre Français de la Protection de l’Enfance (C.F.P.E.) ni le Centre d’Information sur le Droit des Femmes (C.I.D.F.) n’en ont entendu parler. Quelqu’un de non-qualifié ensuite. Le décret n°2007-1605, publié sur Legifrance.gouv.fr laisse entendre qu’il n’y a pas de formation spécifique pour être juge des victimes. C’est un juge désigné. Ce peut également être une commission de juges désignés. Quelles que soient ses attributions, on ne peut que déplorer un manque de formation, en victimologie par exemple.  


C’est un juge qui veille à l’intérêt des victimes à l’issue du procès. Les coupables sont suivis par le Juge d’Application des Peines (J.A.P.) qui veille à leur réinsertion sociale. Ils peuvent recevoir gratuitement soins et formation. Par équité, la société doit également se soucier du sort des victimes. Le JUDEVI est aussi un juge des coupables. A la demande de la victime, il devra saisir le J.A.P. en cas de non-respect par le coupable de ses conditions de libération conditionnelle (suivi médical ou interdiction de fréquenter certains lieux tels les lieux de vie de la victime ou les abords des écoles) ou de son devoir d’indemnisation envers la victime.


Ces premières attributions constituent un aveu du dysfonctionnement judiciaire : des individus seraient manipulateurs et dangereux au point de bénéficier à tort d’une liberté conditionnelle et de ne pas respecter la loi même après un passage par la case prison. C’est hélas possible. Pourtant, le JUDEVI ne dispose d’aucune autonomie. C’est à la victime de dénoncer à nouveau son agresseur par son intermédiaire . Le JUDEVI ne peut saisir le J.A.P. de sa propre initiative afin que les décisions des juges soient respectées. C’est donc à la victime de jouer les gendarmes et de dénoncer les manquements au respect de la peine infligée, voire qu’il n’y ait pas de récidive.

Selon les voeux énoncés par la victime, le JUDEVI l’informera ou non de la sortie de prison de son agresseur. S’il est normal que son intérêt soit pris en compte, on peut s’interroger sur le fait que ce type de décision lui appartienne. Sous prétexte de faire respecter les droits des victimes, la justice se décharge sur elles et recrée pour les victimes de violences intra-familiales le huis-clos terrifiant. La création d’un juge pour les victimes constitue une avancée dans la prise en compte des besoins des victimes. Reste à remplir cette coquille vide. Car l’enfer judiciaire peut-être pavé des bonnes intentions du législateur. RR