Mon parcours de vie J’ai 54 ans et ce n’est qu’assez récemment que j’ai pu reconstruire mon histoire et pour cela il m’a fallu la réécrire puis que j’en avais inventée une que ne correspondait pas à la crue réalité; cela afin de survivre.J’ai été abusée par mon père autour de l’âge de huit ans et par la suite j’ai complètement refoulé le souvenir de l’abus. Mon père est devenu une espèce de Dieu pour moi, lequel j’aimais et craignait au même temps.
J’ai eu le premier flash back de l’inceste pendant un stage de thérapie Gestalt autour du thème “l’estime de soi”. Avant ça j’avais suivi une psychothérapie analytique avec un psychiatre pendant sept ans que m’a beaucoup aidé dans plusieurs domaines mais qui m’a enfoncé encore plus dans le déni de l’inceste et dans la honte. Sans très bien le comprendre à l’époque, je sentais que mon thérapeute (lequel était devenu un Dieu pour moi), défendait mon agresseur.
Aujourd’hui je suis convaincue que pour les victimes d’inceste la psychanalyse s’avère être contre-productive puisqu’elle n’arrive pas à restituer aux victimes leur statut de « victimes ».
Le chemin a été long avant de trouver la bonne thérapeute; elle m’a été recommandée par une amie, elle est formée à la thérapie Gestalt et je ne crois pas que j’aurais pu m’en sortir sans son aide et son soutien.
Ma relation avec la sexualité a bien évidemment été toujours très compliquée, comme c’est toujours le cas pour les victimes d’inceste, et en général j’ai dû recourir à l’alcool avant d’avoir des relations sexuels.
Pendant des années j’ai aussi eu recours à l’alcool et aux drogues pour surmonter mon angoisse, mon mal de vivre et ma dépression.
Même si aujourd’hui je vais mieux que jamais, je ne prends plus des antidépresseurs et j’ai réussi ma bataille contre la nicotine, je sens que ma vie m’a été volée et avec elle ma sexualité. J’ai été mariée deux fois et je n’ai pas eu d’enfants. Aujourd’hui je n’ai pas de compagnon et l’idée d’établir une intimité avec quelqu’un m’intimide. Je ne suis pas sûre d’avoir réussi totalement à me libérer de l’emprise de ce père monstre tellement idéalisé.
J’écris ce témoignage dans le but de m’aider à aller de l’avant dans la vie sans continuer à être prisonnière de mon histoire. Peut-être mon parcours va résonner chez d’autres gens comme cela m’arrive en lisant tous vos courageux récits. L’inceste est le pire des crimes qu’on puisse commettre contre des innocents parce qu’il vise à détruire le corps et l’esprit. Grâce à Face à l'inceste , nous pouvons tous ensemble nous battre contre une telle ignominie, souvent perversement banalisé.
Merci de tous vos témoignages et bon courage !!