Je suis en train de guérir Mon frère ainé a neuf ans de plus que moi, je suis le quatrième d'une fratrie de cinq. Catholique pratiquante, famille très engagée, portant haut apparemment les valeurs de l'évangile, de l'éducation, du milieu. Mon frère ainé longtemps destiné à la prêtrise passait pour un modèle de pureté, de dévouement, de gentillesse. Il recélait néanmoins une autre face et comme Janus sévissait à mon encontre d'une toute autre manière.
Plus turbulent, dissipé, je passais auprès de ma famille pour le trublion et lorsque je m'opposais à ce frère pour une quelconque raison j'étais puni et j'avais systématiquement tort.... Un jour de Noêl, à l'occasion d'une partie de cache-cache, je devais être âgé de six ou sept ans ( c'est assez confus dans mon esprit) alors que nous étions tous réunis avec nos cousins germains, je me suis retrouvé dans la même cachette que ce frère. Je me souviens parfaitement de quelle façon cela a commencé. Nous étions tous encore en pyjama. Il était face à moi, dans un cagibi, et son pied nu s'est mis entre mes jambes et m'a masturbé.
C'est ainsi que tout a commencé. Allant toujours de plus en plus loin dans la violence et dans la pornographie. Cela a duré huit ans jusqu'à ma puberté. Je suis devenu alcoolique à l'âge de dix ans dans l'indifférence générale. J'ai commencé à bouffer jusqu'à devenir obèse. J'étais le vilain petit canard. Il a continué à donner le change le jour et la nuit me faisait subir comme une poupée tout ce qui lui passait par la tête. Le jour il était méprisant, insultant, violent. Mes parents voyaient bien que je le détestais et nous poussaient au contraire à nous rapprocher, toujours à me pousser vers lui.... Comme s'ils me sacrifiaient.... Ensuite j'ai vécu sans jamais en parler à personne. Je me suis marié à 20 ans et j'ai fondé ma propre famille.... Une famille qui fonctionne à merveille grâce en partie à la magnifique énergie de ma femme. J'ai eu plusieurs phases dépressives avec une tendance alcoolique... Je me suis toujours ressaisi... J'ai entamé il y a quatre ans une psychanalyse. J'ai pu mettre des mots sur tous ces maux, tout évacué,tout revivre et surtout déchiffrer le système dans lequel nous vivions. J'ai arrêté de me culpabiliser à mort... sur le plaisir que j'ai pu ressentir et éprouver durant ces dix années de viol... Cherchant toujours à décortiquer une quelconque responsabilité dans cette ignoble relation dégradante et humiliante.
Aujourd'hui je vais beaucoup mieux.... Je ne ressens plus- ou beaucoup moins -cette sorte de peur qui m'habitait en permanence ainsi que la certitude d'être une personne inintéressante et ridicule. Je n'ai pas porté plainte par égard pour mes parents... Je ne le vois plus et cela me convient.... Je lui en veux toujours autant, ne serait-ce que pour avoir pollué à jamais mes souvenirs... Bref c'est toute une existence qui s'est construite en tentant de contourner ce souvenir... J'ai du mal ainsi à vraiment discerner ma part de liberté dans la construction de ma vie. Quoiqu'il en soit j'ai une femme et des fils formidables...Ce sont de jeunes adultes maintenant et je vois à travers leur équilibre que je suis parvenu à ne pas contaminer mon entourage avec cette enfance nauséabonde. Voili voilà où j'en suis aujourd'hui......
Merci pour ce témoignage porteur d'espoir, qui prouve que l'amour peut avoir raison de l'horreur perpétrée par un grand frère. Moi-même abusée pendant plusieurs années par mon frère aîné (âgé de 6 ans de plus que moi), je n'ai jamais pu avoir d'enfant. Je sais que cette stérilité est psychologique. Mon frère m'a volé mon enfance et m'a privée du bonheur d'être mère et de fonder ma propre famille. J'ai 41 ans aujourd'hui et le temps m'est compté. Je hais mon frère au plus haut point, lui qui a pu avoir des enfants. Je sais qu'il ne faut pas souhaiter la mort de son prochain mais....
je suis d'accord avec Mary, ton témoignage m'a émue et en même temps il est plein d'espoir , moi qui n'ai jamais confiance en moi et me trouve incapable, coupable de tout et inintéressante , je me dit que peut etre pour mes 2 garçons qui n'ont que 3 et 6 ans, tout n'est pas raté, peut etre que je m'angoisse mais que plus tard tout se passera bien pour notre famille et aussi pour leur vie d'adultes...
en tout cas je te trouve très fort , félicitation car reconstruire ta propre famille (saine) c'est vraiment une réussite :-)
bonne continuation
Merci pour ce témoignage touchant et plein d'espoir !