L'incestuel sans l'inceste
Bonjour à tous, et d’avance pardon pour ce témoignage en léger décalage avec le sujet de l’inceste, mais je le crois pourtant nécessaire ici. Laissez moi vous expliquer.
Je n'ai pas vécu d'inceste, mais j'ai vécu dans la trame de fond dans laquelle elle se déroule le plus souvent, à savoir la négation de son altérité, de son individualité propre, individuelle, et l'intimité inhérente. Je le sais et pourtant quand il s'agit de témoigner je suis sec, tellement rien n'est dicible. Alors je pense aux exemple les plus évidents, mais ils sont si loin du sujet de l’inceste, si « adulte ». Oui mon père à utiliser mon nom pour faire lui une société, et y faire des abus dont j’étais légalement responsable devant la loi, il avait déjà acheté et vendu une voiture, officiellement sans mon intervention, mais là c’était le stade au dessus, acheter un maison en fausse facture en se cachant derrière mon identité, il l’a fait, et quand dix ans après mon départ, accablé par un redressement qui lui coûtait cher je lui ai dit que j’étais content d’être partis avant il m’a dis que lui le regrettait, par ce que moi j’avais rien, alors que lui était dans le pétrin, oui tout ça est vrais mais semble pourtant encore hors sujet.
Il faut dire que c’est adulte que j’ai compris que mon existante propre, et surtout distincte de la sienne, il la combattait, activement. C’est une lutte de chaque instant, de chaque minute, qu’il joue en embuscade, avec patience, en attendant l’ouverture qui lui permettra de détruire aux yeux des autres ma nature distincte de lui même, et ça a toujours été, depuis les plus lointains de mes souvenirs. Tout semble porter a croire que j’ai été un enfant gâté, un peu sur-protégé même pour avoir manqué de mourir très jeune après avoir été secoué dans une crèche … mais c’était rien m’a-t-il dis un jour en voyant sortir mon carnet de santé qui contiens la seule preuve, ils ont eu peur mais un ami de son père, mon grand-père, avait dis que c’était rien, alors c’était rien. Mon traumatisme n’était rien. C’est fort dans la négation ! Surtout que je vis avec les séquelles discrètes mais handicapante des trauma crâniens précoces, a savoir avec des troubles de la cognition sociale. Mais c’est invisible pour les autres, et pour mon père … c’est rien.
A l’époque, parlons-en ici c’est important, les enfants ne soufraient pas ! Si, bien sûr ils souffraient, mais pas selon les soignants. C’était officiel, le bébé était opéré sans anesthésique, car le savoir prétendait que à cette âge la souffrance n’existait pas chez les plus petit, du moins pas comme chez l’adulte, et il a fallut attendre 1987 pour que la démonstration du contraire soient faite, en deux papiers dont l’un comparait le taux de survie de nourrissons lors d’opérations à cœur ouvert en fonction de la quantité d’anesthésique. Deux groupes, l’un opéré comme d’habitude avec au curare et au gaz hilarant, l’autre anesthésié comme on le fait depuis, et Oh surprise, il était meilleur avec anesthésique. Mille neuf cent quatre-vingt sept. Moi j’y suis passé dix ans plus tôt.
Ha oui, j’ai oublié les bases, je suis un homme de quarante ans, et vous pouvez cocher « sans » a toutes les cases habituelle : situation de famille, emploi, etc, etc. Mais ici on parle d’inceste, alors quoi ? Alors Paul-Claude Racamier m’a expliqué mon histoire avec une notion un peut indigeste au premier abord : l’incestuel. C’est comme un arrière plan qu’il retrouvait quasi-systématiquement derrière l’inceste. Cet arrière-plan est fait du refus d’accorder à l’autre son altérité, comme on à refusé de le faire pour les bébés dans les hôpitaux. Le refus de voir est poussé jusqu’au-delà de l’absurde, comme pour les soit disant « bébés insensibles ». C’est typiquement l’intimité qui est déplacé à l’échelle de la famille, et interdite à l’échelle individuelle. Chez moi c’était pas sexuel, rien ne l’était jamais d’ailleurs, non c’était les envies et les besoins qui devait être, et chez lui c’était économique. Une envie d’acheter, on devait avoir envie de l’objet, forcement. J’ai croulé sous ce dont il avait envie lui, jusqu’à le comprendre et remarquer que si je signifiait que je n’aimais pas une chose il le poussait jusqu’à me faire céder. Si je lui disais « Je ne mets plus de montre, je n’en veux pas », il m’en offrait une cher devant la famille élargie pour me contraindre à exprimer ce qu’il voulais que j’exprime. Ça a été systématique, jusqu’à une voiture typé sport quand j’avais des difficultés à joindre les deux bouts. Souvenez-vous, il avait les moyens conféré par l’utilisation de mon identité, et moi qui avais fui j’avais du mal. J’étais fier d’avoir réussi à m’en extraire et bien en peine pour le faire comprendre, je devais être un fils à papa, lui le voulait, et chacun autour se rassurait de me voir en ce rôle … et non pas handicapé par un trauma crânien, non je devais être enviable, et lui faisait tout pour entretenir cette image.
J’ai conscience de la superficialité apparente de mon témoignage.
Pardon.
Je sais que c’est agressif là ou d’autre parlent d’inceste, de placement, de violence en tout genre de poser un tel schéma qui a tout ce de qui est enviable pour beaucoup. Mais la cage transparente est la même que celle de la plus part des situation d’inceste : la négation active de l’altérité. D’après la psy, la mère présente à l’enfant une image de lui même, de ce qu’il vie, et le père qui s’interpose dans cette relation révèle le schémas de distinction des individualités. Chez moi la mère ne voit plus très bien ce qui me concerne depuis que c’est emmêlé avec sa souffrance d’avoir failli me perdre, mon père vit son rapport à elle a travers moi. A 9 ans j’ai habité à la cave. Ho, une belle chambre avec porte fenêtre qui donne dehors, mais à coté d’une pièce de ma mère, une lingerie, dans un « non espace familial », avec mes sanitaires et salle de bain, il y a même eu une deuxième cheminée dans le sous-sol à coté… un autre foyer quoi. C’était la famille de l’ombre, le schéma qui convenait à mes deux parents, mon petit frère et ma grande sœur étant resté dans l’espace de la famille d’en haut, la visible. Ils étaient jaloux de moi je crois. Il croyaient que j’avais. Alors qu’en fait on me prenait.
Moi j’y vivais le calme dont mon hyper-sensibilité avait besoin, j’y vivait la part normal, pas la part d’ombre, pas la foyer dans lequel je prenais la place du père ce dont mes deux parents jouissais.
Oui, j’ai été violé. Mon statut d’enfant l’a été. Pas comme d’autres, sans sexualité, sans acte physique évident, sans atteinte à l’intégrité de mon corps, sans l’horreur cauchemardesque des témoignages habituels de ce site. Mais dans l’ombre, dans l’indicible, l’immontrable, l’inexprimable, j’ai été rendu « conjoint symbolique » de ma mère, sous la pulsion de mon père.
Tel était leur jouissance. Mille détails me le confirment. Mais jamais aucun ne pourra être retenu à charge. Si jamais j’en parle trop, c’est moi qui deviens suspect. Car ce n’est jamais vraiment sorti de l’ombre.
C’est pas incestueux, mais c’est incestuel. Le crime est parfait de n’en être pas un. D’ailleurs je n’ai rien pu en dire il me semble malgré la longueur de ce texte. Peu importe, ceux qui connaissent reconnaîtront entre les lignes. Reconnaître sans reconnaître, faire sans faire, dire sans dire, agir sans agir, construire en détruisant... L’incestuel est un agissement qui fait toujours une chose et son contraire en même temps, car la famille incestuelle est faite d’autres qui ne sont pas autres, les deux en même temps. Voilà pourquoi bien des victimes d’inceste, abusées sexuellement, n’ont pas conscience d’être victimes puisqu’elles n’était pas autre pour l’autre, qui, dans le schémas incestuel agissait envers eux comme avec des autres qui n’était pas autres.
Alors le viol d’intimité n’est plus, il est déporté à l’échelle de la famille qui doit alors se défendre non pas contre l’inceste, mais contre le « viol du secret » de l’inceste, tel un corps d’échelle familiale qui peut tout sur lui même. Souvent l'incestuel précède l’inceste, c’est pourquoi savoir l’identifier est indispensable.